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EDITORIAL
Pas trop fiers !

Le Sénégal a donc bouclé ce 4 avril 2017 les 57 ans d’une indépendance paisiblement négociée avec la France. Un grand raout annuel, organisé sur un boulevard qui rend un hommage éternel à un général agent destructeur de notre identité, tente désespérément de nous convaincre que notre histoire a commencé ce jour là, avec la bénédiction du colon-usurpateur retourné chez lui en restant chez nous grâce à des subterfuges de toutes natures qui, paradoxalement, l’ont rendu encore plus fort et plus présent aujourd’hui qu’hier.
 
Cinquante-sept ans plus tard donc, nous n’avons pas à être fiers de ce que nous sommes devenus par la force de la baïonnette et d’un système d’assimilation puissant et pénétrant, mais également par nos propres trahisons intérieures. La France nous est toujours aussi indispensable: c’est elle qui boucle notre budget annuel car nos autorités d’hier et de maintenant s’en révèlent incapables ; et c’est elle qui garantit l’inviolabilité de notre territoire face aux menaces extérieures. La France et ses hôpitaux accueillent encore nos « illustres » malades, autorités et simples citoyens, désireux de survivre aux carences de notre système de santé. Tant mieux pour eux car personne n’est candidat à la mort.
 
La réalité est terrible : nous ne savons presque rien faire par nous-mêmes. Tous les grands pays du monde sont à notre chevet sur tous les plans (éducation, agriculture, développement scientifique, infrastructures, etc.). Les institutions de Bretton Woods, Fmi et Banque mondiale, se sont infiltrés dans la définition de nos politiques publiques, en dépit de leurs échecs répétés à nous sortir définitivement de l’ornière. Et nous pouvons encore nous faire écraser par l’Union européenne dans le cadre des Ape.
 
Nous ne savons rien faire par nous-mêmes, mais la plupart des dirigeants qui ont « servi » ce pays ont su, eux, s’enrichir sur le dos des populations à travers moult stratagèmes. Ils sont l’élite corrompue, celle qui était censée amener le Sénégal à un autre palier. Nous ne savons rien faire par nous-mêmes, mais avons su élever l’indiscipline collective à un niveau de perfection qui ne nous laissait aucune chance de progrès significatifs.
 
Nous ne savons rien faire par nous-mêmes car, très tôt, nous n’avons pas voulu être la Corée ou Singapore: nous voulions rester une certaine France, celle qui ne tire rien de substantiel de la Mère-Métropole quand il s’agit d’assurer sa propre émergence.
 
Nous en sommes là, cinquante-sept ans plus tard. Voir et entendre des chiffonniers parvenus disputer un espace de liberté d’expression à de jeunes activiste qui, eux, ont déjà rendu service à la démocratie sénégalaise, quoi que l’on puisse leur reprocher par ailleurs. (Momar Dieng)

 

Le Président qui a peur de son ombre !
Mille et un projets lancés dans le cadre du fameux fourre-tout appelé Plan Sénégal Emergent (PSE), on en attend les retombées même si des apprentis-sorciers tentent de nous convaincre sans cesse que le pays a changé en…bien. Un pouvoir empêtré dans mille et un scandales économico-financiers que des officines s’échinent à étouffer par mille et une astuces sans grande ingéniosité.
 
Une bérézina à peu près généralisée dans le domaine stratégique de la bonne gouvernance et de la transparence : Abdoulaye Wade a fait faillite à ce niveau, mais l’échec de Macky Sall est encore plus dramatique et insupportable au regard des missions qui pesaient sur ses épaules, de ses propres engagements, et des attentes du peuple sénégalais.  
 
Cinq ans après la chute de Me Wade, le Sénégal végète encore dans les eaux fétides de politiciens cyniques, corrompus, arrogants, issus autant des entrailles du parti-Etat que de zones périphériques prises d’assaut par une meute assoiffée de prébendes qui, l’histoire le retiendra, a finalement accepté au chef d’Etat en exercice tout ce qu’elle a refusé au «peuple» des Assises nationales.
 
Cinq ans après la fin du Sopi, le Sénégal s’est embourbé dans une impasse multidimensionnelle qui met en danger le pays tout entier. La faute pas seulement à un Président incompétent, en déficit d’épaisseur et de hauteur, incapable d’être juste et bien dans ses nobles fonctions, sectaire et clanique, adepte de l’impunité sélective, politicien tout court… La faute également et surtout à cette volonté forte d’affaisser tous les contre-pouvoirs en les mettant au contact direct de l’argent et des privilèges. Le Président n’aime pas les secousses. Il en a peur malgré sa grande expérience politique au plus haut sommet de l’Etat.
 
Or, ces contre-pouvoirs sont, dans une démocratie même relativement acceptable dans son fonctionnement, des piliers qui savent alerter et agir contre les dépassements de ligne rouge. Ils ont été corrompus, pour l’essentiel. La presse en général n’a pas échappé à cette soif de puissance. C’est que le Président a peur de tout, même de son ombre.
 
