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CHRONIQUE D’ALBERT : Le cycle infernal de l’opposition contre-productive

Vendredi 27 Septembre 2019

CHRONIQUE D’ALBERT : Le cycle infernal de l’opposition contre-productive
Le Président de la République en exercice, Macky Sall a sa manière de gouverner son opposition. Durant le premier mandat présidentiel, le maître du jeu a mis une stratégie consistant à garder l’initiative politique sur toutes les questions majeures. La réforme de la Constitution, la loi sur le parrainage, la mise à l’écart des candidats-présidents à la présidentielle de février 2019 susceptibles d’être portés par les socialistes et les libéraux, constituent des indicateurs du mode républicain de gouvernance de l’opposition.
 
Le deuxième mandat présidentiel dessine les contours d’un nouveau schéma de gouvernance républicaine. Le report des élections locales, des législatives, le musèlement du Pds et de «Taxaw Senegaal» se combinent à un régime musclé des libertés publiques et privées plus restrictif et à un dialogue national porteur de "l’enterrement" des ambitions politiques de franges importantes des adversaires de la mouvance présidentielle.
 
L’initiative politique est un facteur déterminant à la réussite ou à l’échec d’une stratégie de préservation ou de prise du pouvoir politique. Le président de la République en exercice, depuis mars 2012, semble bien conscient de l’importance de garder l’initiative dans la gouvernance des affaires publiques. L’initiative serait, d’une certaine façon, la marque de pouvoir du président de la République, Macky Sall. Sept ans après le premier mandat présidentiel, on peut jeter un regard rétrospectif sur la manière de conduire du chef de l’État en gardant l’initiative.
 
Dès son accession au pouvoir suprême, le président de l’Alliance pour la République a décliné son ambition de gouverner ensemble avec sa majorité du Benno bokk yakaar et sa volonté de mener le dialogue politique avec son opposition. Cet état d’esprit vaudra au nouveau maître du jeu un état de grâce relativement prolongé par le mouvement social et politique. Durant presque les trois à quatre premières années de son exercice du pouvoir, le Président Macky Sall aura eu le temps de mûrir les réformes de l’État, singulièrement la réforme de la Constitution, de mener la réflexion sur sa stratégie de gouvernance économique et sociale, et de mener les réformes de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de nombreux secteurs socio-professionnels et économiques.
 
Il gardera ainsi l’initiative politique. Il passera naturellement à sa réforme de la loi fondamentale, à la loi électorale, à l’organisation de toutes les élections prévues par le calendrier républicain, revu et corrigé à sa manière et à sa guise. Le référendum, les résultats des élections successives, seront sanctionnés par la victoire du camp présidentiel. À aucun moment de ce premier mandat présidentiel, les acteurs de l’opposition n’ont pu engager une initiative significative pour au moins contraindre le pouvoir à revoir sa stratégie électorale ou imposer des négociations. La seule fausse note de la majorité présidentielle aura été probablement les Locales de mars 2014, avec la sanction de la mouvance du président de la République dans les grandes villes sénégalaises et les centres urbains.
 
Au cœur de l’initiative politique présidentielle, il y a eu bien évidemment ce plan de démobilisation politique et de harcèlement des militants et responsables du Parti démocratique sénégalais et le processus de l’emprisonnement du maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall. La victoire de la présidentielle de févier 2019 est la conséquence de cette initiative politique permanente et de la stratégie de musèlement des candidats-présidents des libéraux et des dissidents du Parti socialiste.
 
Le deuxième mandat présidentiel se déroule presque dans un contexte quasi identique à celui du premier. Le président de la République réélu est en train de préparer sereinement son agenda au cours des cinq prochaines années. Il a l’initiative du dialogue national et du dialogue politique. Il garde le contrôle de l’issue des affaires des candidats-présidents des libéraux et des socialistes. L’un est en exil. L’autre reste en prison. Le président de la République est aujourd’hui le seul acteur politique capable de prendre la décision de sortie de crise entre sa mouvance et les camps des libéraux et des dissidents socialistes.
 
Dans ce contexte dominé par l’hégémonie de l’initiative présidentielle, on comprend aisément les enjeux des reports des élections locales, des législatives et les Conclusions du dialogue national et politique. Le président de la République cherche à gagner un temps précieux sur son opposition perdue par les effets collatéraux de la présidentielle de 2019, et l’absence d’une initiative commune des adversaires du régime après la déroute électorale.
 
Le président de la République déroulera sa feuille de route et son agenda quand il le souhaitera. L’opposition est ainsi désarmée politiquement en raison du fait qu’elle subit malgré elle, le jeu du président de la République et de sa majorité. Elle se dirige, dans le meilleur des cas, vers son éclatement à l’issue du dialogue politique. Une partie se résoudra à maintenir le fil du dialogue politique et acceptera le déroulement de l’agenda des républicains. Cette opposition moins radicale fera naturellement le jeu du pouvoir. L’opposition radicale aura une marge de manœuvre trop faible pour modifier le rapport de force entre un président de la République maître du jeu politique et institutionnel, et des adversaires pris dans le piège de la majorité mécanique et de l’opposition contre- productive.
Mamadou SY Albert
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