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Chronique sociale: Ndéké Jom ak Ngor raaful ci mime rééw (le «puits» de la Dignité et de l’Honneur n’a pas complètement tari dans ce pays)

Mardi 3 Avril 2018

Chronique sociale: Ndéké Jom ak Ngor raaful ci mime rééw (le «puits»  de la Dignité et de l’Honneur n’a pas complètement tari dans ce pays)
Par Madi Waké Touré (ENTSS)
 
La société sénégalaise confrontée à de multiples défis, peine à faire dans le sursaut rédempteur. L’unanimité est faite aujourd’hui sur ce constat : notre société est malade ! Ce phénomène n’a pas échappé à l’œil vigilant et perspicace de l’excellent sociologue, Abdoulaye Sokhna Diop (ASD): 
 
« Aussi bien le pays que ses hommes donnent l’image pitoyable d’une sorte de mal insidieux qui, tel un cancer épidermique, ronge graduellement, mais inexorablement, le tissu social qui, au plan de la moralité, se rapetisse et tend à s’anéantir, avec la disparition des vertus dont il semble ne rester maintenant que des souvenirs que l’on évoque avec tristesse et amertume» in Ethiopiques : Les valeurs traditionnelles sénégalaises et le problème de leur intégration dans les systèmes modernes d’éducation.
 
Ceci dit, la clarification des concepts clés s’impose pour une meilleure lisibilité de ce qui va suivre. Le  Professeur Assane Sylla assimile le Jom au sens de l’honneur. « C’est d’ailleurs dés l’enfance que l’homme wolof est amené à prendre conscience de sa propre dignité, par une éducation qui développe en lui le sens de l’honneur (le jom) - Les wolofs disent bien : « Nit bu ca jom jogee dara desatu ca = si un homme perd son sens de l’honneur, il ne lui reste plus rien » in Revue Sénégalaise de Philosophie : Actes duColloque Droit- Morale et Société. Quant au professeur Abdou Sylla, il estime que : « le Jom recouvre des sens divers ; c’est à la fois la responsabilité, le sens de l’honneur et de la dignité, le sens du devoir « warugal »… »
 
Toutes ces définitions montrent à souhait qu’il y a une réelle parenté entre les deux concepts Jom et Ngor. On a du mal à les démêler tellement ils sont proches l’un de l’autre.
 
Ces valeurs constructives et estimables fondaient la grandeur de nos sociétés d’antan. L’écrivain Ousmane Socé Diop, dans son ouvrage Karim, y revient en des termes poignants : « C’est un héritage que vous recevez de vos valeureux ancêtres qui, dans les batailles, lorsque l’ennemi était plus fort, emplissaient leur large pantalon de sable et restaient attachés au sol afin de ne pas fuir, si agonisants ils perdaient le contrôle de leurs actes. »
 
Ces mots assez forts renseignent sur l’attachement de nos ancêtres aux valeurs d’honneur et de dignité. Qu’en est-il de nos jours ? La réponse se trouve dans les faits et gestes que nous observons tous et qui révulsent au plus haut point. Les « ma waxon, waxéet » (c’est moi qui l’avais dit mais… ! Vous avez tous compris !) sont frais dans les mémoires. De telles postures à certains niveaux de responsabilité finissent par déteindre sur les comportements et attitudes des populations.
 
Ecoutons encore à ce sujet notre brillant et émérite sociologue, ASD : « Si présentement les Sénégalais ont, malgré eux, si négativement changé, tant dans leur mentalité que dans leur conduite et leurs comportements, c’est que depuis l’avènement de la souveraineté nationale, les modèles qui se sont offerts à eux ont été négatifs en particulier au plan de la morale et des vertus morales. » Vérités Eternelles: chapeau Professeur ! Mais face à cette grisaille terrible qui enveloppe et les cœurs et les esprits, l’espoir est t-il  permis? Je réponds oui !
 
Pour la première fois au Sénégal, un jeune magistrat de 43 ans de la haute hiérarchie judiciaire démissionne. Son nom, IBRAHIMA HAMIDOU DEME ! Un nom qui sera, à Jamais,  gravé  sur les marbres de l’histoire. Et la toile qui constitue un véritable baromètre ne s’y est pas trompée. Elle s’est enflammée avec des propos qui en disent long sur le ras-le-bol des Sénégalais face à toutes les dérives qui s’observent sous nos yeux.
 
Tout compte fait, l’horizon n’est donc pas complètement bouché. C’est le sentiment de l’universitaire Pape Baïdaly Sow: « La démission du magistrat Dème et avant lui le cas Sonko seraient-ils des éclaircis dans un ciel plutôt sombre ? On serait tenté de dire oui si on rapporte leur attitude et comportement  respectifs au fameux slogan "la patrie avant la carrière’’, slogan où se reconnaitraient d'ailleurs les anciens étudiants soixante huitards.
 
Dans l'esprit de l'époque et celui d'aujourd'hui sans doute, on voyait dans le carriérisme un aveuglement coupable, une forme d'égoïsme voire une trahison de la patrie, de la "cause du peuple" dans la mesure où cela prédispose l'individu à des  compromis coupables,  des complicités honteuses....»
 
La conclusion, je l’emprunte à un internaute du nom de Bassamba Camara: « Le juge Ibrahima Dème est un de ces valeureux  hommes d'honneur qui ne courent pas les rues au Sénégal. Le juge Ibrahima Dème est un grand patriote digne et vertueux qui vient d’inscrire son nom en lettres d'or au panthéon des modèles et références qui font la fierté de notre pays. Monsieur Dème, je vous tire mon chapeau.»
 
PS : merci à mon ami d’enfance, Mamadou BA, brillant Professeur à l’université Cheikh Anta Diop qui a bien voulu me faire parvenir quelques passages du texte de l’écrivain Ousmane Socé Diop.
 
 
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