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Mourir pour Bamako mais pas pour Kiev ? (par Pierre Sané)

Mardi 1 Mars 2022

L’Ukraine, l’Ukraine ? On est d’accord, c’est tragique. Tout peuple agressé dans son territoire mérite notre sympathie. Surtout s’il est lâché par les « puissances » européennes voisines.
 
Mais de grâce, la guerre en Ukraine, ça ne nous regarde pas. L’Afrique doit rester neutre et impartiale. Nous avons suffisamment donné au cours des 2 dernières guerres mondiales et avons été remerciés comme chacun sait par une ingratitude crasse et assumée de la part de la France. La loi d’airain du colonialisme perdure à ce jour.
 
Qu’il y ait de  nouvelles guerres tribales en Europe, quoi de neuf? L’agression et la guerre sont consubstantielles  de l’histoire européenne: génocides, crimes contre l’humanité, esclavagisme industriel, colonialisme, invasions et interventions, bombardements nucléaires, occupations militaires … ils ont tout inventé. Comme le dit si bien Aimé Césaire quand il impute à l’Europe « le plus haut tas de cadavres de l’histoire de l’humanité »
 
Ceci dit, nous devons être déterminés à refuser que cette guerre ne soit exportée chez nous encore une fois. Ce n’est pas notre problème. Il est vrai que nous avons des accords de coopération non divulgués à ce jour et qui statueraient que nous devrions fournir des troupes à la France dans ses aventures guerrières. Il faut tout simplement les dénoncer. Comme vient de le faire le Mali. Plus jamais, nous ne devons servir de chair à canon ou de terrains de jeux à des armées étrangères et encore moins servir de supplétifs diplomatiques. Nos armées ne doivent être mobilisées que pour défendre l’intégrité territoriale de l’Afrique et nos diplomates équipés pour faire respecter notre neutralité.
 
En attendant voici comment les puissances européennes agissent en fonction des circonstances.
 
Au Mali, les puissances européennes moyennes se bousculent pour s’assurer une présence guerrière au Sahel. Ou plutôt acter une occupation rampante que les populations rejettent.
 
Face à Moscou, les mêmes puissances se succèdent derrière les micros pour confirmer que l’Europe n’enverra pas de soldats en Ukraine qui, d’ailleurs, répètent-ils à l’envie, « ne fait pas parti de l’OTAN ».
 
Ces Européens qui abandonnent « en plein vol » (2) un pays voisin et un peuple de frères de sang, ces mêmes européens survolent l’Océan et le Sahara pour venir nous « protéger » des bandes « terroristes »?
 
Qu’on m’explique !
 
Au Mali la « la puissance » française bande ses muscles et fait savoir aux autorités qu’elle ne quittera le pays qu’en son temps et qu’en son heure. À Moscou, Emmanuel Macron est tenu à distance comme un vulgaire Covidè.
 
À Bamako, les Chefs militaires français ont accès aux autorités du pays « sans délais ». À Moscou, on fait la queue patiemment devant chez Vladimir Poutine.
 
À Bamako, on menace et on vocifère dans les médias. À Moscou, on supplie et on fait des promesses.
 
À Bamako, on s’insurge des pistes de négociations explorées par le gouvernement de transition. Avec Moscou, on privilégie le dialogue même après le lancement du conflit.
 
À Bamako, on agite les droits de l’homme, la démocratie, les élections… Chez Poutine, ce sont des sujets qui fâchent, donc silence radio.
 
Dites-moi : en toute logique Barkhane et Takuba ne devraient-ils pas être redéployés en….Ukraine ? Des soldats européens prêts à mourir pour Bamako mais pas pour Kiev ? Humm !
 
Mais comme dit Macron: « L’Afrique ? Je l’aime ». Les Ukrainiens doivent être rouges de jalousie!
 
Le terme de puissance n’est pas seulement un élément de langage! C’est une démonstration sur le terrain. Quand on est puissant on l’est partout…. Mais quand on l’est seulement dans la ZNF ! (1)
 
Ou illusion plutôt ?
 
Pierre Sané
 
1. Zone de nuisance française
2. J’emprunte cette expression au 1er ministre malien dans son discours à l’ONU
 
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