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Aucune disposition juridique ne permet céder gracieusement des véhicules aux 165 députés

Dimanche 25 Septembre 2022

Seybani Sougou, chroniqueur juridique
Seybani Sougou, chroniqueur juridique
La décision de céder « gracieusement » des véhicules aux 165 députés sortants de la 13ème  législature est frappée d’illégalité totale et constitue un énorme scandale d’Etat qui doit être dénoncé avec la plus grande vigueur. En la matière, Il n’existe aucune jurisprudence qui tienne. Au demeurant, la pseudo jurisprudence WADE invoquée pour justifier la cession gratuite de véhicules aux 165 députés ne repose sur aucun fondement juridique (aucun texte ne prévoit la cession gratuite). Cette pratique totalement illégale qui consiste en une soustraction frauduleuse des biens de l’Etat au profit de particuliers, fussent-ils des députés, constitue un vol et un détournement de véhicules publics. Ni plus, ni moins.
 
L’acquisition de véhicules pour les députés engage les deniers publics et fait l’objet d’un appel d’offres, dont la procédure de passation est conduite par le Ministère de l’Economie et des Finances. Par ailleurs, l’acquisition, l’affectation, et l’usage de véhicules administratifs sont strictement encadrés par les textes, dont le Décret n°2021-03 en date du 6 janvier 2021 relatif aux véhicules administratifs et l’Instruction N°0112/PR/SG du 06 janvier 2021 fixant les règles relatives à l’acquisition, l’attribution et l’utilisation des véhicules appartenant à l’Etat, aux collectivités territoriales, établissements publics, etc. La cession d’un véhicule réformé doit se faire soit par adjudication, avec publicité et concurrence, soit aux enchères. Il n’y a ni cession gratuite, ni indemnité de sortie pour les députés de la 13ème législature dont certains se sont comportés comme de vulgaires caïds et se sont livrés à des trafics (BougazelliI) ou de passeport diplomatique (Boubacar Biaye et Mamadou Sall). Affirmer que depuis 2000, tous les députés partent avec leur véhicule n’a aucune validité juridique (argument bidon).
 
En France, les 577 députés qui siègent dans l’hémicycle bénéficient d’une carte « nominative » de circulation leur permettant de voyager sur l’ensemble du réseau de la société nationale des chemins de fer (SNCF) pendant la durée de leur mandat (5 ans). Les députés ne bénéficient d’aucune dotation de véhicule, à titre personnel, et doivent se contenter d’utiliser le parc automobile de l’Assemblée nationale qui comprend uniquement 12 voitures avec chauffeur. Les 577 députés se partagent à tour de rôle, 12 véhicules qui font l’objet d’un contrôle strict au niveau des déplacements. En 2015, M. François GrosDidier a été condamné pour détournements de biens publics, pour avoir utilisé un véhicule de fonction de sa mairie pour se rendre à Paris, à l’époque, où il était député. Il n’est pas rare de voir des députés se déplacer à vélo ou utiliser les transports en commun, dans l’indifférence totale du public.
 
Il est inadmissible dans un pays pauvre comme le Sénégal où les urgences sont ailleurs (flambée des prix de première nécessité du fait de l’inflation) que les députés, qui se font davantage remarquer par leur inutilité soient dotés individuellement de véhicules. Il n’y a aucun contrôle de la consommation de carburant et de l’usage du véhicule par le député (souvent détourné à des fins personnelles ou familiales). Il urge de mettre fin à cette bamboula où les députés se goinfrent comme des profiteurs, oubliant ce pour quoi, ils ont été élus. L’argent du contribuable doit être utilisé à bon escient. Il est impératif de rationaliser le parc de véhicules (mutualisation), et de réduire de manière drastique la dotation de véhicules personnels. Alors que les Sénégalais sont tenaillés par la vie chère, la présidence, des services de l’Etat et des ministres détournent, en toute impunité, des véhicules administratifs.
 
Ni la loi organique portant règlement intérieur de l’assemblée nationale, ni le décret 2021-03 du 06 janvier 2021 n’autorisent le Président de l’assemblée nationale à céder gratuitement 165 véhicules (biens de l’Etat) aux députés. Une coutume illégale ne peut tenir lieu d’une quelconque jurisprudence.
Seybani SOUGOU - E-mail : sougouparis@yahoo.fr
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1.Posté par Me François JURAIN le 26/09/2022 19:04
Je pense qu'il serait grand temps de s'intéresser aux affaires de l'ex Président de l'assemblée nationale, qui vient d'être épinglé dans une affaire de compte "ouvert bien évidemment à l’insu de son plein gré" en SUISSE! Homme d'affaires, et Président de l'Assemblée Nationale, ça fait quand même un peu désordre! Et comme si cela ne suffisait pas, il ne connait pas le chômage, ce brave homme, puisqu'il retrouve illico un poste, grassement payé à ne rien faire! Il me semble quand même qu'il a parfaitement le droit d'offrir des véhicules à qui il veut, mais offrir des véhicules qui ne lui appartiennent pas, qui appartiennent au peuple sénégalais, là, quand même, c'est pousser le bouchon, un peu loin. Mais cette manière de se comporter est la définition même de ce qui se passe au pays depuis dix ans: une bande assimilable à une bande mafieuse, s'est accaparé le pays, et en dispose à sa guise! Edifiant!!!
Me François JURAIN

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