Connectez-vous

Médiature: Me Alioune Badara Cissé indéboulonnable jusqu’en 2021…selon la loi

Samedi 5 Mai 2018

Nommé par décret en août 2015 et titulaire d’un mandat protégé de six ans, le médiateur de la république semble bien parti pour rester en place en dépité de la posture critique qu’il développe contre le pouvoir sur des dossiers chauds.


Les responsables de l’alliance pour la république (APR) ont-ils tenu compte des dispositions légales qui organisent le fonctionnement de la Médiature ainsi que le mandat du Médiateur ? La question s’impose après lecture du communiqué du Secrétariat exécutif national du parti présidentiel exclusivement consacré aux «sorties récurrentes de Me Alioune Badara Cissé contre les institutions de notre pays.» Agacé par un «positionnement politique militant incompatible avec son statut», le Sen de l’Apr «demande au président de la république d’en tirer toutes les conséquences et de mettre un terme à cette confusion des rôles.» En clair, il exige de Macky Sall qu’il démette Alioune Badara Cissé de ses fonctions de Médiateur de la république. (https://www.impact.sn/La-mise-en-garde-de-Macky-Sall-a-Alioune-Badara-Cisse_a8771.html)
 
Mais l’affaire ne semble pas si aisée que les membres du Sen l’appréhendent, même s’il est improbable qu’ils ne soient pas au courant des choses en ce qui concerne les attributions du médiateur. Autant il a été aisé de limoger Nafi Ngom Keïta de la présidence de l’Ofnac, autant il faudra publiquement passer sur la loi pour écarter Me Cissé.
 
En effet, selon l’article 5 de la loi n°99-04 du 29 janvier 1999 qui a institué un médiateur au Sénégal, «le Médiateur de la république est nommé par décret pour une période de six (6) ans non renouvelable. Il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l’expiration de ce délai, qu’en cas d’empêchement constaté par un collège présidé par le président du conseil constitutionnel et comprenant en outre, le président du conseil d’Etat et le premier président de la cour de cassation, saisi à cet effet par le président de la république.» A rappeler que le conseil d’Etat n’existe plus, ses prérogatives ayant été transférées à la Cour suprême.
 
Du reste, la fonction est protégée des foucades de l’autorité politique comme l’indique l’article 6 de la même loi. «Le médiateur de la république ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions qu’il émet ou des actes qu’il accomplit pour l’exercice de sa mission
 
Les «sorties récurrentes» de Me Alioune Badara Cissé, dénoncées par ses amis de l’alliance, obéissent pourtant à la loi. Désigné comme «autorité indépendante» par l’article 1er de ladite loi, le médiateur de la république, «dans l’exercice de ses fonctions, ne reçoit d’instruction d’aucune autorité
 
C’est dans cet esprit que l’article 9 stipule: «s’il l’estime utile, le médiateur de la république peut également entreprendre, de sa propre initiative toute démarche entrant dans le cadre de sa mission. Il en tient le président de la république informé.» C’est en partant de cette disposition que Me Cissé s’est invité dans la crise scolaire récente, d’une manière qui n’a pas plu au camp présidentiel.
 
Limoger Alioune Badara Cissé ne sera donc pas une entreprise facile. Nommé par un décret en date du 5 août 2015, le premier ministre des Affaires étrangères de Macky Sall et membre fondateur de l’Apr peut en principe rester en place jusqu’en…2021. A moins que, jugeant cette échéance longue et insupportable, le pouvoir n’entreprenne de modifier les textes dans le sens de «tuer» l’indépendance du médiateur en le soumettant totalement aux ordres du chef de l’Etat. Une perspective bien possible au vu du rapport dominant que l'exécutif entretient avec la loi depuis 2012...
 
Nombre de lectures : 368 fois

Nouveau commentaire :












Inscription à la newsletter