Connectez-vous

Chronique présidentielle : La campagne électorale perd la face de la souveraineté politique et économique

Mercredi 13 Février 2019

Chronique présidentielle : La campagne électorale perd la face de la  souveraineté politique et économique
Le Sénégal a connu deux alternances politiques en mars 2000 et mars 2012.  Elles ont été toutes les deux nourries et portées par des leaders se réclamant du libéralisme social et la poursuite de l’œuvre de la quête ou de la conquête de la souveraineté politique et économique. Les politiques publiques nourries par ces deux changements de régime ont été inscrites fondamentalement dans la logique de l’ouverture plus prononcée du pays au marché international et au commerce, d’une part, et à une gouvernance axée sur la Performance, l’Efficacité et l’Economique des moyens financiers de l’Etat central et des collectivités locales, d’autre part.
 
Les résultats de la première alternance sont connus des électeurs sénégalais. Elle été sanctionnée politiquement par les électeurs. Les résultats de la seconde sont au centre de la campagne. Le Président-candidat sortant se défend, alors que ses adversaires mettent le doigt sur les manquements, les maladresses et les incompétences notoires du régime. La campagne est entre la poursuite, la troisième alternance et l’alternative.
 
La souveraineté politique et économique du pays aura été sans nul doute  au centre de l’exercice du pouvoir étatique par les libéraux et leurs alliés de la gauche révolutionnaire traditionnelle, de la société civile et des acteurs du développement du secteur privé ou informel. Les critiques des acteurs politiques contre le poids économique surdimensionné sont régulières et constantes.
 
Elles ciblent naturellement des groupés privés internationaux et français et l’influence de la France dans les orientations économiques du Sénégal, du système éducatif, de l’Enseignement supérieur et dans la diplomatie sénégalaise. Ces critiques systémiques témoignent  de la permanence du débat national  à propos de la dépendance du Sénégal vis-à-vis de l’ancienne puissance colonisatrice, des pays européens et de la gouvernance mondialisée par des normes de gouvernance et de gestion définies et contrôlées par les organisations de la finance internationale.
 
Après deux alternances, la souveraineté politique et économique refait de nouveau surface dans la campagne présidentielle de 2019. Les candidats-Présidents, se réclamant de l’opposition évoquent cette question majeure. Certains des candidats-Présidents  invitent à une alternance. D’autres sont des partisans de l’alternative.
 
Dans le premier cas de figure, les candidats affichent une volonté de vouloir revisiter et de revoir profondément ou non les termes des relations entre le Sénégal et ses partenaires en général, et singulièrement, les partenaires français (public et privé). La révision des Accords de coopération, des Codes minier, pétrolier et du gaz se combine à un souci de vouloir procéder à un rééquilibrage plus éthique et plus juste des relations politiques, économiques, culturels, militaires du Sénégal.
 
Dans le second cas de figure, certains candidats-Présidents aspirent à une rupture définitive avec la domination politique et économique sous toutes ses formes. Une troisième posture réaffirme sa volonté de vouloir poursuivre l’œuvre de la continuité des deux alternances de mars 2000 et 2012. Ces candidats ont ainsi une approche de la souveraineté politique et économique inscrite dans la préservation du statu quo et des héritages de l’Etat-post, notamment, l’économie extravertie et l’inter dépendance.
 
Ces approches contradictoires, voire conflictuelles de la souveraineté économique démontrent suffisamment  la complexité de la question de la souveraineté dans un contexte rythmé par une double dépendance du Sénégal à la France et au système économique et politique de plus en plus mondialisé. Cette complexité de la souveraineté semble expliquer et justifier  pourquoi les termes du débat public sont nuancés, escamotés ou imprécis. Aucune option des trois cas d’espèce de candidats-Présidents ne met en relief l’aspiration à une indépendance totale de la souveraineté politique et économique.
 
La France est un mal nécessaire pour certains candidats. Un cancer pour les autres. La lecture faite de la mondialisation des politiques obéit à ce type d’analyse. La mondialisation est néfaste. Elle offre des opportunités. Dans ces conditions jalonnées par des postures ambiguës, les candidats-Présidents souffrent en réalité de vision stratégique de la souveraineté politique et économique capable de porter un Sénégal réellement indépendant et assumant pleinement ses responsabilités.
 
Ils souffrent aussi d’une approche politique capable de prendre en charge les préoccupations profondes des travailleurs, des opérateurs privés nationaux et des acteurs de l’informel ou de la société solidaire et communautaire. L’alternance a apparemment touché ses limites politiques en matière de perspectives alternatives au système mondialisé et à l’influence de la France et des intérêts privés occidentaux. L’alternative, elle, n’a pas encore trouvé la réponse aux effets négatifs de l’influence de la France et de la mondialisation sur la marche du Sénégal depuis son indépendance en 1960.
Mamadou Sy Albert
Nombre de lectures : 83 fois












Inscription à la newsletter