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EDITORIAL
Barbarie, pas plus ni moins !
L’assassinat sans appel de treize jeunes coupeurs de bois dans une de ces belles et sublimes forêts de Casamance que l’on croyait dans un processus de guérison irréversible nous rappelle une bien triste réalité.

Il y a encore dans ce bout méridional de notre pays des hommes capables de tuer leurs semblables avec une désinvolture criminelle sans pareil. Le procédé d’exécution de ces coupeurs de bois qui vivotent dans la précarité est un élément d’information sur la nature psychique cinglée de tueurs imbus de leurs capacités de nuisance à l’intérieur de leurs zones de prédilection. Ce sont des barbares !
 
En cela, le Président de la République et son gouvernement sont gravement interpellés par ce saut inattendu dans l’horreur cru. Sans occulter la complexité de la question casamançaise et en sachant qu’une paix durable ne se décrète point, il devient urgentissime de poser les actes forts desquels jaillira une solution définitive contre l’irrédentisme.
 
Mettre hors d’état de nuire les bandits encore saoulés aux mamelles de l’indépendantisme, remettre les territoires perdus ou occupés dans le giron de l’espace vital national, accélérer avec équité et transparence la transformation économique et sociale du bassin casamançais, telles sont les missions qui incombent à nos gouvernants pour que nous échappions tous ensemble à des phénomènes insupportables comme celui de ce samedi 6 janvier 2018. Une vérité s’impose : tant que des poches de territoires seront «administrées» par des rebelles supposés, les populations vivront avec le danger.

Au regard de ce drame, on voit bien que toutes les compromissions, ruses, tactiques et autres manigances aux soubassements politiciens qui encerclent la crise casamançaise ne peuvent avoir que deux points de convergence: le dérisoire et l'égoïsme.
 
Il est simplement déplorable que le Président Macky Sall ait pu aller soutenir «Charlie Hebdo» à Paris dans un laps de temps très court et ne pas pouvoir le faire auprès des familles des treize jeunes assassinés…à Ziguinchor.     
 
 

La traque des biens dits mal acquis est, pour Aminata Touré, comme un bébé personnel à qui elle aura consacré un bon bout de temps. Alors, le voir périr ou péricliter, sous ses yeux, lui est insupportable. D’où cette révélation sur les plus de 200 milliards de francs Cfa que l’Etat a recouvrés, selon elle.


«200 MILLIARDS» DES BMA : la bombe Mimi qui touche Macky
En annonçant que la traque dite des biens mal acquis a permis à l’Etat du Sénégal de recouvrer «au moins» 200 milliards de francs Cfa, Aminata Touré a jeté un véritable pavé dans la mare sénégalaise. Ses propos ne peuvent pas être anodins encore moins de la diversion eu égard aux fonctions qu’elle a occupées dans un passé si proche de nos mémoires. Au contraire, ils mettent en mauvaise posture le régime auquel elle appartient, en particulier le Président de la République, sommé de clarifier la lanterne des Sénégalais et des bailleurs partenaires de notre pays. L’affaire est d’autant plus grave maintenant avec les soutiens remarquables que reçoit l’ex garde des Sceaux, ceux d’Abou Abel Thiam, président du conseil de surveillance de l’Artp, et de Mame Mbaye Niang, ministre du Tourisme.  
 
Ancienne garde des Sceaux, puis Premier ministre, celle qui est devenus l’Envoyée spéciale du chef de l’Etat nous apparaît sous trois plans après sa sortie : soit elle a manifestement raison mais avec des marges d’erreur qui ne remettent pas en cause sa thèse; soit elle s’est gravement embrouillée dans les éléments d’information à sa disposition avec un risque de méprise assez élevé pour que «ses» chiffres ne soient pas crédibles ; ou alors elle serait quelque part entre ces deux extrêmes avec comme difficulté principale le chiffrement relativement acceptable des sommes recouvrées.
 
Si l’objectif d’Aminata Touré était de «communiquer» à la place du gouvernement en direction de l’opinion publique sur le travail de recouvrement de «biens spoliés» au bénéfice de l’Etat sénégalais, il n’est pas certain qu’elle ait réussi vu la contrainte qui pèse maintenant sur le pouvoir: celle de clarifier la polémique.
 
