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Chronique d’Albert : Les secrets du discours subversif de Sonko

Dimanche 9 Juin 2019

Le candidat-Président du Pastef, Ousmane Sonko  dérange et ébranle même fortement le pouvoir étatique et des pans entiers de la mouvance présidentielle.
 
Les réactions musclées des responsables de l’Alliance Pour la République et de la coalition Benno Bokk Yaakaar aux propos de Sonko, avant et après la présidentielle de février 2019, se suivent et attestent un malaise récurrent. Il est même profond. Le pouvoir républicain ne supporte, ni la tonalité du discours offensif, ni les prises de positions sans équivoque sur les questions d’intérêt national.
 
Insolence. Arrogance. Inexpérience. Les réactions des responsables politiques de l’Alliance Pour la République et  de la coalition soutenant le Président de la République, Macky Sall au discours de Sonko, sont toutes ou presque centrées sur le caractère supposé à tort ou à raison, discourtoisdu discours du responsable moral du Pastef et son manque d’expérience en matière de gouvernance des affaires publiques.
 
Au-delà de cette forme primaire que revêtent les réactions dans les rangs du pouvoir, force est de reconnaître que l’ancien candidat- Président à la dernière présidentielle a fini par se transformer en celui qui dérange à chacune de ses sorties publiquele pouvoir étatique et la majorité politique. La mouvance présidentielle ne supporte pas simplement la tonalité d’un discours guerrier, offensif à plus d’un titre.
 
Il  consiste à dénoncer ouvertement  les faits et gestes des gouvernants dans des domaines précis. Ousmane Sonko est concret dans sa dénonciation. Il met le doigt, là où cela fait mal, avec ses mots et sa  manière  franche et sincère de dire.
 
Ousmane Sonko a réussi singulièrement à provoquer la réaction systématique du régime à l’occasion de toutes ses sorties publiques. Le secret de cette prouesse réside probablement dans la nature de l’homme, son tempérament et la tonalité de son discours tranchant, sans équivoque.
 
Il a un discours quasi spontané. Il ne cherche pas à plaire son auditoire ou ses adversaires. Il crache la vérité toute nue, sans chercher des arguments conventionnels du débat public classique civilisé. Cette liberté de la tonalité est notoire quand Ousmane Sonko parle de la mal gouvernance et des tares  du pouvoir. Elle est de rigueur, quand il parle à ses collègues de l’opposition et à son peuple. Il a un franc-parler constant. Ce qui laisse penser que le discours de Sonko vient du cœur. Il n’obéit pas à des calculs politiciens et à des intérêts personnels à défendre ou à préserver.
 
Au-delà de cette dimension humaine importante dans la production et l’énoncé du discours d’un homme politique qui inscrit son action dans la lutte contre le système et les héritages néo- coloniaux, il faudra relever la délicatesse des sujets que l’ancien candidat-Président traite.
 
Dès la création de sa formation politique, Ousmane Sonko, a choisi le changement radical de régime, la lutte contre la mauvaise gouvernance politique et économique et la souveraineté  du Sénégal. C’est ce choix stratégique qui explique, éclaire et nourrit les dénonciations systématiques  de la mauvaise gestion des finances publiques, les détournements des deniers publics et la lutte contre l’abandon de la souveraineté politique et économique.
 
C’est tout le sens des batailles du Pastef au nom de l’idéal panafricaniste, de la souveraineté de son pays et du continent africain. Tous ces sujets touchent naturellement de près l’exercice du pouvoir étatique et la personnalité du chef  du pouvoir. Ces sujets traités par un adversaire radical  ne peuvent ne pas affecter directement le Président de la République, ses proches et ses alliés. C’est de l’ordre normal de tout son discours subversif.
 
On comprend aisément entre les lignes des réactions des responsables politiques de la majorité politique une volonté inavouée de protection du chef de l’Etat et de son pouvoir. Toutes ces réactions  tentent de  défendre  en réalité le Président de la République, son régime et sa préservation. Le pouvoir  se défend,  le responsable du Pastef démolit le système. Ces deux pôles ne vont point se faire des cadeaux.
 
 C’est un jeu de massacre démocratique de l’adversaire. Cet exercice républicain  n’exclut point l’usage des attentes frontales, le discours virulent et acerbe avec des tonalités variant en fonction de la personnalité de l’acteur politique. L’essentiel dans le débat politique par essence contradictoire, est le respect de la liberté du discours et de la tonalité de  l’autre et  ses convictions politiques.
Mamadou Sy Albert
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