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L’Éthiopie accuse les forces du Tigré d’avoir tiré des roquettes

Samedi 14 Novembre 2020

Des roquettes ont frappé dans la nuit deux localités de l’Amhara, région éthiopienne voisine du Tigré où l’armée éthiopienne combat les autorités régionales, renforçant les craintes que le conflit s’étende, dans un pays où les tensions entre les nombreuses ethnies sont vives.
 
Les roquettes sont tombées dans les environs des aéroports des villes de Bahir Dar, capitale régionale de l’Amhara, située à environ 200 km de la frontière avec celle du Tigré, et de Gondar, 100 km plus au nord, selon la cellule de crise gouvernementale. Des témoins ont fait état d’explosions et de tirs vendredi en fin de soirée.
 
«Les zones des aéroports ont subi des dégâts», explique samedi la cellule de crise sur son compte Twitter, sans faire état de bilan humain. «La junte du TPLF utilise les dernières munitions de son arsenal», poursuit-elle, en référence au Front de libération des Peuples du Tigré (TPLF), parti qui dirige la région et contre lequel le Premier ministre Abiy Ahmed a lancé le 4 novembre une offensive militaire.
 
«Une cible légitime»
 
Le président de la région du Tigré, Debretsion Gebremichael, a dit samedi à l’AFP ne pas avoir connaissance de ces tirs, mais rappelé que les dirigeants du TPLF considéraient que «tout aéroport utilisé pour attaquer le Tigré serait une cible légitime».
 
Les aéroports de Bahir Dar et Gondar sont utilisés à la fois par des appareils civils et militaires. L’aviation éthiopienne a mené plusieurs raids au Tigré et le TPLF affirme que ses frappes ont fait des victimes civiles, sans qu’il soit possible de le vérifier.
 
Bahir Dar et Gondar étaient calmes samedi matin, ont rapporté des habitants joints par l’AFP qui ont fait état de brefs tirs dans les deux villes après les explosions. Un habitant de Bahir Dar a raconté avoir entendu «deux fortes explosions vers 22h50» (20h50 en Suisse). «Après il y a eu des tirs durant 15 minutes et c’est redevenu calme», a-t-il ajouté.
 
Crainte d’une guerre communautaire
 
S’il s’avère qu’il est bien à l’origine de ces tirs de roquettes, le TPLF montre sa capacité à porter le conflit hors de son fief. Ce, alors que le général Berhanu Jula, chef d’état-major de l’armée fédérale, avait assuré le 5 novembre que «la guerre ne gagnera pas le centre du pays» et «se terminera» au Tigré.
 
De nombreux observateurs craignent que le conflit au Tigré n’entraîne l’Éthiopie, deuxième pays le plus peuplé d’Afrique avec plus de 100 millions d’habitants et mosaïque de peuples rassemblés au sein d’un «fédéralisme ethnique», dans une guerre communautaire incontrôlable.
 
De vieux différends territoriaux opposent les Amhara (deuxième ethnie la plus nombreuse en Éthiopie après les Oromo) et les Tigréens (6% de la population du pays) et les tensions sont récurrentes entre les deux communautés qui se sont violemment affrontées par le passé.
 
Des milliers de miliciens amhara ont déjà rejoint le Tigré pour prêter main-forte à l’armée fédérale éthiopienne contre le TPLF, selon les autorités régionales amhara.
 
«Massacre»
 
Jeudi, Amnesty International a dénoncé un «massacre» de civils au Tigré, citant des témoins qui affirment que les victimes étaient amhara et ont été tuées par des forces du TPLF, ce que Debretsion Gebremichael a démenti.
 
Fer de lance de la lutte armée qui a renversé le régime militaro-marxiste du Derg en 1991, le TPLF a ensuite contrôlé durant presque 30 ans l’appareil politique et sécuritaire de l’Éthiopie, et sa toute-puissance a créé un fort ressentiment à son égard, notamment au sein des Oromo et Amhara.
 
Lui-même oromo, Abiy Ahmed, devenu Premier ministre en 2018 à la faveur d’un fort mouvement de contestation populaire né dans les régions oromo et amhara, a progressivement écarté du pouvoir les dirigeants du TPLF, avec lesquels les tensions n’ont cessé de croître.
 
Elles étaient particulièrement vives depuis que le TPLF a, en organisant des élections régionales au Tigré, défié la décision du gouvernement de reporter tous les scrutins en raison de la crise liée au Covid-19, puis a refusé de laisser un haut responsable militaire prendre ses fonctions au Tigré.
 
Abiy Ahmed a indiqué que l’objectif de l’opération au Tigré était de rétablir des «institutions légitimes» dans la région. (ATS/NXP)
 
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