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Le gouvernement promet de "muscler" la lutte contre la fraude fiscale

Mercredi 28 Mars 2018

Bercy, le siège de l'économie française
Bercy, le siège de l'économie française
"Mieux détecter la fraude" et "mieux la sanctionner": le gouvernement a dévoilé mercredi son projet de loi anti-fraude, qui étend notamment la possibilité de rendre public le nom des fraudeurs, afin de lutter plus efficacement contre l'évasion fiscale.

Le texte de loi, présenté comme la contrepartie de la loi sur le droit à l'erreur actuellement en discussion au Parlement, vise à "doter l'administration de nouveaux outils" pour rendre la lutte contre la fraude "plus efficace".

"Nous souhaitons bien distinguer les gens de bonne foi des véritables fraudeurs", a précisé à l'AFP l'entourage du ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, qui porte ce texte. "C'est pour ces derniers que nous serons plus durs", ajoute-t-on.

Ces dernières années, plusieurs mesures ont déjà été adoptées pour rendre la traque des fraudeurs plus efficiente, à l'image de la loi sur la lutte contre la fraude fiscale, votée en 2013 dans le sillage de l'affaire Cahuzac.

Mais les scandales successifs révélés par la presse, des Panama papers aux Swissleaks en passant par l'affaire d'évasion fiscale présumée touchant le groupe de luxe Kering et sa marque Gucci, ont montré qu'il existait encore des failles.

"Nous savons que nous pouvons faire mieux, nous pouvons frapper plus fort, nous pouvons dissuader ceux qui veulent s'engager dans ce chemin", a reconnu fin janvier Edouard Philippe, disant vouloir "durcir les mesures nationales et internationales".

- Dossiers complexes -

Le projet de loi prévoit pour cela un renforcement des sanctions pour les "officines" et "intermédiaires" accusés de favoriser l'évasion. Ces derniers pourront se voir infliger des pénalités administratives allant de 10.000 euros à 50% des honoraires perçus.

Il comprend également la création d'un service d'enquête spécialisé au sein de Bercy, qui pourra être saisi par le parquet national financier (PNF) pour les affaires nécessitant une expertise fiscale pointue.

"Aujourd'hui, on bute sur des capacités d'enquête", souligne l'entourage de M. Darmanin, qui précise que 260 affaires sont aujourd'hui en attente d'un traitement judiciaire. "Cela permettra à la justice d'avancer", notamment "sur les dossiers complexes", ajoute-t-on.

Le texte, qui sera débattu au parlement avant l'été, prévoit également de rendre la publication du nom du fraudeur obligatoire en cas de condamnation pénale -- sauf décision expresse du juge -- et possible pour certaines fraudes sanctionnées par l'administration.

Il entérine enfin le développement du "datamining", ou exploration de données, pour détecter les dossiers à risques, et crée une procédure de plaider coupable pour les fraudeurs poursuivis au pénal et disposés à reconnaître leurs torts.

- "Verrou de Bercy" -

Rien n'est en revanche prévu à ce stade sur le fameux "verrou de Bercy", expression utilisées pour désigner le monopole accordé, dans le droit français, à l'administration fiscale pour engager des poursuites pénales en cas de fraude.

"Ca ne vaut pas dire qu'on n'en parlera pas au parlement", par le biais d'amendements, précise toutefois l'entourage de Gérald Darmanin, qui rappelle qu'une mission d'information parlementaire travaille actuellement sur le sujet.

Interrogé le 15 mars sur France 2, M. Darmanin s'était dit hostile à la levée de ce dispositif, accusé par ses détracteurs de favoriser l'opacité mais défendu par Bercy au nom de l'"efficacité". Le ministre a néanmoins ouvert la porte à des "améliorations".

Une proposition jugée insuffisante par l'ONG Oxfam, qui a appelé mercredi à "mettre un terme à cette exception française". "Le renforcement des sanctions et la création d'une police fiscale resteront dérisoires tant que sera maintenu le +verrou de Bercy+", a insisté l'ONG.

"Cette loi ne nous prémunira en rien contre de nouveaux scandales", a estimé de son côté le porte-parole d'Attac, Raphaël Pradeau, pour qui "le principal problème" tient à "l'optimisation fiscale agressive et légale des multinationales".

Ce sujet fait l'objet depuis plusieurs années de difficiles tractations au niveau européen, les Etats membres de l'UE peinant à s'entendre en raison de l'opposition des pays à faible fiscalité, comme l'Irlande ou le Luxembourg, à une plus grande harmonisation. (AFP)
 
 
 
 
 
 
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