Cinq ans après son arrivée au pouvoir, le président par défaut s’est forgé une bien sulfureuse réputation : autoritaire sans cause, «confiscateur» des libertés démocratiques, maître dans l’interdiction systématique des manifestations publiques de ses opposants au travers d’un salmigondis de faux-fuyants répétitifs, rétif à toute forme d’opposition dont il pense qu’elle est une menace contre lui… Après, ses hérauts vont se plaindre que ses déplacements à l’étranger soient perturbés !
 
Cinq ans après, l’ambiance sénégalaise est irrespirable, le tour de vis contre la démocratie est passé par là dans ce pays livré aux forces économiques étrangères. Un Président règne aux côtés de sa famille, de ses amis, de ses nouveaux griots comme dans un royaume où le peuple est sujet. Ce Président a un nom très enviable : déception.
 
La JUSTICE est l’épine dorsale d’une démocratie, le pilier du principe de la séparation des pouvoirs, le pouvoir qui, seul, a le pouvoir d’arrêter un pouvoir. Cinq ans après son élection, Macky Sall a gravement échoué sur ce plan. Le reste, c’est des histoires…

 

Profession : politicien
 
Leur vie a fini par se confondre avec l’Etat, la République, les institutions. Leurs noms sont devenus des symboles, positifs ou négatifs ; leurs parcours sont à la fois modèles et contre-modèles selon ce que l’on cherche à en tirer comme leçons. Adulés ou haïs, ils s’en moquent au fond : ils sont désormais des Seigneurs de la vie politique. Ils sont sans âge, entre plus ou moins quarantaine et le seuil approché ou franchi des soixante-dix ans. Ils sont le miroir du Sénégal dont ils tiennent le destin entre les mains. Ce sont des pros de la politique.
 
Ils s’appellent Moustapha Niasse, Macky Sall, Khalifa Sall, Djibo Kâ, Ousmane Tanor Dieng, Aminata Tall, etc. Sur leurs pas, des jeunes aînés, eux aussi sortis du même moule, font leur apprentissage de la politique professionnelle, avec déjà pas mal de cordes à leur arc. Ils promettent…
 
Ces pros impénitents de la politique entrent en…politique comme on entre en religion : ils en apprennent les codes, les us et les coutumes, afin d’être en mesure d’en perpétuer le dogme. Il leur arrive certes d’avoir un ou deux pieds dehors, notamment en période de vaches maigres coïncidant avec la relégation au purgatoire de l’opposition. Mais ce n’est souvent que partie remise : soit ils reviennent au pouvoir grâce à l’alternance, soit ils mutent en transhumants, ou, plus rarement, ils décident de se faire oublier à jamais ou momentanément.
 
Pourquoi renonceraient-ils à un « sacerdoce » qui leur assure logement de fonction, salaires non soumis aux incertitudes de l’emploi, primes et prébendes diverses, voiture et chauffeur, facilités aux guichets des banques, retraite parlementaire pour ceux qui se débrouillent pour avoir le nombre de mandats nécessaire, protection politique en cas de délinquance, accumulation capitalistique, etc. ?
 
En fin de compte, une des questions à se poser est la suivante: qu’est-ce qu’une ou deux générations d’hommes politiques ont réellement apporté au Sénégal ? Le pays a-t-il avancé en proportion de ce que ses contribuables ont fourni comme moyens et ressources à ces preux serviteurs de la collectivité nationale pour qu’ils réussissent leur mission ?
 
Ce qui est en cause, c’est la professionnalisation de la vie politique qui sécrète l’émergence d’entrepreneurs politiques, elle-même résultat de ce que de hauts fonctionnaires de l’administration d’Etat dénoncent sans résultat depuis des années.
 
Dé-professionnaliser l’exercice de la politique, comme d’autres l’ont déjà proposé, passerait par le recours à un certain type de bénévolat qui décourage la ruée vers…l’or qu’est la politique politicienne. Mais au regard des intérêts gigantesques qui structurent la « fonction » de politicien, il va falloir patienter encore quelques décennies… (Momar Dieng)

Serigne Abdoul Aziz Sy Al Amine, nouveau khalife général des Tidianes
Serigne Abdoul Aziz Sy Al Amine, nouveau khalife général des Tidianes
C’est ainsi que les Etats périssent, se disloquent où s’embrasent. A force de mettre les uns (ses parents et ses amis) au-dessus de tous les autres (adversaires et ennemis présumés), de susciter et d’entretenir des oligarchies intouchables, on en vient à briser le ciment unique, le baromètre universel qui fait que les hommes et femmes vivant en société acceptent les règles éternelles du jeu social : la justice et l’équité.
 
Hors ce cadre de consensus, bonjour le chaos et les frustrations. En cela, la responsabilité des autorités de ce pays est d’une gravité extrême. Mais elle a le don heureux de nous ouvrir (encore une fois) les yeux sur ce que devraient être les intérêts supérieurs du Sénégal. Une cogitation qui nous ramène forcément aux bons choix indispensables au redressement du Sénégal. Par exemple, les Assises nationales.
 
