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Kenya: les manifestations interdites dans le centre des grandes villes

Jeudi 12 Octobre 2017

Kenya: les manifestations interdites dans le centre des grandes villes
Le gouvernement kényan a interdit jeudi les manifestations dans le centre des trois principales villes du pays, après l'appel de l'opposition à de nouveaux rassemblements, cette fois quotidiens, en amont de la présidentielle du 26 octobre.

Prise dans un climat politique tendu, la décision risque d'entraîner de nouvelles confrontations entre policiers et partisans de l'opposition, alors que la saga électorale kényane va de rebondissement en rebondissement depuis l'invalidation en justice de la réélection du sortant Uhuru Kenyatta à la présidentielle du 8 août.

Après plusieurs manifestations implacablement réprimées par les forces de l'ordre ces dernières semaines, notamment à l'aide de gaz lacrymogène et de coups de feu, l'opposition a annoncé mercredi des rassemblements quotidiens à partir de la semaine prochaine en vue d'accentuer la pression sur la controversée Commission électorale (IEBC).

"En raison de la menace claire, présente et imminente de troubles à l'ordre public, le gouvernement notifie au public que, pour le moment, nous n'autoriserons pas les manifestations dans les centres d'affaires de Nairobi, Mombasa et Kisumu", a déclaré le ministre de l'Intérieur Fred Matiangi.

M. Matiangi a rappelé le droit des Kényans à manifester et faire grève "pacifiquement", mais soutenu que ce droit "n'est pas absolu et ne doit pas transgresser les droits des autres Kényans".

L'opposition a dans la foulée appelé ses partisans à braver cette interdiction. "Nous maintenons nos rassemblements dans le pays comme prévu. La loi est très claire sur les manifestations pacifiques", a déclaré Moses Wetangula, l'un de ses leaders.

- Pillage -

C'est à Kisumu (ouest), un des bastions de l'opposition situé sur les rives du lac Victoria, que les manifestations ont mobilisé le plus de partisans de Raila Odinga - plusieurs milliers -, qui ont érigé des barricades sur les grands axes de la ville, notamment mercredi, au lendemain de l'annonce du retrait de leur favori du scrutin du 26 octobre.

A Nairobi et Kisumu, ces manifestations ont provoqué la fermeture de nombreux commerces et paralysé le centre-ville. A Kisumu, elles se sont parfois terminées par des scènes de pillage, certains manifestants profitant du chaos.

M. Matiangi a assuré que ces manifestations avaient été marquées par "des attaques sur des commissariats de police, des attaques sur des agents de police occasionnant de graves blessures physiques, une grave perturbation des affaires, des attaques contre des civils innocents et le pillage et la destruction de biens".

Il a également dit qu'il était de la responsabilité des organisateurs de s'assurer que les manifestations se déroulent dans le calme et a dès lors annoncé que des poursuites seraient engagées contre le directeur exécutif de la coalition d'opposition Nasa, Norman Magaya.

En août, au moins 37 personnes étaient décédées dans les violences, principalement policières, qui avaient suivi la présidentielle plus tard invalidée.

- Procédure accélérée -

M. Odinga a annoncé mardi son retrait de la présidentielle du 26 octobre, arguant que l'IEBC n'avait pas entrepris sa refonte nécessaire pour organiser une élection crédible, dont l'éviction de certains de ses responsables. L'IEBC assure, elle, que M. Odinga n'a pas encore formalisé son retrait.

L'opposant s'appuie sur un jugement de 2013 de la Cour suprême statuant qu'en cas de retrait d'un candidat, le scrutin doit être annulé et un tout nouveau processus électoral enclenché.

Saisie par l'opposition, la Cour suprême du Kenya avait mis en avant des irrégularités dans la transmission des résultats pour invalider le 1er septembre la réélection de M. Kenyatta face à M. Odinga.

Cette décision, une première en Afrique, avait été saluée pour son courage à travers le monde, mais nombre d'observateurs l'avaient qualifiée d'"opportunité à ne pas gâcher" en vue de renforcer la démocratie kényane.

Depuis, l'opposition a multiplié les ultimatums et le parti au pouvoir a engagé une procédure accélérée - critiquée par les observateurs internationaux et l'opposition - pour modifier la loi électorale.

Dominé par le parti de M. Kenyatta, le Sénat a adopté jeudi ce texte, au lendemain de son approbation par les députés de la majorité présidentielle.

Le texte, que le président Kenyatta avait par avance promis de signer, prévoit notamment que les résultats transmis manuellement prévalent sur ceux transmis électroniquement en cas d'écart entre les deux, une porte ouverte à la fraude électorale selon l'opposition.

L'introduction d'une composante électronique avait été décidée après le fiasco des élections de fin 2007 qui avaient débouché sur les pires violences politico-ethniques (1.100 morts) dans le pays depuis son indépendance en 1963. (AFP)
 
 
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