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Liberté de presse ? Il faut en payer le prix

Vendredi 31 Octobre 2025

Liberté de presse ? Il faut en payer le prix

Le pouvoir sénégalais peut avoir des choses à reprocher à des journalistes sénégalais qui ont éprouvé le besoin d’interviewer l’homme d’affaires sénégalais Madiambal Diagne contre lequel un mandat d’arrêt international a été lancé sous l’égide de la police internationale (Interpol). Une notice rouge qui a trouvé un début d’exécution avec son interpellation par la police française puis sa présentation devant un tribunal de Versailles. 

 

A quel moment donc l’Etat du Sénégal a-t-il pensé que le fait d’aller cueillir deux journalistes Maïmouna Ndour Faye (7 TV) et Babacar Fall (RFM) jusque dans leurs locaux respectifs pouvait être une stratégie payante dans sa quête de régler (une partie de) son compte au fugitif ? Cette double interpellation est une faute. Elle pouvait et devait être évitée parce qu’elle n’honore pas l’idée de rupture promise d’avec les pratiques de l’ancien régime. Elle ne règle nullement - ni dans le fond ni dans la forme - la question et le sort du fugitif. La preuve, tous deux ont été relâchés sans charges connues. 

 

Tous les Etats de la planète savent fabriquer des délits et des infractions là où il n’y en a pas. Si interviewer un fugitif était un délit, cela se saurait. Et dans ce scénario là, tout journaliste ‘’en situation’’ (pour parler comme Jean-Paul Sartre) mettrait en balance les principes d’éthique et déontologiques de son métier dans l’optique de faire le meilleur choix (pour sa conscience et pour son pays). Ainsi, la violence institutionnelle déployée par la police et la gendarmerie dans deux espaces médiatiques différents en l’espace de quelques heures n’aurait jamais eu lieu !  

 

Néanmoins, en présentant l’entrepreneur Madiambal Diagne comme « analyste politique » et en faisant un black-out total sur le mandat d’arrêt international dont il fait l’objet depuis plusieurs semaines, la direction de 7 TV n’a-t-elle pas trahi sa mission d’information à l’endroit du public ? Pouvait-elle oublier que le protagoniste en question a été inculpé pour divers chefs d’accusation gravissimes qu’elle avait obligation de mentionner dans ses annonces publicitaires ? Cette omission ou cet acte de complaisance assumé ne devrait-(elle-il) pas être considéré(e) comme une faute professionnelle ? Peut-on revendiquer le droit d’informer le public sur une question d’intérêt public et national tout en n’étant pas ou peu transparent sur la nature, le contenu et les circonstances dans lesquelles intervient cette initiative ? 

 

Dans tous les cas, une des grandes batailles pour la presse est encore en jachère : assurer l’indépendance éditoriale des médias qui leur appartiennent ou qui leur sont confiés. Pour les professionnels qui vivent du métier et seulement du métier, cela ne saurait être une option. Il faut mettre un terme impératif à la complicité éditoriale avec des politiciens milliardaires ou pauvres, ou mafieux out tordus. La liberté de la presse passe irrémédiablement par la cassure des liens d’amitié, de connivence et de subordination que des membres éminents de la corporation ont décidé de pérenniser avec des affairistes en quête d’influence et de débouchés divers pour leurs business. Il est trop dur d’être à la fois journaliste et politicien ! 

 

Nos confrères Maïmouna Ndour Faye et Babacar Fall n’auraient jamais dû subir ce que policiers et gendarmes leur ont infligé. Non parce qu’ils seraient au-dessus des lois du pays mais parce qu’aucune loi écrite et in-dis-cu-ta-ble aux yeux de tous ne peut leur dénier le choix de donner la parole à un fugitif qui jouit encore de la présomption d’innocence. Le journalisme est un métier très « spécial » - n’en déplaise à ses détracteurs organiques - qui repose en grande partie sur l’éthique et la déontologie. D’où l’urgence que nous refusions les combats par procuration ou par amitié qui nous sont fourgués. 

 

A bon droit, la liberté de presse est revendiquée partout dans le monde car elle reste un pilier majeur des conquêtes démocratiques contemporaines. Elle doit donc être absolument protégée. Au Sénégal, sommes-nous prêts à en payer le vrai prix en sortant des coteries partisanes et connivences qui assurent la dépendance de presse ? 

