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Vital Kamerhe (ex-président de l’assemblée nationale de Rdc): «Je ne m’attends pas à ce que Kabila se comporte en moine»

Jeudi 1 Juin 2017

Acteur de la crise politique qui sévit en RDC depuis bien avant la fin du second et dernier mandat du président Joseph Kabila, le chef de file de l'Union pour la nation congolaise (UNC) appelle ses pairs à ne pas confondre l’accessoire, c’est-à-dire les postes ministériels dans la transition, et l’objectif, soit l’organisation d’élections sans le chef de l’Etat sortant. (Entretien réalisé le 22 avril dernier à Bahir Dar, Ethiopie)


Comment décrivez-vous la situation aujourd’hui en RDC après l’accord politique du 31 décembre 2016 ? Pourquoi ces blocages ?
Ce que vous appelez blocage n’en est pas un. Nous sommes dans un processus où il y a des hauts et des bas. Quand ça touche aux hommes, on commence à tergiverser. L’accord a été signé le 31 décembre 2016. Il contient un certain nombre de principes parmi lesquels le président actuel ne va pas briguer un troisième mandat à la tête du pays. C’est une avancée significative.
 
Deuxième principe et point très important : nous avons convenu d’organiser des élections couplées, présidentielle, législatives nationales et provinciales à la fin de l’année 2017 en cours. Troisième avancée significative : nous avons tous accepté de mettre en place un Conseil national de suivi pour la mise en œuvre de l’accord et du processus électoral.
 
Nous avions tous convenu que ces conseils là soient présidés par le président Etienne Tshisekedi eu égard à son envergure et au combat pour la démocratie qu’il a mené pour son pays. Mais personne ne pouvait penser, à ce moment là, que le président Tshisekedi allait mourir un mois après, le 1er février 2017.
 
Oui, mais qu’est-ce qui a été fait depuis ce fameux 31 décembre 2016
Entre le 31 décembre 2016 et le 1er février 2017, qu’est-ce qui a empêché au Rassemblement (ndlr: coalition d’opposition) que présidait Etienne Tshisekedi de désigner le premier ministre ou le probable premier ministre ?
 
Moi je refuse de croire que dans une grande organisation comme le Rassemblement, on ne puisse pas voir et avoir trois personnalités interchangeables qui peuvent occuper valablement le poste de chef du gouvernement. D’autant plus que pour le Rassemblement et pour nous tous de l’opposition, nous avons dit: faisons attention de ne pas confondre le principal et l’accessoire.
 
C’est-à-dire ?
L’objectif, c’est d’amener le peuple aux élections afin qu’il soit en mesure de choisir ses dirigeants demain au niveau des provinces, à l’assemblée nationale et, encore mieux, le président de la République démocratique du Congo après celui qui est en poste. Mais au niveau de l’opposition, nous sommes divisés. Nous devons nous rappeler que c’est nous-mêmes qui disions que le président actuel a perdu sa légitimité à la fin de son deuxième et dernier mandat, le 19 décembre 2016.
 
Mais comment voulez-vous, après ces mots, que dans le cadre d’un arrangement particulier entre politiciens, que nous puissions nous complaire de la légitimité de quelqu’un qui n’en a plus ? Je voudrais inviter tout le monde à comprendre que le plus important dans l’état actuel des choses, c’est d’aller aux élections. Et ces élections, elles doivent être bonnes et bien organisées.
 
L’enjeu, c’est peut-être la maîtrise du gouvernement…
Je refuse de croire qu’il soit indispensable d’être au gouvernement pour que les choses se passent bien. La structure chargée de suivre l’accord du 31 décembre 2016 et d’être un contrepoids à la commission nationale électorale indépendante, c’est le conseil national du suivi et de la mise en œuvre dudit accord.
 
En ce qui me concerne, je considère que tant que la commission électorale poursuit son travail d’enrôlement sur le terrain – nous en sommes à 23 millions d’enrôlés sur 40 millions escomptés, ce qui est une avancée significative – tant que nous acceptons – le président de la république sortant, toute l’opposition, la société civile – que l’enrôlement des électeurs prenne fin le 31 juillet 2017, tant que nous acceptons et attestons tous qu’à la fin de l’enrôlement plus rien ne pourra empêcher la convocation du corps électoral, je dis que le plus important est à ce niveau là.
 
Comment expliquez-vous que l’opposition insiste sur l’accessoire au détriment de l’objectif, comme vous dites ?
Ce n’est pas l’ensemble de l’opposition, et là nous sommes encore dans le domaine des humeurs. Nous pouvons avoir des approches différentes, mais nous ne devons jamais oublier que nous menons une lutte commune pour l’alternance dans notre pays.
 
Nous voulons absolument que le peuple congolais puisse se prononcer sur ces différentes élections. C’est pour cela que nous invitons les leaders à se calmer car il ne reste que sept mois. Même si vous entrez au gouvernement comme premier ministre, vice premier ministre, ministre d’Etat, ministre ou vice-ministre, ce ne sera pas plus que sept mois.
 
Cela peut donner raison à ceux qui croient qu’il y a certains qui se battent pour être au gouvernement afin de se faire ou refaire une santé financière. Si c’est pour servir le pays, on peut le faire dans le cadre de l’opposition…
 
Le président Kabila joue-t-il le jeu ?
Sommes-nous en politique ou dans une secte ? Nous sommes réellement en politique. Moi qui suis dans l’opposition, je ne m’attends pas à ce que le président de la république se comporte en moine.
 
Oui mais Kabila joue-t-il vraiment le jeu que vous attendez de lui ?
Vous savez, les individus m’importent peu ! Je vous ai parlé du processus d’une manière générale. Je vous ai dit qu’à partir du moment où le président de la république a dit solennellement devant la nation congolaise que le 31 juillet 2017 il prendra acte de la fin de l’enrôlement.
 
Pour ceux qui sont encore sceptiques, il y a aura bel et bien des élections. Quelques mois avant cela, il avait fait signer l’accord par ses partisans, accord dans lequel il est écrit qu’il ne briguera pas un troisième mandat. Battons-nous pour qu’il en soit ainsi, mobilisons le peuple autour des valeurs et des objectifs, et il nous suivra. Mais si on demande à ce peuple de descendre dans la rue parce qu’untel n’a pas été ministre, croyez-moi, il ne suivra pas.
 
L’Eglise a tapé sur la table face aux lenteurs. A-t-elle raison de le faire ?
Il ne m’appartient pas de juger l’Eglise. Elle peut donner son opinion car nous sommes en démocratie.
 
C’est elle le parrain du processus politique non ?
Le processus appartient au peuple congolais…
 
(Propos recueillis par Momar DIENG)
 
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