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« Sauvetage de Sonko par les FDS » – De vraies questions sur les « milices » ayant acquis droit de vie dans la République ?

Mardi 21 Février 2023

L'opposant Ousmane Sonko dans son véhicule aux vitres brisées, peu avant d'être conduit manu militari chez lui par des policiers, le 16 février 2023 sur la Corniche ouest à Dakar
L'opposant Ousmane Sonko dans son véhicule aux vitres brisées, peu avant d'être conduit manu militari chez lui par des policiers, le 16 février 2023 sur la Corniche ouest à Dakar
 
« Les policiers m’ont mis dans leur fourgon blindé pour qu’on ne me tire pas dessus. (…) Il y avait des milices de Macky Sall armés de grenades lacrymogènes et de fusils que les policiers n’osaient pas interpeller. »
 
S’ils sont avérés, ces propos attribués à Ousmane Sonko sont d’une extrême gravité et interpellent directement la plus haute autorité de l’Etat et de la République, ainsi que ses collaborateurs en charge de la sécurité publique. Ils aggravent les incertitudes et menaces qui promettent au pays un basculement dans l’anarchie au cours de cette année préélectorale qui a déjà si mal commencé et qui s’annonce très longue.
 
L’extraction musclée et spectaculaire le 16 février 2023 du président du parti Pastef-Les patriotes de son véhicule par des éléments sécuritaires de la police et/ou de la gendarmerie au retour de son procès ajournée a été considérée comme un acte attentatoire aux libertés des citoyens, notamment celles d’aller et de venir aux quatre coins du territoire national. D’où l’indignation collective, nationale et internationale, qui a accompagné la diffusion virale des scènes violentes contre un opposant politique sans défense et sans gade rapprochée.
 
Si les policiers dont il est question ont effectivement – et malgré eux - perpétré un acte d’autorité contre Ousmane Sonko pour le sauver « des milices de Macky Sall », il faudrait peut-être d’une certaine manière que les citoyens épris de justice et soucieux d’un exercice pacifique du jeu démocratique au Sénégal leur en rendent grâce. Ces policiers et/gendarmes savaient alors ce que beaucoup ignoraient ! Mais du coup, le vrai débat se situe ailleurs, sauf à vouloir se cantonner dans l’hypocrisie partisane.
 
Si ces « milices privées » ont menacé la vie d’Ousmane Sonko et suscitent maintenant la crainte des forces de sécurité régaliennes, nous sommes alors plus que jamais en danger dans la République. De fait, les vraies questions à poser émergent de cette nouvelle donne posée sur la table par l’opposant politique numéro 1 à Macky Sall. Et elles sont de taille.
 
Qui parraine « ces milices privées » avec une couverture politique telle que policiers et gendarmes d’élites n’osent « les interpeller » dans l’espace public ? A quelles autorités obéissent-elles et à quelles autres rendent-elles compte ? Quelles sont leurs missions lorsqu’elles sont déployées sur le parcours d’un opposant en conflit ouvert avec les plus hautes autorités de l’Etat et de la République ? Qui les commande sur le terrain, des civils ou des militaires ? D’où viennent les armes dont elles disposeraient pour accomplir « leurs missions » ?
 
« Armes venues de Russie ? »
 
En parlant d’armes, il n’a échappé à personne que la représentation du parti Pastef aux Etats-Unis a dévoilé sur les réseaux sociaux un document faisant état d’une livraison d’armes venues de Russie à l’adresse « Palais Présidentiel de la République du Sénégal » en date de septembre 2022. Depuis quand une présidence d’une République comme le Sénégal serait-elle devenue importatrice d’armes et de munitions, mission régalienne substantiellement dédiée aux institutions militaires ?
 
Ceci rappelle au passage qu’une ligne rouge avait déjà été franchie. Le scandale de l’achat d’armes à hauteur de 45 milliards de francs CFA par les ministères de l’Environnement et des Finances, révélé par les investigations journalistiques de OCCRP en octobre 2022, n’a toujours pas été explicité par le gouvernement sénégalais. Son porte-parole, le ministre du Commerce Abdou Karim Fofana, n’a jusqu’ici pas  présenté le décret brandi pour justifier l’acquisition d’une quantité d’armes et de munitions aussi importante par une institution autre que l’armée et la gendarmerie.