 

L’ironie de nos histoires quotidiennes, c’est la furie de politiciens opportunistes et sans vergogne qui, aujourd’hui, condamnent allègrement les interpellations de MNF et BF, dénoncent les coupures des signaux de 7TV et TFM. Pourtant, il y a moins de deux ans, ce sont les mêmes qui applaudissaient gaillardement les agressions caractérisées et documentées du régime déchu auquel ils appartenaient au détriment d’autres groupes de presse dans un contexte de répression générale contre les libertés les plus élémentaires !

 
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1.Posté par Me François JURAIN le 11/11/2025 10:52
La liberté de la Presse repose avant tout sur un respect absolu de l'éthique de cette profession. Un journaliste se doit d'informer, d'une manière impartiale, les populations , ce qui devient de plus en plus difficile, pour lesdites populations, de faire le tri entre la vérité et les "fake news". A titre personnel, je ne vois pas d'inconvénient à ce qu'un journaliste défende une cause partisane, à condition d'annoncer la couleur: par exemple, en France, une chaine comme CNEWS est ouvertement de droite extrème, elle le revendique haut et fort, donc, si vous regardez cette chaine, vous savez à quoi vous attendre. C'est clair, net, et précis.

Ici au Sénégal, un organe de presse comme LE QUOTIDIEN est ouvertement défenseur de la pensée de l'APR/Macky SALL, puisqu'il s'agit d' un organe n'ayant été créé, ayant vécu et subsisté que par les financements occultes alloués par Macky SALL. Là aussi, c'est clair, net et précis. Si vous lisez les feuilles de ce journal, vous savez d'avance ce que vous allez y trouver. Faire intervenir, sur une chaine de télévision sénégalaise, une personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, il me semble, mais ça reste à vérifier, que cela est interdit par la loi, voire même par la Constitution: si tel est le cas, ces deux journalistes sont en faute. Mais ces arrestations en direct, sont pour moi ridicules, et ne servent qu'à essayer de masquer la faute inadmissible d'un Ministre de l’Intérieur qui a révélé son incompétence au poste qu'il occupe. Etre un bon avocat (parait-il, je ne le connais pas) ne fait pas forcément de vous un bon homme politique, pouvant revendiquer le droit d'aspirer à un poste des plus stratégique, à savoir celui de Ministre de l'intérieur. Cette incompétence due à une inexpérience totale, nous l'avons connue avec l'ancien Ministre de l'intérieur, DIOME, sous l'ancien régime , force est de constater que les bêtises des uns ne servent jamais de leçons aux autres.

Mais tout cela ne donne pas le droit à des journalistes, fussent-ils performants dans leur métier, d'enfreindre la loi, et de l'entendre, sur une chaine de grande écoute notamment, s'exprimer publiquement sur une affaire en cours. Mais puisque la tentation de parler le démange, ce Monsieur, moi j'aimerais qu'il m'explique, comment, de simple greffier du tribunal, on devient journaliste, patron de Presse, à la tête d'une fortune personnelle assez considérable, en très peu de temps -moins de douze ans- le tout dans le respect de la plus grande honnêteté, comme il le clame haut et fort. Pour moi, vu mon âge, c'est trop tard, mais pour les jeunes qui souhaitent ardemment réussir dans la profession qu'ils ont choisie, ça devrait pouvoir leur servir...Il a encore quelques années pour le faire, car de mon point de vue, il ne sera pas extradé, et que bien évidemment et contrairement à ce qu'il proclamait (encore haut et fort) il devait rentrer "dans quelques jours" pour comparaitre devant les juges, ce qu'il n'a pas (encore) fait et qu'il ne fera évidemment jamais (en tout cas de son plein grè).

Pour rappel, l'expression "dans quelques jours" qui semble plaire aux hommes publics du SENEGAL, car de plus en plus usitée (je fais référence au Premier Ministre, par exemple) c'est six jours. à partir du septième, c'est "quelques semaines", et à partir de quatre semaines, c'est "un mois". Mais comme les gens bien souvent ont la mémoire courte, on s'arrêtera ) à "quelques jours"...

Me François JURAIN

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