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Toubon dénonce le recul des services publics en France

Mercredi 11 Avril 2018

PARIS (Reuters) - Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a fustigé mercredi une politique migratoire française qui constitue un "déni de réalité" et un recul croissant des services publics lié à leur dématérialisation et à des contraintes budgétaires.

L'institution lancée en 2011 a vu l'an dernier son activité augmenter de 7%, en traitant 93.000 réclamations de personnes estimant leurs droits bafoués, requêtes qui ont donné lieu dans 75% des cas à des règlements à l'amiable, selon son rapport annuel publié mercredi.

L'accès aux services publics, aux soins, au logement, les discriminations au travail selon le genre ou l'origine, le harcèlement sexuel mais aussi les conditions de détention et les droits des étrangers font partie des problématiques pointées du doigt dans ce bilan.

En matière de service public, Jacques Toubon appelle le gouvernement à introduire dans la loi une clause de protection des usagers vulnérables ou précaires pour lesquels la dématérialisation des démarches administratives lancée au niveau national constitue, dit-il, une voie de relégation.

"Le développement du numérique a contribué à remanier d'autant plus profondément ces rapports qu'il donne parfois l'impression d'avoir été mis en place 'à marche forcée'", note le texte. Parmi les réclamations liées aux services publics, 49% ont porté sur la protection et la sécurité sociale ; une personne sur cinq dit en outre éprouver des difficultés pour accomplir des démarches administratives courantes.

"La complexification croît avec l'accumulation des politiques de simplification", a estimé Jacques Toubon lors de la présentation du texte, qui évoque des situations parfois kafkaïennes, notamment en matière de délai de traitement et de demandes répétées de justificatifs.
 
"DÉNI DE RÉALITÉ"

Interrogé sur le projet de loi asile et immigration débattu la semaine prochaine en séance plénière à l'Assemblée après son passage en commission la semaine dernière, le Défenseur des Droits a décrit un texte "globalement très proche de l'original", tout en notant des aménagements sur l'usage de la visioconférence dans les audiences des demandeurs d'asile.

Les députés ont amendé l'allongement de la rétention en le portant à 90 jours (contre 45 actuellement) et non à 135 jours comme initialement prévu.

Jacques Toubon, auteur de plusieurs condamnations du texte jugé attentatoire au droit des étrangers, a déploré mercredi plus largement l'esprit de la politique de la France en matière d'immigration.

"La politique migratoire de la France, des flux migratoires, a pour effet de créer une sorte de conflit, un drame, une situation traumatique entre les migrants (...) ce mouvement irrépressible dont il faut que nous tenions compte (et qui a commencé il y a 200 ans avec des migrants d'Europe) et d'autre part des politiques qui pour des raisons diverses sont des politiques de contention, de fermeture".

"C'est nier la réalité du monde et, de mon point de vue, bafouer des droits qui sont universels", a-t-il ajouté.

Le rapport dénonce en outre "une culture de retard" dans la prise en compte du handicap, notamment en matière d'éducation, de connaissance statistique et d'adaptation des politiques publiques aux personnes autistes (cible depuis d'une stratégie nationale dévoilée la semaine dernière par Edouard Philippe).

Il rappelle en outre les conclusions d'une enquête de 2017 sur les relations entre la police et la population française, qui fait état d'une probabilité 20 fois plus élevée de contrôles de police pour les jeunes hommes noirs et arabes/maghrébins.

Le syndicat Alternative Police a dénoncé dans un communiqué "une nouvelle salve stigmatisante du travail des policiers" et appelé à la création de statistiques "objectives".
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