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Maroc-Espagne - A Melilla, il ne s’est rien passé malgré plusieurs dizaines de migrants tués

Lundi 27 Juin 2022

 
La loi du silence couvre majestueusement le carnage infligé à plusieurs centaines de jeunes africains désireux de passer du Maroc à l’Europe en franchissant l’enclave espagnole de Melilla. Les images de corps empilés les uns sur les autres, les uns sans vie, les autres à peine capables de bouger un doigt, sont insoutenables. Les forces de sécurité marocaines se défoulent à coups de bâtons, sans retenue et sans distinction, sur les formes humaines étalées dans cet entrepôt-mouroir. La violence qu’elles exercent sur ces gens morts et sans défense est sans injustifiable.
 
Soixante douze heures après ce drame africain, c’est toujours le silence total et honteux chez les plus hautes autorités continentales. Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine, s’est envolé depuis samedi pour l’Allemagne afin d’assister au Sommet du G7 occidental, après avoir pris part à une réunion en ligne des BRICS sur invitation du président chinois Xi Jinping. Pas un mot de sa part sur la tragédie de Melilla !
 
Il faudrait peut-être s’interroger sur ce mutisme de la plus haute institution politique africaine. Le pays responsable du bilan meurtrier de Melilla est le Royaume du Maroc dont l’influence est très forte sur beaucoup de dirigeants africains. Le chef de l’Etat sénégalais en fait partie.
 
Aux yeux de la diplomatie sénégalaise, il est impensable que les relations d’Etat entre Dakar et Rabat soient parasitées par un quelconque dossier, fût-il relatif à la mort violente de dizaines de jeunes africains dont, parait-il, des ressortissants sénégalais. A ce titre, sur la balance du « pour » et du « contre », le souci politique du président Macky Sall de ne pas fâcher ou irriter le Roi Mohamed 6 est plus déterminant que l’expression d’un Tweet de compassion humaine à l’endroit de ces desperados dont la plupart sont, d’abord, des victimes de l’incurie ambiante qui caractérise la gouvernance et les politiques publiques en vigueur dans leur pays respectif.
 
Le Maroc peut également compter sur la prise de position du gouvernement espagnol qui a rejeté la responsabilité du drame sur des « mafias » qui se livreraient à une traite des êtres humains. Or, beaucoup plus près du théâtre du carnage, le président-maire de l’enclave de Melilla a dénoncé une « réponse disproportionnée » du Maroc dans sa tentative d’endiguement de l’assaut des migrants sur le mur qui sépare les deux royaumes.
 
Le soutien du gouvernement central de Pedro Sanchez à son voisin du sud n’est ni gratuit ni désintéressé. L’Espagne a sacrifié sa neutralité dans le conflit entre Rabat et le Polisario en approuvant le plan marocain d’autonomie pour le Sahara occidental. Une décision qui a poussé l’Algérie, alliée des indépendantistes sahraouis, à fermer le Gazoduc Maghreb Europe qui alimentait l’Espagne avec le passage du gaz algérien sur le territoire chérifien.
 
Au Maroc, des partis politiques, organisations de droits humains et ONG de soutien aux migrants réclament une « enquête indépendante » pour faire la lumière sur les circonstances de cette tragédie. Cet appel fait écho aux « vives inquiétudes » exprimées par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut commissariat des Nations-Unies aux réfugiés (HCR).
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