Affaire déjà classée !
 
Lors des événements meurtriers de mars 2021 (restés jusqu’ici sans enquête officielle en dépit de l’engagement du président Macky Sall à faire la lumière sur les circonstances de la mort d’une quinzaine de personnes dont 10 par balles selon le Département d’Etat des Etats-Unis), le rôle des « milices » et des « nervis » avait été fortement évoqué dans la répression des manifestants. Mais le ministre de l’Intérieur Antoine Félix Diome avait subrepticement botté en touche, les assimilant à des membres des forces de défense et de sécurité habillés en civil. Des civils un peu trop particuliers ?
 
Le « sauvetage » d’Ousmane Sonko contre son propre gré par des policiers et gendarmes des griffes de « milices et nervis » exige donc une clarification publique de la part des autorités en charge de la sécurité des Sénégalais. Cette affaire nécessite une enquête sérieuse et indépendante pour laquelle l’Etat du Sénégal semble si peu qualifié. Une équipe multipartite et crédible dotée de tous les moyens possibles ferait peut-être l’affaire, mais cette projection ressemble déjà à un rêve impossible. Toutefois, l’Assemblée nationale où le rapport de force politique est moins déséquilibré entre pouvoir et opposition depuis les législatives de juillet 2022 devrait s’emparer du sujet et faire au moins ce qu’elle peut !
 
En tout état de cause, nous assistons à un glissement vers des pratiques gravissimes dans notre pays. Un camp politique au pouvoir, sous couvert de la présidence de la République, est accusé de s'approvisionner en armes et munitions en toute impunité, sans qu'il démente de telles allégations! L'alerte est sonnée, s'il n'est déjà trop tard pour sauver ce qui peut encore l'être de notre "modèle politique".
 
 
 
 
 
 
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1.Posté par Me François JURAIN le 21/02/2023 18:47
Ce kidnapping -car s'en est un, comparable à ce que l'on peut voir dans les favelas de RIO DE JANEIRO, ou à HAITI, par exemple, c'est à dire dans des zones ou des pays de non droits absolus, est très symptomatique de ce qui va se passer, et révèle, si besoin était, de la panique totale qui règne au Palais.

La police, éventuellement aidée de la gendarmerie, est chargée de maintenir l'ordre, et de prévenir tous troubles à l'ordre public éventuels. C'est la mission de ces forces armées, agissant sous le contrôle de leur chef, qui agissent eux-mêmes sous ordre du Ministre de l'intérieur.

Le problème est le suivant: le ministre de l'intérieur, quelles que soit ses valeurs, est totalement incompétent dans la mission de maintien de l'ordre, qui en fait est directement exercé par Macky SALL, dont l'obsession est d'avoir SONKO, mort ou vif!

Quand aux forces de l'ordre, dont la mission est de maintenir l'ordre et prévenir les troubles à l'ordre public, c'est à dire essentiellement une mission de prévention, et de défense, et en aucun cas d'attaque, ces gens là sont surarmés, mais totalement incompétents pour ces missions de maintien de l'ordre, parce que sous payés, ils sont également très mal formés. Ils sont de plus épaulés par des "sections d'assaut" anonymes, regroupant lutteurs ratés, repris de justice, mercenaires ou autres délinquants, qui, en échange d'une enveloppe, exécutent la mission qu'on leur confie. C'est ce que l'on appelle les nervis, et les évènements de 2021 nous ont montré, tout le monde à pu le voir, que les nervis de Macky SALL agissaient pour son compte, exécutant la sale besogne que la police ou la gendarmerie ne peut se permettre, mais sous la protection desdits gendarmes et policiers.

