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Loi immigration: Borne consulte tous azimuts pour sauver ce qui peut l'être

Jeudi 14 Décembre 2023

Moins de quatre jours pour trouver un compromis: Elisabeth Borne a multiplié les réunions jeudi, avec la droite puis avec sa majorité, pour trouver un terrain d'entente sur le projet de loi immigration, quitte à lâcher du lest sur les régularisations de sans-papiers.

 

Le marathon se poursuit à Matignon. Comme la veille, la Première ministre a d'abord reçu les dirigeants des Républicains pour reprendre le fil des tractations. Mais ceux-ci, renforcés, campent sur leurs positions.

 

Après avoir rejeté le scénario d'une réforme réduite aux seules mesures répressives facilitant l'expulsion des délinquants étrangers, Eric Ciotti et ses troupes ont à nouveau "confirmé (leur) volonté de voir adopté le texte du Sénat", point de départ très droitier de la commission mixte paritaire (CMP) convoquée lundi à 17H00.

 

Un rendez-vous décisif où LR se présente "en ordre groupé", affirme la députée Annie Genevard, qui siègera parmi les 14 parlementaires de cette instance avec l'intention "d'aboutir mais pas à n'importe quel prix". A la rigueur quelques "bougés" mais "pas des abandons en rase campagne", prévient-elle.

 

Dans la foulée, Mme Borne s'est entretenue avec les cadres du camp macroniste, puis le patron du groupe Liot (centriste) Bertrand Pancher, ressorti en lançant "un appel à la responsabilité" pour aboutir à "un équilibre qui permette de voter cette loi".

 

La cheffe du gouvernement a ensuite convoqué ses principaux ministres rue de Varenne pour leur "présenter les grands équilibres prévisibles", selon un participant, avant d'aller à la rencontre de sa majorité relative à l'Assemblée en fin de journée.

 

Une frénésie de consultations destinée à ajuster les "lignes rouges" adoptées mercredi soir par les députés Renaissance, qui ont refusé toute concession sur l'aide médicale d'Etat, le droit du sol ou la rétention des mineurs de moins de seize ans.

 

En revanche, ils se sont résignés à des régularisations au cas par cas, à la discrétion des préfets, pour les travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension, en espérant que cela se fera "sans passer obligatoirement par l'employeur", a indiqué leur chef de file Sylvain Maillard.

 

- "Gâchis épouvantable" -

 

Cet article sera maintenu "dans la mesure du possible", a même avancé Sacha Houlié, héraut de l'aile gauche de la macronie, obligé d'admettre que la majorité part "incontestablement" avec un handicap dans ces négociations "âpres" et "difficiles".

 

Le président de la commission des Lois de l'Assemblée, qui présidera à ce titre la CMP, a toutefois mis en garde les Républicains contre "une immodestie de se dire que +c'est leur texte ou rien+".

 

Mais le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, tient un tout autre discours. Malgré le camouflet de la motion de rejet lundi, il a jugé "évident qu'on doit se rapprocher du texte du Sénat". "Le seul adopté par les représentants du peuple français", a insisté un autre ex-LR, son homologue à l'Economie Bruno Le Maire.

 

Car c'est bien l'exécutif qui joue le plus gros. En cas d'échec, le projet de loi serait abandonné, le président de la République Emmanuel Macron ne souhaitant pas passer en force par un 49.3, quand bien même le Conseil constitutionnel n'a pas fermé la porte à cette possibilité, dans une décision rendue jeudi soir. En attendant, sa Première ministre en a de nouveau fait usage, sur le budget 2024, pour la 21e fois depuis son arrivée à Matignon.

 

Si en revanche la CMP accouche d'un compromis, le vote des deux chambres du Parlement aurait lieu dès mardi. Mais sans débat ni possibilité d'amendement, ce qui serait "un gâchis épouvantable" pour François Bayrou, qui a déploré qu'une loi puisse être adoptée "sans avoir jamais été examinée" par les députés.

 

L'absence d'entrain du patron du MoDem reflète les réticences d'une partie de la majorité, qui pourrait faire défaut si le résultat penche trop à droite et déclencher ainsi une crise au sein de la macronie.

 

L'adoption du texte pourrait alors dépendre des députés Rassemblement national, qui ne sont pas associés aux négociations. Or, le parti d'extrême droite a déjà prévenu qu'il ne "pourra pas le voter" si les "mesures de régularisation" sont maintenues. Son unique représentant à la CMP a même reçu "mandat" de "faire sauter les mesures pro-immigration".

 

Marginalisée, la gauche ironise, à l'image du chef de file des députés socialistes Boris Vallaud dénonçant les compromissions d'une majorité qui "n'a plus de lignes rouges". Une évolution qui inquiète la directrice de l'association France Terre d'Asile, Delphine Rouilleault, pour qui "la course folle à l'adoption semble lancée sur le dos des étrangers". [AFP]

 

 

 

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