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Le Conseil constitutionnel censure l'interdiction administrative de manifester

Jeudi 4 Avril 2019

PARIS (Reuters) - Le Conseil constitutionnel a censuré jeudi un article emblématique de la loi "anti-casseurs" sur l'interdiction administrative de manifester, jugé trop imprécis par les "Sages".
 
"L'article 3 de la loi visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations est contraire à la Constitution", annonce l'instance dirigée par Laurent Fabius dans sa décision publiée sur son site internet.
 
Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d'Etat Laurent Nunez, ont pris "acte" de "l’analyse du Conseil constitutionnel, qui en a jugé les conditions insuffisamment précises et encadrées".
 
"Ils étudieront, en lien avec les parlementaires, les suites à donner à cette décision", ajoutent-ils dans un communiqué.
 
Adopté début février à l'Assemblée malgré une fronde de la gauche et les doutes d'une partie de la majorité, puis voté conforme début mars au Sénat, la proposition de loi a fait l'objet d'un recours devant les "Sages" de la part de députés et de sénateurs de l'opposition, mais aussi d'Emmanuel Macron lui-même pour vérifier sa conformité avec la Loi fondamentale.
 
Le 5 février, un nombre record de 50 députés La République en marche s'étaient abstenus sur cette loi dans l'espoir d'améliorations en deuxième lecture, notamment en ce qui concerne le respect du droit de manifester. Ajoutant au malaise, un député abstentionniste, Matthieu Orphelin, avait ensuite annoncé son départ du groupe majoritaire au Palais-Bourbon.
 
DOUTES "JUSTIFIÉS"
 
Mais le Sénat, majoritairement à droite, a coupé court à toute transformation en approuvant le texte sans en changer une virgule le 12 mars.
 
Inspiré notamment des mesures "anti-hooligans", l'article 3 autorisait les préfets à interdire de manifestation "par arrêté motivé" toute personne "à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public".
 
Selon Christophe Castaner, étaient visés 50 à 100 "individus bien connus, qui appartiennent à des groupuscules extrémistes, qui viennent systématiquement pour casser".
 
Pour le Conseil constitutionnel, le législateur "a porté au droit d'expression collective des idées et des opinions une atteinte qui n'est pas adaptée, nécessaire et proportionnée".
 
La décision a été saluée par les députés de la majorité critiques avec le texte.
"Nous étions nombreux à avoir de gros doutes sur l’interdiction administrative de manifester. La décision du Conseil Constitutionnel de censurer cet article de la loi anti-casseurs montre que ces doutes étaient justifiés", a réagi Matthieu Orphelin, désormais député non inscrit.
 
"Notre abstention lors du vote de cette proposition de loi (...) n’était aucunement le signe d’une défiance à l’égard de notre majorité, mais bien de notre irrémédiable attachement à un Etat de droit", ont souligné dans un communiqué commun une douzaine de députés La République en marche abstentionnistes.
 
Le syndicat de police Alliance a en revanche dit "regretter" une décision "qui obère le travail des forces de l’ordre dans leurs missions de maintien de l’ordre public."
 
Les "Sages" ont donné leur feu vert à deux autres articles contestés : l'un concernant les fouilles sur les lieux de manifestations et un autre créant un délit de dissimulation volontaire du visage (totalement ou partiellement), assorti d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende.
Le texte de loi devrait être promulgué prochainement, privé de son article 3.
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