Un Comité national de coordination de la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive est en passe de voir le jour au Sénégal. Un premier projet de décret portant création de cet organe a été adopté en conseil des ministres du 22 octobre 2025. Transmis à l’assemblée nationale pour vote dans les prochaines semaines (ou prochains mois), ce texte marque la volonté du gouvernement sénégalais de rétrécir le périmètre des actes de blanchiment de capitaux par une plus grande efficacité des offices intervenant dans ce domaine.
Depuis plusieurs mois, des citoyens lambda, des hommes d’affaires et des personnes politiquement exposées (PEP) font face à la justice, en particulier au Pool judiciaire financier (PJF). Les chefs d’accusation qui leur sont collés se résument généralement aux infractions blanchiment de capitaux, association de malfaiteurs, détournement de fonds publics en bande organisée. Pour la plupart d’entre eux, leurs dossiers ont été transmis à l’autorité judiciaire par la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif).
Dans son rapport 2024, la Centif a répertorié et signalé 554 cas de fraude (+17 % par rapport à 2023), 66 entorses à la réglementation des changes (+100 %) et 73 cas d’infractions fiscales pénales (+78 %), en plus des faits de corruption en hausse de 5 % grâce aux déclarations d’opérations suspectes (Dos) transmises par certaines institutions.
C’est sur la base des enquêtes menées à partir des éléments bruts que sont les Dos que la Centif a transmis au procureur de la République 46 documents en 2024 (contre 43 pour l’année 2023). Ces dossiers sont tous porteurs d’« indices graves et concordants de blanchiment de capitaux ou de financement de terrorisme. »
Néanmoins, le rapport 2024 de la Centif pointe la faiblesse de l’engagement de certaines entités pourtant soumises à l’obligation de dénoncer les opérations suspectes qu’elles rencontrent dans un contexte ou la criminalité économique et financière locale comme transfrontalière est jugée préoccupante autant par l’Etat que par le Giaba. Les écosystèmes constitués par les systèmes de transfert d’argent, les sociétés de courtage en assurance et réassurance, les agents immobiliers, les négociants en métaux précieux, les casinos et établissements de jeux en ligne, les notaires sont particulièrement identifiés comme défaillants.
C’est pour balayer ces résistances que le gouvernement a adopté - au cours du même conseil des ministres - un deuxième projet de décret « relatif au contrôle et à la supervision des personnes assujetties du secteur non financier en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive. »
L’objectif est de relever le taux des déclarations des transactions en espèces (DTE). Celles-ci concernent « toutes les opérations de versement et de retrait en espèces d’un montant supérieur ou égal à 15 millions (FCFA) conformément à l’article 72 de la loi No 2024-08 du 14 février 2024 relative à la LBC/FT/PF et à l’instruction No 10-09-2017 du 25 Septembre 2017 de la BCEAO. »
Le Sénégal, placé en février 2021 sur la liste grise du GAFI (Groupe d’action financière) sous le régime de la surveillance renforcée pour manquements dans la lutte contre le blanchiment de capitaux, en est sorti en octobre 2024. Il s’était engagé à procéder à des réformes déclinées dans un plan de 29 actions et portant sur 49 mesures à mettre en oeuvre entre février 2021 et septembre 2022.






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