D’ailleurs, le président de l’assemblée nationale, Moustapha Niasse, indirectement interpellé par rapport à une ou des lois de finances rectificatives concernant ces «200 milliards», a vite fait de dégager la responsabilité de l’institution qu’il dirige depuis 2012, et on le comprend: par exemple, aucune loi de finance rectificative n’a encore pris en compte un actif immobilier comme «Eden Rock» (évalué à 4,5 milliards de francs Cfa) que cite Aminata Touré en tant que bien saisi sur le patrimoine présumé de l’ex-ministre d’Etat Karim Wade. Au-delà, le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan ne pourrait prolonger son silence en tant que gérant central des deniers de l’Etat. Quant au chef de l’Etat, il sera encore aux abonnés absents…
 
Dans une démocratie respectueuse de la séparation des pouvoirs et de la capacité des institutions politiques et judiciaires à exécuter les missions qui leur sont dévolues, cette affaire serait déjà prise en main par l’assemblée nationale avec l’audition d’Aminata Touré, d’une part, suivie de la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire élargie, crédible et dotée de pouvoirs d’investigations réels. Mais aujourd’hui, cet objectif de transparence est quasiment irréalisable en raison de l’opacité fondamentale qui caractérise la gouvernance publique des autorités au pouvoir. En attendant, Aminata Touré semble bel et bien revenue au centre du jeu politique. Ce qui était peut-être pour elle un but collatéral…
 

Fermeture de Yavuz Salim: des contrats de services contre la dignité du Sénégal
L’aveu du Président Macky Sall sur le chantage exercé par la Turquie en faveur de la fermeture des écoles du réseau Yavuz Salim se passe de commentaires. Il est si extraordinaire que l’on se demande si l’on doit souligner la sincérité surprenante du chef de l’Etat dans la justification de la décision gouvernementale ou s’appesantir sur la soumission brutale du Sénégal à l’exigence du Président Reccep Tayyip Erdogan. Au final, autant il est du devoir d’un chef d’Etat d’être transparent à l’endroit de son peuple, autant il a l’obligation sacrée d’en défendre les intérêts.
 
Pour la circonstance, il est difficile de croire que le Président Sall se soit plus soucié des intérêts souverains du Sénégal que de ses propres perspectives politiques. Concrètement, en cédant au chantage d’Erdogan, le chef de l’Etat sénégalais a fortement privilégié la défense des contrats de prestations de services signés par son gouvernement avec des entreprises turques. L’aéroport international Blaise Diagne de Diass-Thiès est l’un de ces contrats. Il a décidé d’en faire l’emblème de son septennat.
 
Il a programmé son ouverture à la date du 7 décembre 2017, et cela les Turcs le savent depuis bien longtemps. Au conseil des ministres du 11 octobre, il a fait adopter un projet de décret ouvrant l’AIBD à la «circulation aérienne publique». Il est plus que probable que la Turquie ait usé, directement ou indirectement, du chantage sur ce dossier lourd au plan financier.
 
Entre la gestion de  cet aéroport confiée aux Turcs pour les vingt prochaines années, la construction, auparavant, du Centre international de conférence de Diamniadio (CICAD) par des entreprises turques, des investissements de plusieurs centaines de millions de dollars dans divers domaines dont l’hôtellerie, et les pressions des lobbies d’affaires sénégalais proches du régime et qui tirent  partie de ces business, la tentation a été grande de capituler. Macky Sall n’y a pas résisté. Il a eu tort.
 
Que vaut un aéroport (flambant neuf), hérité d’un pouvoir précédent, face à l’extraordinaire sacerdoce que constitue le défi de mise en œuvre réelle d’une école d’excellence au service des enfants de son pays ? La mise à sac lente de Yavuz Selim – car c’est de cela dont il s’agit en fin de compte – pour satisfaire un pays étranger est une humiliation manifeste infligée à la fonction présidentielle sénégalaise. Dès lors, il n’est pas certain que les autorités turques, au-delà du vocabulaire diplomatique convenu, puissent vouer un respect sincère à leurs homologues du Sénégal.
 
Ici, ce n’est pas Erdogan qui est en cause si l’on suit le principe selon lequel les Etats n’ont pas d’amis mais des intérêts. C’est notre président qui a failli. Défendre la scolarité de 3 000 enfants et le gagne-pain de centaines de travailleurs d’un système reconnu performant nous parait mille fois plus noble que privilégier de manière si outrancière une infrastructure – l’aéroport Blaise Diagne – qui ne développera pas (par ailleurs) fondamentalement le Sénégal.  Un pays et son Président doivent se faire respecter au plan international au risque d’être classés dans la catégorie des paria juste destinés à sortir de l’histoire par les petites portes laissées ouvertes pour eux par les ogres de la planète.
 
Question essentielle à laquelle le président Sall ne répondra pas: en quoi ces écoles du réseau Yavuz Selim étaient-elles une menace pour cette Turquie si fière d’elle-même et de son histoire, celle qui ferraille autant avec les Etats-Unis (récente affaire des visas), qu’avec l’Union européenne (projet d’adhésion bloqué) et qui est au cœur des grands conflits irakien et syrien ?
 