On n’en serait peut-être pas à ces tribulations politico-judiciaires si les politiciens de tous bords -  socio-démocrates, marxistes, staliniens et autres - qui avaient ferraillé contre Abdoulaye Wade n’avaient pas trahi les aspirations populaires de bon sens ayant sanctionné le «ndeup national» dirigé par le Pr Mbow. Par égoïsme autant que par lassitude à donner un prolongement à la lutte enclenchée sous Wade, ils ont sacrifié l’unique boulevard dans lequel il y avait espoir de voir le Sénégal emprunter un chemin balisé par une réelle volonté populaire.
 
Aujourd’hui, le pays est dans la fracture, englué dans une « démocratie judiciaire » où la justice n’est plus un pilier mais une marche à partir de laquelle l’autorité politique instrumentalise l’Etat à des fins partisanes, désigne les bons citoyens, vilipende les mauvais Sénégalais.
 
Les gens du pouvoir sont les seuls à ne pas s’en apercevoir, le nez sur le guidon de textes dont ils sont à la fois juges et partie : la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite s’est effondrée depuis bien longtemps. Elle laisse derrière elle un extraordinaire tas de gâchis qui ont ramené le Sénégal des années en arrière et ravalé la démocratie en un système autoritaire décomplexé.
 
De ses visites récurrentes aux «simples citoyens» que sont les marabouts, nous n’osons pas croire que Macky Sall n’ait jamais fait l’objet d’un «khoutba» (sermon) sur ce que l’Islam (et le Christianisme) pensent de l’injustice… Il est encore temps qu’ils le fassent car le spectacle que le pouvoir nous montre est proprement hallucinant.
 

Radiothérapie: La fausse colère d’un président pris en flagrant délit d’irresponsabilité
« Il faut que certains gens aillent chercher autre chose à faire que de dire des choses qu'ils ne maitrisent pas. Des gens qui n'ont rien à faire de leur vie à part errer, profitent des situations dont ils ne savent rien, pour dire n'importe quoi et essayer de manipuler les Sénégalais. Ils ne connaissent rien de la situation actuelle, mais il faut qu'ils parlent tous les jours même si c'est pour ne rien dire. » (Lu sur les réseaux sociaux).
 
Pour un Président de la République, des mots comme ceux-ci sont un révélateur négatif d’un certain nombre d’aspects liés à la personnalité et aux modalités d’exercice de ses fonctions. Plus simplement, ils semblent provenir d’un individu pris en flagrant délit d’insouciance ou d’incompétence face à un drame national. Alors que la question gravissime du caractère inutilisable de l’appareil de radiothérapie est l’objet d’une inquiétude populaire légitime, c’est la première fois que Macky Sall daigne en parler, à l’étranger en plus, comme d’habitude !
 
De quoi se plaint le chef de l’Etat ? Nous sommes un pays sans grandes ressources, avec des populations dont la majorité ne dispose pas des moyens suffisants pour se prendre médicalement en charge de façon qualitative. Notre système de santé, quelle que soit la qualité intrinsèque de certains de ses praticiens, reste gangrené par la corruption à tous les étages, comme l’avait démontré le rapport explosif du Forum civil et de ses partenaires produit au milieu des années 2000. Les malades du cancer et leurs parents doivent faire face à l’absence préjudiciable du seul appareil disponible dans le service public de santé. Des citoyens émus et révoltés lancent modestement une quête pour venir en aide aux cancéreux à travers les réseaux sociaux. Où était Macky Sall ? Absent ! Jusqu’à son réveil brutal de Dubaï. On est où là ?
 
De quoi se plaint le Président de la République ? Du volontarisme et de la compassion de ses compatriotes, moins fortunés que lui, désireux de suppléer aux carences et au cynisme inacceptables du gouvernement sur ce dossier ? Les initiatives citoyennes ont-elles remué en lui la conscience de l’irresponsabilité et du devoir non accompli ? Il aurait tort. Lui, plus que d’autres, devait être en mesure de comprendre ce que peut être la détresse qui frappe une frange de ses compatriotes dont il assure quelque part la destinée.
 
Ces petites phrases terre à terre lancées a hue et a dia, qui ne visent personne en particulier et tout le monde en général, ne sont pas dignes de son statut. D’autant moins d’ailleurs que sa « garde rapprochée » avait déjà fait le « boulot » de la com’ pour lui, en l’occurrence les ministres de la Santé et des Finances. On voit poindre dans ses propos cette graine immature d’arrogance que l’on aurait volontiers « compris » s’ils émanaient de politiciens nés avec une cuillère de diamant à la bouche. Mais visiblement, ce train express qu’est la vie roule un peu trop vite pour certains.
 
Le devoir du Président de la République en exercice – personnalité politique de premier plan grassement entretenue depuis deux décennies par l’argent des contribuables - est de faire en sorte que tous les malades de ce pays disposent des soins médicaux vitaux, comme il le faut, quand il le faut, là où cela est nécessaire. Le reste, c’est de l’errance intellectuelle. Les psychiatres et les psychologues pourraient le rappeler : la nervosité est un facteur anti-thérapeutique qui n’améliore pas forcément l’état de santé du « moi ».  (Momar Dieng)
 

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