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La collusion entre trafic de drogue et fraude fiscale en procès

Lundi 17 Septembre 2018

PARIS (Reuters) - Le tribunal correctionnel de Paris a commencé lundi le procès d'un vaste système de blanchiment d'argent de la drogue et de la fraude fiscale connu sous le nom de code "Virus", qui étendait ses ramifications jusqu'au Maroc et en Suisse.

Une quarantaine de prévenus - trafiquants de drogue, intermédiaires, "banquiers" occultes, financiers véreux, experts en évasion fiscale et leurs clients - comparaîtront jusqu'au 12 octobre dans ce qui est un des plus grand procès du genre.

Parmi eux, quatre frères d'une même famille originaire de Casablanca, Albert, Mardoché, Meyer et Nessim El Maleh, leur soeur Fréha et le mari de cette dernière, au coeur de ce système de blanchiment par l'intermédiaire d'une société de gestion d'avoirs financiers installée à Genève, GPF SA.

La police française a levé ce lièvre début 2012 en enquêtant sur un trafic de stupéfiants en provenance du Maroc, des tonnes de résine de cannabis acheminées par la route via l'Espagne.

C'est en suivant l'argent remis par les trafiquants destinataires de ces cargaisons à des collecteurs de fonds qu'ils ont mis au jour le fonctionnement très perfectionné d'un réseau dont profitaient des "évadés fiscaux".

Parmi eux des entrepreneurs et dirigeants de sociétés, un trader, un concessionnaire automobile, un assureur, un avocat d'affaires parisien et l'ancienne élue écologiste du XIIIe arrondissement de Paris Florence Lamblin.

Comme plusieurs clients de GPF SA, celle-ci a dit avoir hérité d'un compte non déclaré en Suisse. Elle fait partie d'un groupe de 17 personnes qui ont préféré la reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) pour éviter le procès.

RÉSEAU CHINOIS

Une partie du produit en euros du trafic de drogue était achetée contre des dirhams par des hommes d'affaires marocains désireux d'échapper au contrôle des changes dans leur pays ou de minorer leurs importations en payant au noir des commerçants chinois, en particulier dans le secteur du textile. Une troisième catégorie de bénéficiaires était constituée par les clients de la GPF SA, une officine suisse dirigée par la famille El Maleh et plus particulièrement par Meyer El Maleh, lequel avait pris la suite de son beau-père.

Dès l'origine, ses clients étaient des résidents de pays comme la France, l'Espagne, l'Italie, la Grèce, Israël, la Belgique, la Turquie le Canada et les Etats-Unis désireux de fuir le fisc. Selon l'accusation, les avoirs ainsi gérés par GPF SA totalisaient quelque 800 millions de dollars en 2008 et la société comptait parmi ses cadres et conseillers des avocats et collaborateurs de grandes banques suisses - Nessim El Maleh était lui-même un employé de la banque HSBC.

"Notre métier consistait à donner une apparence de légalité à des fonds dont nous connaissions l'origine illégale", a dit aux enquêteurs une employée.

Tous les moyens étaient bons : faux prêts, fausses factures, ouverture de comptes, remise d'espèces, investissements, faux contrats, sociétés écran, contrats de change et conversion de devises, constitution de sociétés "offshore" administrées par des gérants de paille dans des paradis fiscaux.

Des documents saisis au cours de l'enquête ont permis de recenser plus de 350 de ces "trusts", créés essentiellement au Panama avec l'aide d'un cabinet d'avocats déjà mis en cause dans les "Panama Papers", Mossack & Fonseca.

Mais selon la même employée, également sur le banc des accusés, Meyer El Maleh a transformé cette "honorable officine suisse de fructification et dissimulation de fraude fiscale" en une multinationale du blanchiment de l'argent de la drogue.

Les clients de GPF SA désireux de sortir leur argent de Suisse pouvaient récupérer en France, par l'intermédiaire de Mardoché El Maleh, des liquidités en euros issues du trafic de cannabis, contre un virement de leur compte helvétique vers un compte étranger géré par un banquier occulte des trafiquants.

Il leur en coûtait 10 à 15% de la somme ainsi récupérée en commission et frais de change, selon l'accusation.

La majorité des personnes mises en cause nient avoir eu connaissance de l'origine des fonds.

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