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BURKINA FASO : la société post-insurrectionnelle au prisme des élections

Vendredi 16 Septembre 2016

BURKINA FASO : la société post-insurrectionnelle au prisme des élections
Après avoir mis un terme aux de 27 ans de pouvoir de Blaise Compaoré en 2014, puis contré un coup d’État, les burkinabés ont enfin pu voter. Des élections présidentielles couplées aux législatives, avec 14 candidats. L’occasion pour nous de faire une immersion dans la capitale Ouagadougou, avant que Roch Christian Kaboré, pilier de l’ancien régime durant 25 ans, ne soit élu avec 53.5% des suffrages.
 
A la sortie du taxi, l’européen est immédiatement repéré, d’autant qu’il se fait rare. Soulèvement, Coup d’état, ça fait peur, de loin. De près, l’impression est aux élections libres, humeur joyeuse et pacifiée. Trois jeunes artisans et artistes déboulent illico proposer leurs produits, sans oublier la doyenne du lieu qui vit maigrement de sa vente de cacahuètes, assise par terre.
 
Après déballage à l’abri d’une guérite, le travail commence. « Nous, on est pour le Vrai changement », affirme Issa. Celui qui pense à un candidat aux avants postes de l’opposition, parti Sankariste ou autre, se trompe. Il parle bien de l’ancien ministre de l’Économie puis des Finances sous Blaise Compaoré, Zéphirin Diabré. « Vous étiez dans la rue pendant le putsch ? », risquons-nous. « On est sortis dès le début, on s’est réfugié quand les putschistes ont tiré dans la foule. On ressortait dès qu’on pouvait… ».
 
Des révoltés votant pour un ancien ministre de l’ex président autoritariste, ça questionne. L’homme de l’UPC, Union pour le Progrès et le Changement, a plusieurs atouts : il a des moyens financiers et une chance de gagner. Il n’est pas le plus compromis de la “dictature constitutionnelle“, et a une expérience solide hors politique : secrétaire aux Nations Unies, puis responsable au sein du groupe AREVA.
 
Amado, militant UPC rencontré au marché de gros de graines de cola, a les yeux qui brillent en évoquant le « très proche des jeunes » Zéphirin Diabré. A propos du concurrent Roch Christian Kaboré, il n’y va pas par quatre chemins : « Le programme de Kaboré, c’est le même que celui de Compaoré en 2010; vingt cinq ans de complicité… ». Le politicien s’est éloigné de Blaise Compaoré seulement dix mois avant l’insurrection d’octobre 2014 en créant le MPP, Mouvement Pour le Progrès ; ministre des Transports, des Finances, Premier ministre, il a tout fait ; son acolyte Salif Diallo, numéro deux du MPP, est rentré dans l’opposition dès 2010.
 
Tapsoba, jeune MPP reconnaissable à son tee-shirt orange, milite au marché central de la capitale. Lui aussi a participé au soulèvement populaire : « nous on a défié le régime de Blaise Compaoré ». Quand nous lui demandons si son mentor incarne le mieux la rupture, il répond par un proverbe : « Celui qui dort dans la maison sait d’où vient la fuite ». Un autre militant, plus explicite : « Ce système, ils l’ont construit, à eux de le défaire ». Et s’ils ne tiennent pas parole ? « On les délogera », rétorquent-ils. Le pari n’est pas sans risque. (16 sept. 2016, Le blog de mark bauge)

 
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