Connectez-vous

Jugement Cour de justice de la Cedeao : Réponse à un maître.

Mardi 3 Juillet 2018

« Ma (Pr. Ismaila M. FALL) première réaction sur la question était une réaction officielle du gouvernement du Sénégal. Je voudrais, avec votre autorisation, réagir ici en ma seule qualité de professeur des universités pour aborder les questions soulevées dans une perspective scientifique, celle du droit communautaire ».

Permettez alors ces observations sur votre analyse doctrinale (Le Soleil, Mardi 3 Juillet 2018).

1). Désolé professeur, la cour n’est pas liée par sa jurisprudence.
«Ceux qui connaissent bien sa jurisprudence sont surpris, voire perplexes. Dans la droite ligne de sa jurisprudence, la Cour s’est toujours refusé à se prononcer sur les procédures judiciaires internes ou sur l’interprétation d’une décision de juridictions nationales.»
D’accord. Mais la jurisprudence n’étant pas la loi, les revirements de jurisprudence sont monnaie courante en droit. Mieux, ils traduisent une volonté du juge d’adapter le droit (par son interprétation) à la réalité.

2). Sur la détention arbitraire. « On respecte cette position qui ne remet pas en cause la détention en cours. »
 
Désolé, professeur. Pourquoi vouloir fictivement scinder la détention ? Comment, une détention arbitraire au début et qui continue peut finir par se régulariser du simple fait de la disparition d’un vice (levée de l’immunité parlementaire) ? Si c’est possible en d’autres domaines, cela ne fonctionne pas ainsi en droit. Mais ce n’est pas le plus important.

3) « Au Sénégal, la détention des personnes concernées par cette affaire résulte d’une enquête judiciaire et d’une instruction ponctuée de nombreux recours avant l’intervention d’un procès public où toutes les parties ont pu s’exprimer librement conclu par une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée. »

Désolé professeur. Le règlement 05 de l’UEMOA sur le droit à la présence d’un avocat n’étant pas respecté, on ne peut dire que « les parties ont pu s’exprimer librement ». Et sur le règlement, attention. Etant d’application directe, il n’avait pas besoin de circulaire.
Ainsi, à votre interrogation « D’où est-ce que la Cour tire le prétendu caractère arbitraire et les manquements au procès équitable ? », la violation de l’article 5 du règlement 05 doit suffire pour réponse.
 
**************************************************************************
«Les arrêts de la Cour de Justice ont force obligatoire à l'égard des Etats Membres, des Institutions de la Communauté, et des personnes physiques et morales.» (Traité de la Cedeao, article 15 in fine)
 *************************************************************************

4). « la philosophie de la relation entre la Cour de justice de la Cedeao et les juridictions nationales doit être rappelée : il ne s’agit pas d’une relation hiérarchique, mais bien d’une relation de collaboration nécessaire à la pénétration du droit communautaire dans les ordres juridiques des Etats membres. »

Désolé professeur. Sauf erreur de ma part, d’après le Traité de la CEDEAO, les arrêts de la cour s’imposent aux Etats et aux juges. Art 15 in fine : « Les arrêts de la Cour de Justice ont force obligatoire à l'égard des Etats Membres, des Institutions de la Communauté, et des personnes physiques et morales. »

Mieux, l'exposé des motifs du Traité est plus que éloquent, "CONVAINCUS que l'intégration des Etats Membres en une Communauté régionale viable peut requérir la mise en commun partielle et progressive de leur souveraineté nationale au profit de la Communauté dans le cadre d'une volonté politique collective; RECONNAISSANT de ce fait la nécessite de créer des Institutions communautaires auxquelles seraient conférées des pouvoirs conséquents". le débat sur la souveraineté n'a donc pas de raison d’être.

5) « Si l’on se contente du dispositif qui, seul, est disponible pour l’instant, il convient de distinguer les questions contenues dans l’arrêt. Les avocats de Khalifa Sall et autres avaient globalement formulé deux types de demandes à l’endroit de la Cour : d’une part, des questions de procédure consistant à faire constater par la Cour la violation d’un certain nombre de droits (détention arbitraire, assistance d’un avocat dès l’interpellation, procès équitable) ; d’autre part, faire dire à la Cour qu’elle répare le préjudice subi, ordonne d’autres mesures dont l’arrêt des poursuites et la libération de Khalifa Sall et autres.

Sur le premier aspect, la Cour s’est prononcée sur des questions de procédure et demande à l’Etat de verser une indemnisation de trente-cinq millions de francs Cfa aux requérants. »

Excellent. Le droit étant d’abord forme, le débat est clos.
 
