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Chronique d’Albert - Dénouer le nœud du dialogue politique exclusif

Samedi 11 Mai 2019

La rencontre entre le Ministre de l’Intérieur,  les acteurs politiques et de la société civile ouvre officiellement le dialogue politique, du moins symboliquement. De là, à  croire que le dialogue est réellement amorcé, certains observateurs ne franchiraient guère imprudemment, ce pas.
 
Des nuages planent encore sur le démarrage et le déroulement effectif du dialogue tant attendu. La posture du chef de l’Etat, les positions divergentes et la dispersion dans les rangs de l’opposition, les termes de références, les conditions de l’organisation du dialogue détermineront, sans nul doute, la feuille de route de ce dialogue national. Il faudra toutefois dénouer le nœud de ce dialogue exclusif. Un président moins partisan, une opposition plus unie et soudée derrière un chef d’orchestre seraient peut-être la clef de la réussite de ce dialogue crispé par les impacts négatifs de la dernière présidentielle de février 2019.
 
C’est généralement, le Président de la République qui définit le cadre global,  l’esprit du dialogue et sa conduite. En raison de l’importance,  de la gravité et de la solennité des enjeux politiques du moment, le chef de l’Etat dirige en personne le dialogue entre sa majorité, son opposition et les acteurs de la société civile. Le Président de la République peut aussi déléguer la conduite du dialogue au gouvernement et/ou au Ministre de l’intérieur et de la sécurité publique. C’est ce dernier scénario qui est à l’œuvre.
 
Le Ministre de l’Intérieur  mis régulièrement au cœur des processus électoraux et des contestations politiques et post-électorale est assez souvent d’ailleurs le maître d’œuvre naturel  du dialogue politique républicain. A quel moment, le président de la République choisira- t-il d’être au- devant de  la scène et  des prochains actes du dialogue ? L’avenir nous édifiera sur la forme  de la présence du chef de l’Etat et le format du dialogue au cours des prochaines semaines.
 
En attendant, les partis politiques évoluant dans l’opposition ne reconnaissent, ni la transparence de l’élection présidentielle de février 2019, ni les résultats officiels proclamés par les institutions compétences en matière électorale. Ce contexte de tensions post- électorales se conjugue au refus du Parti Démocratique Sénégalais de prendre part à la première rencontre du dialogue. En outre, les partisans de l’ancien maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall et les fidèles de la génération du Concret de l’ancien candidat-Président malheureux du Pds, greffent à ce climat tendu,  la libération de l’ancien maire socialiste et le retour d’exil de Karim Meissa Wade au Sénégal.
 
La dimension politique du dialogue a ainsi pris le dessus sur les autres aspects d’intérêt national, notamment, les aspects du dialogue touchant à la situation (économique, sociale et culturelle) du pays et la recherche de solution aux conflits post- électoraux, sans oublier évidemment, les grandes réformes du deuxième mandat et la controverse au sujet de la suppression du poste de Premier Ministre.
 
La posture du Président de la République  dans ce processus du dialogue pourrait être déterminante quant à  l’issue heureuse u dialogue. Un profil présidentiel, moins personnalisé, moins conflictuel, moins attaché aux intérêts de groupes partisans et moins présent physiquement dans les espaces du dialogue, pourrait faciliter le rapprochement des postures du pouvoir et celles de l’opposition. A contrario, si le Président en exercice continue de faire prévaloir sa posture de  chef de l’Etat et chef de la majorité politique, de Ministre de l’intérieur et de la sécurité en mode fast-tract, le dialogue pourrait se crisper et aboutir à des postures divergentes radicales, inconciliables en matière d’organisation des élections futures, de la loi électorale, etc.
 
Le Président de la République est en réalité confronté aux pesanteurs de ces casquettes multiples et ses nombreuses fonctions. Le profil du Président arbitre est quasi devenu impossible à trouver en raison de la posture partisane du chef de l’Etat et du maître du jeu. L’opposition devrait elle aussi prendre conscience de ces difficultés à trouver un consens fort et intelligent  entre ses composantes.
 
L’opposition dialogue avec le pouvoir en ordre dispersé. Dans ces conditions de dispersions, sans une unité de pensée et d’action, il sera difficile de créer un  climat indispensable à des avancées significatives de la démocratie pluraliste et de la gouvernance institutionnelle. C’est là, le nœud du dialogue politique national entre le Président de la République, chef de coalition et son opposition sans chef. Les adversaires du pouvoir ont besoin d’un chef d’orchestre, suffisamment représentatif et capable de fédérer toutes les sensibilités se réclamant de l’opposition. Le dialogue politique exige que le Président de la République, soit moins partisan. Les deux camps doivent engager une rupture significative avec les comportements partisans et exclusivistes.
Mamadou Sy Albert
 
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