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France - Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti reconnu "non coupable" et relaxé par la CJR

Mercredi 29 Novembre 2023

Le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, relaxé par la Cour de justice de la République.
Le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, relaxé par la Cour de justice de la République.

Le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, jugé pour prise illégale d'intérêts, a été déclaré "non coupable" et relaxé mercredi à Paris par la Cour de Justice de la République (CJR), une décision qui éclaircit son horizon politique.

 

Les juges de la CJR, en majorité des parlementaires, n'ont pas suivi les réquisitions de l'accusation qui avait réclamé un an de prison avec sursis à la fin de ce procès inédit d'un ministre de la Justice en exercice.

 

"C'est ce que l'on espérait, c'est ce que le droit dictait. C'est évidemment une satisfaction, une émotion énorme (...). La Cour de justice de la République a jugé que le ministre de la Justice était innocent", a réagi devant la presse Me Jacqueline Laffont, l'une des avocats d'Eric Dupond-Moretti.

 

La cour a considéré dans ses motivations que "l'élément matériel" de la prise illégale d'intérêts était bien constitué mais pas l'élément intentionnel.

 

"A aucun moment", le ministre "n'avait exprimé (...) une animosité, un mépris ou un désir de vengeance" envers les quatre magistrats qu'il avait critiqués quand il était avocat, et contre lesquels il avait ouvert une enquête administrative en tant que garde des Sceaux, a déclaré le président de la CJR Dominique Pauthe, qui avait appelé le ministre à la barre avant de commencer à lire les motivations de la décision. La cour a également estimé qu'il n'avait pas été "averti" du conflit d'intérêts.

 

Pendant la lecture de la décision qui a duré moins d'une demi-heure, M. Dupond-Moretti, en costume sombre, est resté droit devant le pupitre, les bras croisés derrière le dos.

 

Le garde des Sceaux, resté en poste pendant ses 10 jours de procès mais qui n'avait pas manqué une audience, était arrivé au palais de Justice un peu avant 15H00.

 

La décision de la CJR était déjà actée depuis plus d'une semaine, même si elle avait été tenue secrète: les juges s'étaient réunis dans la foulée du procès, le 16 novembre, pour délibérer. Ils s'étaient aussi retrouvés mercredi matin avant l'audience pour valider la rédaction.

 

L'accusation avait requis un an de prison avec sursis, disant sa "conviction" qu'Eric Dupond-Moretti s'était bien rendu coupable de prise illégale d'intérêts en ouvrant, en tant que ministre, des enquêtes administratives visant quatre magistrats qu'il avait critiqués quand il était avocat, déclenchant une plainte inédite des syndicats de la magistrature.

 

Le ministre n'est "coupable de rien", avait répondu sa défense en plaidant la relaxe. Mais une condamnation, même "la plus basse", même "la plus ridicule", "suffirait" à entraîner sa "démission", avaient soutenu ses avocats.

 

Selon son entourage, M. Dupond-Moretti était "serein" avant la décision, et satisfait de s'être "expliqué" au cours du procès, "pour la première fois" depuis le début de ses ennuis judiciaires quelques mois après sa nomination surprise à l'été 2020.

 

- "Comme les autres" -

 

Après ce procès inédit - c'est la première fois qu'un ministre de la Justice en exercice est jugé -, Eric Dupond-Moretti avait renfilé le costume de ministre comme si de rien n'était, enchaînant réunions et déplacements.

 

L'Elysée n'a rien laissé filtrer sur ses intentions en cas de condamnation de l'ex-avocat star, maintenu en poste malgré la mise en examen et le renvoi en procès.

 

La Première ministre, Elisabeth Borne, avait écarté en octobre la possibilité que M. Dupond-Moretti reste au gouvernement en cas de condamnation, évoquant une "règle claire" déjà "appliquée", en référence au ministre Alain Griset qui avait démissionné en 2021 après sa condamnation.

 

Mardi après-midi, pour sa dernière séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale avant la décision de la CJR, Eric Dupond-Moretti n'a en tout cas pas choisi de se faire discret. En réponse à une question d'une députée du Rassemblement national, il s'est lancé dans une violente charge contre l'"indécente démagogie" du parti qu'il a appelé à "chasser de ses rangs" les "identitaires, nazillons, racistes et antisémites".

 

Furieux, les députés RN ont quitté l'hémicycle et Marine Le Pen a annoncé "une plainte" contre le ministre.

 

Au cours de son procès, M. Dupond-Moretti s'était montré égal à lui-même, ne laissant rien passer et faisant subir aux témoins à charge un fond sonore de grommellements, de soupirs exaspérés et d'exclamations indignées. "Pardon, je suis un peu bouillonnant", s'était excusé auprès de la cour l'ex-ténor du barreau, 62 ans aujourd'hui.

 

Devant la CJR, il n'a cessé de jurer avoir laissé loin "derrière lui" ses vieux différends avec les magistrats, n'ayant plus qu'un unique but, "réussir son ministère". Le reste, avait-il martelé: "Je m'en fous". [AFP]

 
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