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Allemagne : Sans soldats US, la «Petite Amérique» bavaroise n’est rien

Vendredi 1 Janvier 2021

Allemagne : Sans soldats US, la «Petite Amérique» bavaroise n’est rien
L’annonce cet été d’un retrait de soldats américains avait fait l’effet d’une bombe. Mais depuis l’élection de Joe Biden, l’espoir renaît à Grafenwöhr, petite ville bavaroise qui a lié son destin à la plus importante base militaire des Etats-Unis en Europe.
 
«Sans les soldats américains, Grafenwöhr n’est rien», affirme tout de go Piri Bradshaw, dont les parents tiennent l’Irish Pub du centre de cette «Petite Amérique».
 
Depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, il y a 75 ans, ils font vivre une ville qui s’est adaptée à leurs besoins. Comme sur la rue longeant la base, où s’alignent «Barber shops» et studios de tatouage.
 
Chez le concessionnaire BMW du coin, les soldats ont droit à un «Militär Rabatt».
«Imaginez, nous avons 7 supermarchés, beaucoup trop pour une ville de 6.500 habitants!", s’exclame Mme Bradshaw, jeune femme aux cheveux roux.
 
Il faut bien nourrir les quelque 40.000 soldats et leurs familles qui vivent dans la région, à l’intérieur de la base et aux alentours.
 
- «Graves conséquences» -
 
Dans le centre, quelques vieilles bâtisses témoignent d’un lointain passé de village rural bavarois.
 
Mais les bruits de tirs, similaires à des coups de tonnerre, ramènent le visiteur rapidement dans le présent.
 
«Nous sommes habitués et ne les entendons presque plus», assure Birgit Plössner, responsable culturel du musée militaire, rappelant qu’un camp d’entraînement avait été créé ici dès 1908.
 
Les Américains s’y sont installés après la défaite du IIIe Reich. Mais depuis la fin de la Guerre froide, leur présence a diminué. Dans toute l’Allemagne, elle est passée de quelque 200.000 soldats en 1990 à 34.500 aujourd’hui.
 
Si la ville est consciente de la menace depuis des années, l’annonce -cette fois chiffrée- de l’administration de Donald Trump d’un redéploiement de 12.000 soldats hors du pays, dont quelque 5.000 de Grafenwöhr et de la commune voisine de Vilseck, avait causé un choc.
 
Une simple réduction des troupes aurait de «graves conséquences» économiques, estime le maire conservateur Edgar Knobloch.
 
«La base offre un emploi à plus de 3.000 civils de la région», dit-il à l’AFP. Les militaires dépensent en outre environ 660 millions d’euros en salaires, loyers et consommation privée par an.
 
Depuis l’élection en novembre du démocrate Joe Biden, le projet est suspendu dans l’attente d’une nouvelle expertise du Pentagone, un grand «soulagement» pour la ville. «Nous ne sommes pas au bout de nos peines, mais je suis persuadé que la décision sera en notre faveur», veut croire M. Knobloch.
 
Il y va selon lui aussi de l’intérêt des Américains, qui ont lourdement investi ces dernières années pour moderniser la base, d’où les soldats sont envoyés en mission en Irak ou Afgahnistan. Les armées de pays membres de l’OTAN s’y entraînent aussi régulièrement.
 
- Trois générations et le «King»
 
Il n’y a pas que l’aspect économique. «Trois générations de soldats américains se sont succédés ici, parfois même de pères en fils», explique Birgit Plössner.
 
Le plus célèbre d’entre eux: Elvis Presley, qui a effectué l’essentiel de son service militaire en Allemagne. A l’occasion d’un séjour à Grafenwöhr, il avait même donné un concert privé dans un bar, le seul en Europe de toute sa carrière. Le musée a recréé la scène avec piano original et un «King» grandeur nature en plastique.
 
Leur présence imprègne la vie culturelle et sociale. «On célèbre ensemble le jour de l’indépendance des Etats-Unis comme le MaiBaum», dit-elle, en référence à la fête du mât de Mai, une tradition celtique très répandue en Bavière.
 
«Ici, il y a une réelle entente entre les peuples», renchérit le maire. Des militaires reviennent même s’y installer après leur carrière.
 
Comme Raymond Tavarez Gascot. Un an après sa retraite de l’armée américaine, l’ancien parachutiste originaire de Puerto Rico a posé ses bagages à Grafenwöhr en 2007, où il s’est marié et a pu réalisé son rêve de monter un garage.
 
«Je suis tombé amoureux de ce pays, de sa culture», raconte cet homme dynamique de 45 ans, même s’il avoue peiner encore avec la langue de Goethe.
 
«Bien sûr mon pays, le soleil, la plage, me manquent», avoue-t-il. «Mais ici, la qualité de la vie est tout simplement incomparable». (AFP)
 
 
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