L’histoire et la vie peuvent nous réserver pleine de surprises. Elles nous surprendraient lorsque, de cette fournée d’élèves empêchés de poursuivre leurs études dans les écoles Yavuz Selim par leur propre Président de la République, sortiraient un jour des ingénieurs sénégalais qui construiraient pour le Sénégal quelque chose comme un…aéroport de grande dimension.
 

Aliou Sall à la CDC: conflits et chantages autour de Macky Sall (Editorial)
Le journaliste et consultant Adama Gaye nous avait prévenus tous, il y a plus de cinq ans, de la véritable nature d’un Macky Sall alors en compétition avec Abdoulaye Wade pour occuper le fauteuil de la présidence de la République. Certains en avaient tenu compte, d’autres l’avaient insulté, quelques-uns s’étaient abstenus de prendre part au second tour de l’élection  présidentielle du 25 mars 2012. C’est Adama Gaye qui avait raison ! C’est un cocktail implosif de peste et de cholera que nous avons porté au sommet de l’Etat et des institutions du Sénégal. Nous en payons le prix aujourd’hui, jusqu’à la lie.
 
La nomination d’Aliou Sall au poste de directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) n’est pas seulement un scandale de plus dans la gouvernance de Macky Sall. C’est un méga-attentat public contre la Transparence et la Gestion Vertueuse des Biens de notre Pays. La CDC n’est pas une institution comme une autre : c’est le bras long financier et économique de l’Etat du Sénégal. C’est une sorte de banque publique géante aux capacités financières sans commune mesure avec les autres institutions qui échoit ainsi entre les mains du clan présidentiel, la Faye-Sall Family.
 
Cette nomination dont on espère qu’elle ne sera pas juste située dans le registre sec des pouvoirs dévolus au chef de l’Etat par la Constitution et les lois de notre pays est un tournant politique majeur dans les perspectives de conservation et de perpétuation du pouvoir par le clan Faye-Sall et ses affidés.
 
D’une part, elle consacre la «victoire» de la rébellion d’Aliou Sall contre des sous-clans de la «dynastie» régnante qui raffolent de le déchoir des «positions» fortes que, paradoxalement, le négoce pétro-gazier avec le Groupe Timis lui a octroyées en termes d’influence politique sur son frère aîné. Sall Jr. n’est pas né de la dernière pluie : il sait bien mieux que tout le monde l’importance significative que requièrent les décrets signés en sa faveur par Sall Sr. Des éléments de pression et de chantage relatifs à l’ensemble des coulisses qui ont entouré la cession de blocs d’hydrocarbures au groupe de l’homme d’affaires australo-roumain. Le grand-frère est dans le piège.
 
En acceptant de ne pas figurer sur les listes législatives aux scrutins du 30 juillet 2017, Aliou Sall envoyait en même temps un signal fort à Macky Sall: il ne serait plus question pour lui d’être hors du champ politique décisionnaire duquel certains voudraient l’éloigner. Sa posture naturelle de frère du chef de l’Etat ne devait plus être, à ses yeux, un facteur de mise en quarantaine du politicien qu’il est, maire de Guédiawaye, financier dans le parti présidentiel et patron de l’Association des maires du Sénégal (AMS). Qui peut le lui reprocher ? Cet avertissement, Macky Sall en a bien tenu compte, d’une manière ou d’une autre. La CDC est un gros morceau !

D’autre part, cette nomination complètement immorale et dénuée d’intelligence éthique ne fait que confirmer la faiblesse rédhibitoire qui caractérise l’homme que nous avons malheureusement élu en mars 2012. Sans carrure, sans charisme, froid, boudeur, intolérant… Les qualificatifs manquent pour décrire notre bien-aimé Président de la République. Faible contre les Etats et groupes affairistes rapaces qui dépècent notre économie, fort et impitoyable contre les opposants qui remettent en cause, à juste titre, ses incapacités notoires devenues trop évidentes, Macky Sall est finalement une hérésie pour notre pays, pour les démocrates sincères qui aspirent à élever notre démocratie vers des cimes supérieures, et même pour ces militants, cadres et responsables de son giron dépités par tant de errements et de laxisme calculé.
 