Dans le cas qui nous occupe, quelle était la situation:
SONKO rentrait chez lui, avec son cortège. Il ne bouchait pas la circulation, tous les véhicules de son cortège roulaient à une allure modérée, donc pas d’infraction, et au lieu de prendre le tunnel de Soumbédioune, ils étaient sur ce que l'on peut dénommer la contre allée. A cet instant, juste avant l'entrée du tunnel, un véhicule blindé de police (c'est marqueé dessus!) s'est mis en travers de la route, pour empêcher la progression du cortège et leur interdire toute progression. Donc, à ce stade, ce n'est pas SONKO qui a provoqué le trouble à l'ordre public, mais bien la police, qui a volontairement et délibérément stoppé la progression dudit cortège. Alors, si la version donnée par SONKO, et qui pourrait être tout à l'honneur des forces de police et de gendarmerie, d'assurer la protection de SONKO comme de n'importe quel citoyen, de le faire rentrer de force (et quelle force, une vitre d'un véhicule brisé, arrachée manu militari de son siège) au motif que des nervis de Macky SALL l'attendaient dans le tunnel, on peut peut-être se poser la question de savoir pourquoi ils ne se sont pas aussi préoccupés de ceux qui voulaient en découdre avec SONKO, et qui eux, représentaient un réel danger et un vrai trouble à l'ordre public! Je n'ai pas vu, dans le cortège de SONKO, des gens qui souhaitaient en découdre avec les forces de l'ordre ou avec qui que ce soit: les reportages TV le prouvent!

On ne peut qu'être étonné, de voir, encore aujourd'hui, ne serait-ce que place de l'indépendance, des véhicules blindés de la police, des pick-up de cette même police, avec des policiers armés jusqu'aux dents: nous sommes en guerre?

Tout ceci est extrêmement inquiétant, car des incompétents, dirigeant des hommes armés jusqu'aux dents, mal formés pour une mission qui normalement devrait être la leur, mais qu'ils ne maitrisent absolument pas, tous encadrés par des nervis dont le seul objectif est la bagarre, même et si possible avec des morts, qualifier cette situation d'explosive n'est pas l'idée la plus stupide de l'année. Le maintient de l'ordre, c'est un métier, et manifestement ce n'est ni celui du ministre de l'intérieur, et encore moins celui des policiers. Mais voire comme on l'a vu, un tel déploiement de forces, GIGN, police, forces spéciales encagoulées, si la situation volontairement créée n'était pas extrêmement dangereuse, la simple étincelle pouvant mettre le feu aux poudres, on pourrait la trouver particulièrement ridicule, et révélatrice de la panique totale qui s'est emparée d'un président qui vient de se rendre compte, qu'il était largement minoritaire en voix, et quoi qu'il fasse, il dégringole encore. La seule espérance de survie, pour Macky SALL, réside dans un désordre total organisé...par lui même, afin de se poser en sauveur de l'ordre et de la nation. Cela s'appelle "jouer au pompier pyromane". Mais qui peut encore croire à ce stratagème, et combien faudra-t-il de morts pour que Macky SALL "rentre dans le rang", respecte la constitution, vienne dire au peuple sénégalais qu'au mois de FEVRIER prochain, il ne sera plus là, présente son dauphin, organise des élections libres et transparentes, sans truquer, comme à son habitude, le processus électoral. Et à ce moment là, on verra bien qui aura le droit de se présenter: Macky SALL, ne peut en aucun cas se représenter, la constitution le lui interdit, SONKO nous n'en savons rien, cela dépendra de l’issue des différentes actions judiciaires menées contre lui, et les autres, et bien, peut-être que lorsque tout ce tintamarre, organisé par le chef de l'état lui même et sous son contrôle, aura cessé, pourront-ils faire valoir leur droits à exposer leurs idées et programmes.

Mais que l'on ne s'y rompe pas, tout cela est voulu, organisé, orchestré par un seul et même homme, qui espère bien tirer les bénéfices d'un tel désordre: seul problème, cette stratégie surannée ne marche plus, car les peuples sont autrement plus matures qu'ils ne l'étaient, il y a soixante ans en arrière! Donc, ATTENTION, DANGER!
Me François Jurain

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