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Frappe aérienne meurtrière en Afghanistan: la CEDH examine la responsabilité de l’Allemagne

Mercredi 26 Février 2020

La formation suprême de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) s’est penchée mercredi sur la responsabilité de l’Allemagne dans une frappe aérienne meurtrière en 2009 en Afghanistan, une affaire qui avait entraîné la démission du ministre allemand de la Défense.
 
Saisie par un Afghan, Abdul Hanan, qui a perdu ses fils de 8 et 12 ans dans cette frappe, la CEDH avait confié cette affaire en août à sa formation suprême dont les arrêts sont définitifs.
 
Selon la Cour, la décision dans cette affaire, qualifiée par la chambre des députés allemands d’« un des plus graves incidents impliquant l’armée allemande depuis la Seconde Guerre mondiale », pourrait intervenir d’ici environ un an.
 
Menée par deux appareils américains le 4 septembre 2009, la frappe avait été ordonnée par un officier allemand, le colonel Georg Klein, sur Kunduz (nord de l’Afghanistan) après le vol par les talibans de deux camions-citernes remplis d’essence.
 
Elle avait fait 91 morts et 11 blessés parmi lesquels un nombre indéterminé de civils, selon le ministère allemand de la Défense. Toutefois, selon la CEDH, le nombre total des victimes n’a jamais été établi avec certitude, les différents rapports faisant état de 14 à 142 personnes tuées, essentiellement des civils.
 
Après cette frappe, Berlin avait tenté de minimiser l’affaire devenue très vite politique avant d’entraîner la démission du ministre de la Défense de l’époque, Franz Josef Jung, du chef d’état-major et d’un secrétaire d’Etat à la Défense.
 
M. Hanan, qui soutient que ces faits se sont déroulés sous la juridiction de l’Allemagne, reproche aux autorités de ce pays des carences dans l’enquête et de ne pas lui avoir offert de recours effectif après le classement sans suite de l’affaire, en avril 2010.
 
Les débats se sont concentrés mercredi sur la responsabilité légale de Berlin dans cette frappe, alors que le pays participait à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) créée en vertu d’un mandat de l’Onu et dirigée par l’Otan.
 
En ouverture de l’audience, Almut Wittling-Vogel, chargée des droits humains au sein du gouvernement allemand, a adressé « les regrets les plus sincères du gouvernement pour les souffrance profondes » du père de famille.
 
Toutefois, « la région de Kunduz ne relevait pas de la juridiction de l’Allemagne au sens de l’article 1 de la Convention » européenne des droits de l’Homme, car la frappe a été menée au nom des Nations Unies, dans une région sur laquelle Berlin ne disposait pas d’un « contrôle effectif », a plaidé l’avocate de l’Allemagne, Heike Krieger.
 
Quant à l’enquête en Afghanistan, « la police militaire allemande ne pouvait y jouer qu’un rôle mineur: elle ne pouvait que mener des enquêtes internes, pas convoquer des témoins afghans », la FIAS ne lui conférant pas ce pouvoir, a souligné l’avocate.
 
Les autorités allemandes ont apporté une « réponse exhaustive » à cet épisode, pour lequel des procédures liées à l’indemnisation des victimes sont toujours en cours, a-t-elle affirmé.
 
A l’inverse, un des avocats de M. Hanan, Dapo Akande, a pointé la « série d’ordres contraignants » donnés par le colonel ayant mené à cette frappe.
 
Le colonel Georg Klein n’a pas été suspendu après la frappe et a même été promu général par la suite, a-t-il déploré, assurant que la population de cette zone restait « traumatisée ». (AFP)
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