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Les syndicats de magistrats incrédules ou consternés par le « soutien » de Belloubet

Mardi 18 Février 2020

Nicole Belloubet, la ministre de la Justice
Nicole Belloubet, la ministre de la Justice
Incrédulité et consternation: les syndicats de magistrats ont sèchement réagi mardi au message de « soutien » adressé la veille par la ministre de la Justice à l’ensemble des magistrats et greffiers de France dans le contexte de la grève des avocats.
 
Nicole Belloubet a déploré le mouvement de grève des avocats contre la réforme de leur régime autonome, relevant qu’il « porte atteinte au fonctionnement de l’institution judiciaire », dans un message que l’AFP a pu consulter.
 
« Lorsque la sérénité sera revenue, nous aurons à surmonter cette épreuve et à renouer les liens avec les avocats, qui sont indispensables à l’oeuvre de justice », affirme la garde des Sceaux en adressant, « avec chaleur », aux magistrats et fonctionnaires tout son « soutien », sa « reconnaissance » et son « indéfectible confiance ».
 
« En quoi la ministre nous soutient-elle? Il n’y a aucune prise en compte de ce que l’on vit au quotidien, elle ne répond à aucune des questions soulevées par les réformes. Elle dit nous soutenir... les mots ne coûtent pas cher », a déclaré à l’AFP Céline Parisot, présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire).
 
Du côté du Syndicat de la magistrature (SM, gauche), c’est la « consternation »: « S’en prendre ainsi aux avocats alors que l’état de délabrement des juridictions n’est pas nouveau et connu de tous, et que la part de responsabilité de ce gouvernement dans cet état des lieux est énorme, nous est particulièrement insupportable ».
 
Le SM dénonce dans un communiqué « une tentative désespérée de diviser, en feignant la compassion pour des professionnels que les réformes du gouvernement contribuent jour après jour à épuiser ».
 
Tous soulignent « le dévouement exceptionnel » des personnels pour mener à bien leur mission dans des juridictions à bout de souffle, mais ils renvoient le gouvernement à sa « responsabilité » dans l’épuisement général, au rythme de réformes imposées au pas de course.
 
« Quant à votre soutien et votre +indéfectible confiance+, ils ne nous sont pas apparus flagrants lorsque nous avons apporté notre avis de praticiens sur la réforme de la justice ou encore sur celle de l’ordonnance du 2 février 1945 (sur la justice des mineurs, ndlr), sans que jamais vous n’en teniez compte », a répondu le SM dans un courrier à la ministre.
 
Le courrier de Nicole Belloubet a également fait réagir la présidente du Conseil national des barreaux (CNB), qui représente les 70.000 avocats de France: « Inutile de tenter de diviser magistrats/greffiers/avocats: ils subissent ensemble l’insuffisance des moyens de la justice et y font face ensemble ».
 
Les robes noires sont entrées dans la septième semaine d’une grève dure et inédite contre la réforme des retraites qui va voir doubler les cotisations des avocats gagnant moins de 40.000 euros par an. Le mouvement (défense massive, renvois, manifestations...) a conduit au renvoi de milliers d’audiences et à l’engorgement des tribunaux, où les stocks d’affaires en souffrance ne cessent d’augmenter.
 
« Les +moyens de procédure+ qui créent "des perturbations judiciaires", cela s’appelle la loi. Reprocher à des avocats d’appliquer la loi pose une sérieuse difficulté », a tweeté Christiane Féral-Schuhl, la présidente du CNB.
 
Les avocats ont accepté vendredi dernier de reprendre les discussions techniques avec le ministère après la promesse de suppression de l’article 45 de la loi sur l’Accélération et la simplification de l’action publique (ASAP): cet article permettait aux assureurs d’interférer entre l’avocat et son client lorsque celui-ci bénéficie d’un contrat de protection juridique.
 
Toutefois, Chancellerie et CNB n’ont pas encore fait part d’avancées. Et la plupart des barreaux ont voté la reconduction du mouvement jusqu’à début mars. (AFP)
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