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L'ex-président Bolsonaro jugé au Brésil, son avenir politique menacé

Jeudi 22 Juin 2023

Menacé d'inéligibilité, il pourrait se voir barrer l'accès de la prochaine élection en 2026: le procès très attendu de l'ancien chef de l'Etat brésilien d'extrême droite Jair Bolsonaro s'est ouvert jeudi, six mois après son départ du palais présidentiel.
 
Alors que son avenir politique était entre les mains des sept juges réunis dans l'enceinte solennelle du Tribunal électoral supérieur (TSE) à Brasilia, M. Bolsonaro a débarqué à Porto Alegre. Dans cette grande ville du Sud, plusieurs dizaines de partisans - certains habilés aux couleurs vert et jaune du drapeau national, érigé en signe de ralliement - l'ont acclamé à son arrivée à l'aéroport avant une réunion prévue avec son Parti libéral, a constaté l'AFP.
 
L'ancien chef de l'Etat (2019-2022), qui se dit innocent, est poursuivi pour s'en être pris à la justice électorale et avoir critiqué, sans preuve, la fiabilité du vote électronique, quelques mois avant les élections remportées par son rival de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.
 
Selon l'acte d'accusation lu à l'ouverture de la séance du TSE par le juge Benedito Goncalves, il est reproché à l'ex-président d'avoir cherché à "décrédibiliser devant la communauté internationale le futur résultat des élections, à un moment où les sondages donnaient l'avantage à un adversaire".
 
Dans un discours en juillet 2022 à la résidence présidentielle de l'Alvorada, et retransmis sur la télévision publique, M. Bolsonaro avait déclaré devant des diplomates vouloir "corriger des failles" dans le vote électronique avec la "participation des forces armées", sans fournir la moindre preuve de ses allégations.
 
Pour ces propos, l'ex-capitaine de l'armée de 68 ans pourrait être déclaré "inéligible" à des mandats publics pendant huit ans. Il est poursuivi pour "abus de pouvoir politique et usage indu des moyens de communication".
 
Durant toute sa campagne, il avait agité le risque de fraude, attisant la colère de ses partisans les plus radicaux qui, le 8 janvier, quelques jours seulement après l'entrée en fonction de Lula, avaient attaqué les sièges des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire à Brasilia. Des scènes saisissantes qui avaient rappelé l'assaut mené, deux ans auparavant, par des partisans de l'ancien président américain Donald Trump sur le Capitole à Washington.
 
- "Civilisation" et "barbarie" -
 
Dans sa plaidoirie, l'avocat de l'ancien président, Tarcisio Vieira, s'est permis un parallèle avec l'affaire Dreyfus, le retentissant scandale de la fin du XIXe siècle français, appelant à éviter une "erreur judiciaire" du même genre. 
 
"Ce n'est pas le procès du bolsonarisme. Il n'y a pas à arbitrer une imaginaire dispute sanglante entre la civilisation et la barbarie", a-t-il lancé.
 
Après seulement trois heures de séance, le procès a été renvoyé au mardi 27 juin. Les juges devront alors commencer à voter l'un après l'autre. Les délibérations pourront au besoin se poursuivre le 29, voire au-delà. En cas de condamnation, la défense a prévenu qu'elle déposerait "bien sûr" un recours devant la Cour suprême.
 
Très discret depuis son retour au Brésil fin mars après un séjour de trois mois aux Etats-Unis commencé avant même l'investiture de son tombeur, M. Bolsonaro s'est démultiplié à l'approche du procès.
 
"Il n'y a eu aucune critique, ni attaque contre le système électoral", a-t-il soutenu mercredi devant la presse. Sur CNN Brésil, il a demandé aux juges de rendre un "jugement juste".
 
Mercredi, M. Bolsonaro a dit "ne pas savoir" s'il serait de nouveau candidat à des responsabilités publiques, relevant que pour cela il lui faudrait "conserver" ses droits politiques.
 
"Nous n'allons pas paniquer face à l'issue qui viendra (...). Nous voulons rester vivants, en apportant notre contribution au pays", a-t-il dit dimanche.
 
Il avait perdu avec seulement 1,8% d'écart au second tour face à Lula. Les partis de droite et d'extrême droite sont encore plus forts au Parlement qu'ils ne l'étaient sous son mandat, posant un défi de taille au président de gauche, de retour après deux mandats (2003-2010).
 
Si le gouvernement Lula se tient à distance des affaires du leader d'extrême droite, ce dernier n'est pas au bout de ses tourments judiciaires. Il fait face à une quinzaine de procédures devant le tribunal électoral.
 
Il est aussi ciblé par la Cour suprême dans cinq affaires, notamment pour les attaques du 8 janvier, et encourt des peines de prison.
 
Depuis son retour des Etats-Unis, il a été entendu par la police à trois reprises: pour les violences à Brasilia, pour une affaire de bijoux offerts par l'Arabie saoudite, dont certains seraient entrés de manière irrégulière au Brésil, et pour falsification présumée de certificats de vaccination anti-Covid.
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