De quoi cette promotion d’Aliou Sall par son frère chef de l’Etat est-elle le nom ? Simplement, elle signifie une accélération des procédures d’accaparement de l’Etat et de ses leviers par le clan gouvernant et ses apprentis-politiciens et affairistes. L’agenda de Macky Sall est bien trop clair depuis belle lurette: il a décidé très tôt de tromper le peuple qui l’a élu par le reniement systématique de ses engagements solennels devant la nation. Un mandat à cinq ans volé sans scrupules. Une Constitution arrachée avec un taux de participation d’environ 38% au référendum. Un processus électoral saboté et emporté dans la douleur qui a laissé sur le carreau plus d’un million de citoyens sans carte d’électeur… La coupe est pleine il y a un siècle !
   
Tels les ouragans Harvey et Irma semant désordres et calamités sur leur chemin, le président Sall est en train d’installer le Sénégal dans un cycle irréfléchi d’incertitudes pour l’avenir. Au nom d’une revanche sociale sur le passé, il s’inscrit dans un sens de l’histoire qui associera son nom (et bien sûr celui de sa famille) dans une tragédie post-présidentielle qui pourrait l’accabler infiniment, intemporellement. C‘est pourquoi, il serait bien avisé de rapporter cette mesure scélérate qui le met encore une fois définitivement hors du cercle des intérêts du Sénégal. Mais ne nous faisons pas d’illusions, cet homme ne cède que dans le rapport de forces qui lui est défavorable. Il ne supporte pas les combats rudes, durs ; il perd le Nord aux premières escarmouches pour se placer dans la posture du négociateur.
 
C’est donc sans état d’âme qu’il poursuivra son œuvre de destruction méthodique des bases politiques, éthiques et morales de ce pays. Son régime a corrompu assez de journalistes, de politiciens, de notables religieux, et institué le népotisme un peu partout dans les strates de la bureaucratie d’Etat partisane pour qu’il soit à peu près tranquille un temps. Ainsi a-t-il pris goût aux méthodes du forcing permanent duquel il ne se départira point jusqu’à preuve du contraire. Qui a oublié son «vote» local de 2002 dans son fief de Fatick !
 
Dieu Seul sait si Macky Sall sera encore là en 2019, mais le geste politique posé à l’endroit de son frère Aliou Sall ne trompe pas : ce pouvoir est en très grande difficulté dans sa quête de survie.

 

La démocratie à l’ombre de Pyrrhus!
Les électeurs sénégalais ont donc choisi leurs représentants à l’assemblée nationale au cours d’une mémorable journée de 30 juillet 2017, dans les conditions que tout le monde connait. Le conseil constitutionnel a clos tout ce qui était susceptible de se muer en contentieux après s’être transformé en faiseur de loi électorale. Ces législatives auront été une formidable occasion pour la classe politique et les organisations de la société civile de mesurer le travail qu’il reste à faire pour éviter que la démocratie soit l’objet de captation.
 
Le challenge est colossal eu égard à certaines habitudes intériorisées et mises en œuvre par des politiciens plus soucieux de leur carrière immédiate que d’une évolution qualitative du système de représentation politique.
 
Du travail, il y en a à faire, surtout quand les plus hautes autorités de la République se félicitent publiquement, sans gêne, de la «bonne organisation du vote» à l’échelle du territoire. Comme s’il ne s‘était rien passé avant et après les scrutins! C’est cette tendance tournant le dos à l’humilité et à la prise de conscience face au chaos électoral incrusté au cœur de ces législatives qui peut inquiéter.
 
Nos gouvernants ont-ils pris la pleine mesure du désastre qui s’est abattu pour la première fois sur des élections nationales ? A défaut de présenter leurs excuses au peuple sénégalais, sont-ils prêts au moins à corriger les graves dysfonctionnements pointés du doigt par les observateurs nationaux et de l’Union africaine ?
 
La mission qui incombe dorénavant au Président de la République, à son (futur) gouvernement, à la nouvelle assemblée nationale, en partenariat avec la classe politique et la société civile, est connue. Il s’agit de redonner à notre système électoral, dans toutes ses composantes, son lustre perdu dans la débâcle organisationnelle et technique du 30 juillet, quoi qu’en pensent les apprentis sorciers.
 
Cette exigence d’intérêt national passe par une mise à jour consensuelle du fichier national des électeurs, sans attrape-nigaud. C’est le service minimum vital que nos dirigeants peuvent rendre à ce pays et à ses institutions. Sinon, ils pourront revendiquer la descendance de Pyrrhus: gagner des batailles dans la douleur, pour dire le moins.
 
Incompétente et politicienne sous plusieurs angles, l’opposition devrait se réveiller, accepter de prendre part au travail de modernisation du système politique avec sérieux et détermination, en étant moins roublarde et plus soucieuse de l’intérêt collectif. Si elle ne change pas, il est certain qu’elle va au devant de grands échecs dans les deux années à venir.
  

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