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Italie - Plus de 300 mafieux risquent de lourdes peines à un procès d’envergure

Dimanche 12 Novembre 2023

Plus de 300 présumés mafieux encourent de lourdes peines cette semaine en Italie au terme d’un maxi-procès de trois ans contre la redoutée » Ndrangheta, la plus puissante mafia de la péninsule.

Au total, près de 5000 ans de prison ont été requis contre 322 accusés.

 

Basée en Calabre, une région très pauvre située dans la pointe de la Botte italienne, la’Ndrangheta est la plus riche et la plus puissante des mafias italiennes, grâce notamment à son quasi-monopole sur le trafic de cocaïne en Europe.

 

Présente dans une quarantaine de pays, elle exerce sur sa terre d’origine une emprise étouffante, infiltrant et corrompant l’administration tout en faisant régner sa loi de fer sur la population.

 

Depuis janvier 2021, trois juges ont auditionné en Calabre durant des milliers d’heures des témoins, parmi lesquels des mafieux repentis devenus collaborateurs de justice, sur les activités de la famille Mancuso et de ses associés, un important clan de la » Ndrangheta contrôlant la province de Vibo Valentia.

 

« C’est un procès important, car il vise l’une des plus importantes familles de la » Ndrangheta basées en Calabre disposant de ramifications internationales », a expliqué Antonio Nicaso, expert de la mafia.

Le tribunal devrait rendre son verdict dans le courant de la semaine.

 

Ce « maxi-procès » contre un grand nombre d’accusés faisant partie du même clan criminel, organisé dans un bunker sous haute surveillance dans la ville de Lamezia Terme, est le plus important contre la mafia depuis plus de 30 ans.

 

Les chefs d’accusation sont nombreux : association mafieuse, trafic de drogue, extorsion, usure, blanchiment d’argent sale.

 

Le précédent de Palerme

 

Le patron de la province de Vibo Valentia, Luigi Mancuso, 69 ans, est jugé séparément après avoir été arrêté en 2019 lors d’un coup de filet ayant conduit à l’arrestation de plus 300 mafieux présumés.

 

Le parquet a requis 30 ans de détention contre la douzaine de collaborateurs les plus proches de Mancuso, en charge notamment des relations avec les autres mafias.

 

Illustrant l’infiltration de la » Ndrangheta dans l’économie légale, des gérants de société, des maires et des fonctionnaires, y compris un policier de haut rang, figurent sur le banc des accusés.

 

L’un des plus connus est un avocat de 70 ans, Giancarlo Pittelli, ex-député et sénateur du parti Forza Italia de Silvio Berlusconi, qui encourt 17 ans de prison pour son rôle présumé d’intermédiaire entre le clan et le monde politique.

 

Par ailleurs, 67 accusés ont déjà été condamnés après avoir opté pour une procédure accélérée.

 

Les témoignages les plus marquants sont venus d’une cinquantaine de repentis, dont le propre neveu de Luigi Mancuso, Emanuele.

 

Ils ont révélé des secrets sur des caches d’armes dans des cimetières ou des ambulances servant au transport de drogues, et dévoilé comment l’eau municipale était détournée pour arroser des plantations de marijuana.

 

Ceux qui se sont opposés à la mafia ont découvert sur le seuil de leur porte des chiots morts ou des têtes de chèvre ou même de dauphin. Sans parler des voitures incendiées ou des devantures de magasins saccagées.

 

Certains ont aussi été passés à tabac ou visés par des tirs, d’autres ont même disparu sans que leur corps ne soit retrouvé.

 

150 familles

 

Longtemps sous-estimée, la » Ndrangheta s’est développée discrètement durant des décennies alors que les autorités concentraient leurs efforts sur Cosa Nostra, la mafia sicilienne décrite dans des films comme Le Parrain.

 

Le premier maxi-procès fut d’ailleurs organisé contre ses membres à Palerme en 1986, aboutissant à la condamnation de 338 mafieux.

 

Aujourd’hui, les experts estiment que la » Ndrangheta, composée d’environ 150 familles calabraises, réalise un chiffre d’affaires annuel d’une cinquantaine de milliards d’euros à travers le monde.

 

Avec l’aide d’Interpol, l’Italie est parvenue ces dernières années à resserrer son étau sur le réseau criminel, entraînant les polices du monde entier à reconnaître les activités de la » Ndrangheta sur leur territoire et à s’y attaquer.

 

Mais en dépit de son envergure, ce procès ne devrait pas bouleverser les activités de la » Ndrangheta, selon les experts.

 

« Je ne crois pas qu’une opération de police suffise à détruire la » Ndrangheta », estime ainsi Antonio Nicaso, qui met en avant d’autres priorités : emploi, éducation et changement des mentalités. « C’est de cela dont on a besoin pour attaquer une organisation criminelle ». [AFP]

 

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