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Merkel pâtit en Europe de sa fragilisation en Allemagne

Mardi 20 Septembre 2016

BERLIN (Reuters) - Il est difficile d'imaginer ce qu'Angela Merkel aurait pu faire de plus, ces dernières semaines, pour inciter ses partenaires européens à trouver un consensus après la décision de la Grande-Bretagne de quitter l'Union européenne.

Avant le sommet de l'UE qui s'est tenu à 27 à Bratislava vendredi dernier, la chancelière allemande a eu des entretiens avec 24 de ses 26 homologues. Elle s'est rendue à Varsovie, à Tallinn, à Prague, à Paris et sur l'île italienne de Ventotene pour y voir François Hollande et le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi.
 
Au bout du compte, ces consultations n'ont pas débouché sur grand-chose. Bratislava a été un flop. François Hollande et l'hôte du sommet, le Premier ministre slovaque Robert Fico, ont eu beau jeu d'estimer que les conclusions du sommet, la "feuille de route de Bratislava", marquaient une avancée, Matteo Renzi et son homologue hongrois Viktor Orban ont très vite critiqué ce document.
 
"J'ignore à quoi Merkel fait référence quand elle parle de 'l'esprit de Bratislava'", a dit Matteo Renzi durant le week-end. "Si les choses continuent comme ça, au lieu de l'esprit de Bratislava, nous parlerons du fantôme de l'Europe."
 
Depuis près de dix ans, Angela Merkel tend à fixer le cap au sein de l'UE. La réponse des Européens à la crise de l'euro a été élaborée à Berlin, tout comme l'accord de Minsk sur le conflit séparatiste de l'est de l'Ukraine, et encore l'accord de mars dernier entre l'UE et la Turquie pour endiguer l'afflux de migrants vers l'Europe.

Mais le sommet de Bratislava a montré que les déboires que connaît la chancelière sur le plan intérieur, illustrés par les résultats des élections régionales dans le Mecklembourg-Poméranie occidentale et à Berlin, entamaient son influence à l'étranger.
 
CHANCES DE RÉÉLECTION ÉLEVÉES
"Avec les retombées de la crise des réfugiés, Merkel réalise qu'elle n'a pas tant d'amis que ça en Europe. Or, elle a besoin d'amis et d'alliés dans beaucoup de dossiers", déclare un ex-haut responsable européen qui a coopéré étroitement avec la chancelière durant la crise de l'euro.
Ce responsable, qui s'est exprimé sous le sceau de l'anonymat, a dit ne pas voir de solution de remplacement à Merkel au sein de la CDU, mais aussi plus largement en Allemagne et en Europe. Pour autant, estime-t-il, la résistance à laquelle va se heurter le "leadership" de l'Allemagne ne fera que grandir.
 
Angela Merkel incarne à la fois l'austérité et l'ouverture des frontières aux migrants, deux sujets délicats qu'exploitent à leur profit les formations populistes dans l'UE, et qui, déplorent certains responsables en Europe, ont sans doute poussé le Royaume-Uni vers le Brexit.
 
En dépit de ces déconvenues, les chances de réélection de la chancelière restent élevées. Lors d'une conférence de presse, lundi, au cours de laquelle elle a endossé la responsabilité des défaites aux régionales, elle n'a pas voulu dire si elle briguerait un nouveau mandat lors des législatives de septembre 2017.

Si elle reste en lice et l'emporte l'an prochain, elle n'en restera pas moins affaiblie, tant sur le plan intérieur que sur le plan européen, ce qui risque d'avoir des retombées sur une série de dossiers européens.
 
LA QUESTION DES SANCTIONS CONTRE MOSCOU
D'ores et déjà, Berlin est sur la défensive sur le plan économique, ayant dû, par exemple, d'accepter que l'UE fasse preuve de mansuétude vis-à-vis des écarts de l'Espagne et du Portugal aux règles encadrant le déficit budgétaire.

Angela Merkel a également renoncé à convaincre ses partenaires européens d'accepter des quotas de migrants, faisant des concessions en la matière à Bratislava, malgré lesquelles Viktor Orban a cru bon de juger "autodestructrices et naïves" les positions de la chancelière.
 
La question des sanctions imposées par l'UE à la Russie concernant l'Ukraine pourrait bien être la prochaine épreuve qui mette à mal l'influence de l'Allemagne.
Malgré le ballet diplomatique effectué par le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, les autorités allemandes reconnaissent en privé qu'elles doivent envisager des solutions alternatives à l'accord de Minsk, auquel la levée des sanctions est liée.

Matteo Renzi et Viktor Orban, qui ont contesté la chancelière à Bratislava, comptent parmi les plus sceptiques envers les sanctions économiques et financières imposées à Moscou en 2014 du fait de l'annexion de la Crimée et du soutien des Russes aux rebelles séparatistes de l'est de l'Ukraine.
 
L'autre test de taille pour Angela Merkel sera la mise en oeuvre du Brexit. Sa préférence, depuis le référendum du 23 juin, va vers un accord avec Londres qui maintienne les Britanniques le plus liés possible à l'UE. Elle doit faire face là à une France qui ne semble pas vouloir d'un Brexit le plus indolore possible pour le Royaume-Uni.
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