Wahab NDIAYE
Agrégé de Droit – Université Cheikh Anta Diop
 
Nombre de lectures : 1256 fois


1.Posté par Mayday le 03/07/2018 18:24
On vous disait que notre couturier constitutionnel a de la ressource. Ayant pris l'argent du Macky, il faut qu'il "ponde" quelque chose, comme les marabouts au temps des rois tiedos . Lui-même est convaincu de la fausseté de ses dires, mais il n'a pas le choix. Quand on met le doigt dans l'engrenage, tout le corps risque d'y passer...

2.Posté par Me François JURAIN le 08/07/2018 11:56
Beaucoup de pages écrites (pardon, professeur, ce n'est pas pour vous) pour pas grand chose, au fond.
L'affaire est assez simple:
Mes Confrères qui ont en charge la défense des intérêts de Khalifa SALL, ont soulevé des nullités de procédure.
Une nullité de procédure, qu'est ce que c'est:
Ce sont des irrégularités, des fautes commises soit par les services de police, soit par le magistrat instructeur, soit par le parquet, à quelque moment de la procédure, c'est à dire à partir du moment où le mis en cause est mis en examen, qui entrainent ipso facto la nullité de la procédure, et empêche (ou devait empêcher) tout examen au fonds de l'affaire.
Dans un procés, les avocats soulèvent ces nullités "in limine litis", c'est à dire dès l'ouverture du procés, avant même les débats sur le fonds.
Le président a alors en vertu de son pouvoir discretionnaire, la possibilité soit de statuer et délibérer sur les nullités immédiatement, soit de joindre les incidents au fond: cette dernière habitude s'est malheureusement généralisée au fil du temps (46 années de vie professionnelle) et de plus en plus, les magistrats ne font que peu de cas des nullités de procédure, et c'est fort regrettable.
C'est ce qui s'est passé dans ce procés politique, puisque maintenant, personne ne peut douter un seul instant que ce procés a été voulu, commandité, dirigé et ordonné par un seul homme, dont le dernier domicile connu est boulevard Léopold Senghor...
Dès lors, que dit la CEDEAO: que les entraves au code de procédure pénale, constituent des nullités entrainant la nullité de toute la procédure.
Après cela, il n'y a plus rien d'autre à dire: la procédure est nulle, il ne peut y avoir de procés, et la libération est immédiate!
Rien ne sert d'évoquer une quelconque jurisprudence de la cedeao: La jurisprudence, d'une cour de cassation, de la CEDEAO, de la cour europeenne, ne peut porter sur des questions de droit écrites, établies, elle peut avoir un revirement sur des faits, mais pas sur des articles du code qui ne peuvent être modifiés que par une loi! Il ne peut y avoir d'interprétation, sur un article de code: où on l'applique (ce qui est la moindre des choses de la part d'un magistrat!) ou on ne l'applique pas, et là, la démonstration est faite que ce procés est orchestré par une personne qui n'a pas les compétences pour le faire (je ne parle pas du juge LAMOTTE qui est un excellent magistrat), et dont le but premier n'est pas que justice soit faite...
Mais la situation va devenir cocasse le 09 juillet, lorsque va débuter le procès en appel:
La CEDEAO dit, preuve à l'appui: les fautes de procédures constatées entrainent la nullité de la procédure tout entière, et elle a raison de dire ca. Dès lors qu'il y a nullité de la procédure, comment peut il y avoir procès?
Comment la Cour d'appel va t elle faire pour renier son propre code de procédure pénale, alors même qu'elle vient de se faire donner une leçon de droit par la CEDEAO, et quio n'a fait que dsire le droit: soit la cour d'appel respecte le droit, et va dans le sens de la CEDEAO, soit elle confirme le jugement initial, pour satisfaire son "donneur d'ordre", et elle apportera la preuve au monde entier que le système judiciaire sénégalais est corompu et aux ordres, les magistrats étant réduits au rôle de "petits télégraphistes"!
Et c'est là ou l'affaire K.SALL va prendre toute sa dimension, et en fait, le plus intéressant dans tout cela, ce n'est pas le cas de K.SALL, c'est l'honneur de tout le système judiciaire lui même: les magistrats de la cour d'appel auront ils le courage de dire non à leur commanditaire, fusse t il président de la république, malgrè toutes les sanctions ultérieures qu'ils auront à affronter. Dans ce cas, il faudra rendre hommage à leur courage, et proclamer haut et fort que, oui, il existe bien u système judiciaire solide au sénégal, et le peuple peut être fier et avoir confiance en sa justice,
Ou bien, cas plus probable, ils botteront en touche, laissant le soin à la cour suprème de régler le problème. Et là, on connait déjà la réponse.
Je pense qu'il est très important, à ce stade, pour les juristes que vous (nous) êtes, de différencier le procés, de la personne même de Mr K.SALL, car c'est toute la crédibilité et l'honorabilité du système judiciaire sénégalais qui est en jeu.
Me François JURAIN

Nouveau commentaire :












Inscription à la newsletter