Les indicateurs du renforcement des relations militaires entre l'Algérie et les États-Unis se multiplient, notamment à travers les visites rapprochées du général Michael Langley, commandant du Commandement militaire américain pour l'Afrique (AFRICOM), en Algérie. Cette dynamique a culminé la semaine dernière par la signature d'un mémorandum d'entente entre les ministères de la Défense des deux pays.
Cette activité intense a été saluée de manière continue par des responsables militaires et civils des deux pays, qui l'ont qualifiée de "dynamique positive" dans la coopération militaire, ce qui reflète la volonté des deux parties d'aller de l'avant pour développer ce partenariat.
La sécurité et la stabilité des régions d'Afrique du Nord et du Sahel africain sont au cœur des discussions bilatérales entre les armées algérienne et américaine, ce qui a attiré l'attention des observateurs régionaux et internationaux sur les implications de ce développement.
Ce rapprochement entre l'Algérie et les États-Unis suscite également de vives interrogations quant à la capacité du pays à concilier ses relations stratégiques avec l'Est et l'Ouest, particulièrement au regard de son alliance militaire historique avec l'ex-Union soviétique et de ses liens actuels avec la Russie.
Signes et indicateurs du renforcement des relations
Depuis les attentats du 11 septembre 2001, les relations sécuritaires entre l'Algérie et les États-Unis se sont considérablement renforcées, avec la mise en place d'un dialogue stratégique périodique sur la lutte contre le terrorisme. Washington considère l'Algérie comme un acteur international majeur dans la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme.
Les signes du développement de la coopération militaire sont visibles dans la participation d'une unité d'élite des forces navales algériennes aux manœuvres maritimes communes "Express Phoenix" organisées par AFRICOM l'été dernier en Tunisie pendant plusieurs jours.
Les indicateurs du renforcement des relations militaires ont également augmenté suite aux visites rapprochées du général Langley en Algérie, qui s'y est rendu cinq fois depuis 2020, dont deux visites récentes en juillet 2024 et janvier 2025.
Mémorandum d’entente stratégique
Lors de sa dernière visite, le chef d'état-major de l'armée algérienne, le général de corps d'armée Saïd Chengriha, et le général Langley ont signé un mémorandum d'entente dans le domaine militaire entre les ministères de la Défense des deux pays.
Bien que les détails de la mémorandum n'aient pas été divulgués, les deux parties l'ont qualifié de "pierre angulaire pour atteindre tous les objectifs de sécurité communs".
Lors de sa rencontre avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune, le général Langley a déclaré : "Ce mémorandum permettra de construire et de renforcer encore davantage la relation profonde entre nos deux pays. Nous allons ainsi renforcer la sécurité et la paix au niveau régional et international."
Il a ajouté : "L'Algérie est un pays leader dans la région, et toutes les autres nations en bénéficieront. Les États-Unis et l'Algérie prospéreront ensemble et contribueront collectivement à la protection des peuples."
Le 28 janvier dernier, le ministre des Affaires étrangères algérien, Ahmed Attaf, et son homologue américain, Marco Rubio, ont exprimé, lors d'un entretien téléphonique, leurs "félicitations pour la dynamique positive" qui caractérise les relations algéro-américaines.
Les deux ministres ont convenu de renforcer leurs efforts pour consolider la coopération bilatérale dans les domaines de la défense, de l'énergie, de l'agriculture, des sciences et de la technologie.
Recherche d’un allié africain
Concernant la nature de la relation croissante entre les deux pays, l'expert militaire algérien Akram Kharif estime qu'elle est "bonne, mais n'a pas encore atteint le niveau d'excellence".
Il a indiqué à l'Agence Anadolu que l'activité intense entre l'Algérie et Washington dans le domaine de la défense "témoigne de l'existence d'un cadre pour la négociation, les discussions et la coordination entre les armées des deux pays".
Concernant les perspectives futures du mémorandum d'entente, l'expert a précisé que "la présence militaire américaine en Afrique est en déclin, et cela pourrait s'accélérer encore davantage sous la présidence de Donald Trump". Il a ajouté : "L'armée américaine devra donc compter sur les grandes armées africaines, y compris l'armée algérienne."
Nouveaux arrangements régionaux
Le professeur en relations internationales, Ali Rabej, a noté que la visite du commandant d'AFRICOM en Algérie et la signature du mémorandum d'entente sont intervenues deux jours après l'investiture de Donald Trump en tant que président des États-Unis, dans un contexte de développements internationaux complexes et de nouveaux arrangements sécuritaires dans la région du Sahel après le retrait des troupes françaises.
Rabej a expliqué à l'Agence Anadolu que "l'Algérie est l'un des plus grands pays de la région, portant des responsabilités sécuritaires et stratégiques majeures dans la lutte contre les organisations terroristes et l'expansion de leurs activités, et dans l'empêchement de la région de tomber sous leur contrôle."
Il a ajouté que "les États-Unis et l'Algérie sont parmi les pays les plus engagés dans la paix, la sécurité et la lutte contre le terrorisme, ce qui fait de la signature du mémorandum d'entente un moyen de réaliser des objectifs communs."
Pragmatisme et rationalité
Malgré son alliance historique et stratégique avec Moscou dans les domaines de l'armement, de la formation et de la coopération militaire, l'Algérie est restée ouverte à la coopération avec les États-Unis, notamment à travers l'achat d'équipements militaires et la mise en œuvre de programmes de formation.
Après la signature du mémorandum d'entente, le chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, a salué la "dynamique positive" de la coopération militaire entre les deux pays, ainsi que "la volonté bilatérale de porter ce partenariat au plus haut niveau pour servir les intérêts des deux pays".
Chengriha a déclaré : "Nous saluons ce qui distingue les relations de coopération militaire algéro-américaines, basées sur la rationalité, le pragmatisme et le dialogue constructif visant à établir un partenariat durable."
Concernant la gestion de l'équilibre stratégique des relations de l'Algérie dans le contexte de la polarisation entre l'Est et l'Ouest, la Chine et la Russie d'un côté, et les États-Unis de l'autre, Rabej a souligné que l'Algérie "tente toujours de maintenir une position équidistante vis-à-vis de tous, malgré la relation stratégique qu'elle entretient avec la Russie et l'ex-Union soviétique".
Il a ajouté que "le contenu du mémorandum d'entente n'ayant pas été rendu public, il est difficile de savoir s'il s'agit d'une approche globale de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, ou si ce mémorandum vise simplement à approfondir la coopération bilatérale sans chercher à concurrencer d'autres alliés''. [AA]