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Sénégal, la démocratie renversée !

Samedi 18 Juin 2022

 
Un jour, des historiens du quotidien raconteront sans doute avec moult détails l’odyssée rocambolesque d’un président de la république arrivé au pouvoir par le truchement d’un grand malentendu que le destin nous avait malicieusement caché. Il se pourrait même que ce mystérieux veinard grandi dans la misère sociale de son bled d’origine rapporte lui-même – quand sa conscience l’exigera de lui - les chroniques d’une ascension fulgurante strictement encadrée par des lobbies afro-élyséens spécialistes des parrainages fraternels qui perpétuent des intérêts politiques, économiques et stratégiques en Afrique francophone. Dans cette conquête effrénée de pouvoir et d’influence, figurent en bonne place l’étouffement de la presse et la maîtrise/orientation de ses centres d’intérêt vers les horizons du superflu. La corruption sera passée par là.
 
Hyperpuissance
 
Le Sénégal pouvait se prévaloir jusqu’à une époque récente d’être une des vitrines démocratiques que le continent pouvait encore offrir au monde. Sa démocratie pluraliste et apaisée s’appuyait surtout sur une presse de qualité animée par des personnalités fortes, indépendantes et conscientes de leurs missions au service de la société, des citoyens et des libertés fondamentales face à des pouvoirs tentaculaires et naturellement soucieux d’élargir sans cesse le spectre de leur hyperpuissance.
 
Aujourd’hui, sa presse – une certaine presse - en arrive à célébrer les performances répressives de policiers et de gendarmes déchaînés contre des citoyens pourtant victimes des abus de pouvoir de l’autorité politique suprême ! Cette même presse – biberonnée par la magie sans traces du guichet automatique de billets – ne choisit pas seulement de reléguer au purgatoire de ses préoccupations professionnelles le meurtre ou l’assassinat de trois jeunes sénégalais à Dakar, Bignona et Ziguinchor. Oui, 3 jeunes gens sont tombés sous les tirs d’agents des forces de sécurité, dans l’indifférence totale de certains organes de presse.
 
Démocratie bananière
 
De manière cynique, cette même presse observe également un silence bavard sur les causes fondamentales et premières de cette furie mortelle des policiers et gendarmes : la violation flagrante et assumée par Jupiter et ses sbires de principes élémentaires qui font la démocratie et qui ont pour nom liberté de manifestation, liberté de marche, liberté de rassemblement, liberté d’expression, liberté de culte... C’est la mise entre parenthèse de ces valeurs sociétales indissociables de la démocratie pluraliste qui est factuellement, et jusqu’à preuve du contraire, la cause des désordres ayant cours sous nos yeux. Les atermoiements, justifications précaires et aveuglements n’y changeront rien.
 
Ce traitement particulier des événements du 17 juin 2022 n’est que le produit de l’offensive permanente du pouvoir visant à contrôler la presse et les journalistes au Sénégal. Cette posture de soumission aboutit à transformer en faits divers les drames de personnes désarmées et fauchées par des tirs de balles réelles – au détriment du bon sens qui doit commander toute doctrine de maintien de l’ordre - les arrestations musclées d’opposants, les bouclages militarisés des domiciles de certains d’entre eux…
 
Sans limites
 
Mais le pire de l’agenda de Jupiter avec lequel une certaine presse se rend complice, c’est sa désormais volonté absolue de fouler aux pieds les engagements légaux, politiques et moraux qu’il a pris devant le peuple sénégalais de faire 2 mandats et de partir. Tous les actes qu’il pose semblent converger dans ce sens, le dernier en date étant ce veto du Sénégal (en compagnie du Togo et de la Côte d’Ivoire) contre un amendement interdisant le dépassement de 2 mandats présidentiels dans le Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La presse en fait-elle un objet pertinent de débat ? Pourquoi ne pas se poser de question sur la cohérence qu’il peut y avoir entre organiser en mars 2016 un référendum populaire dont l’un des pivots essentiels était la « sanctuarisation définitive » du principe des 2 mandats consécutifs dans la Constitution, et l’opposition du Sénégal à la formalisation de ce même principe dans les textes de la Cédéao ?
 
C’est la défense ouverte et assumée des engagements publics de la plus haute institution de notre pays qui aurait fait l’honneur et la crédibilité de la presse sénégalaise. Depuis son arrivée au pouvoir, Jupiter s‘est fait un devoir – et un plaisir malin - de balayer tous les obstacles susceptibles de contrecarrer des ambitions – longtemps enfouies ou nées en cours de route au gré des délices du pouvoir – et dont l’accomplissement renverserait techniquement et concrètement la démocratie dans notre pays. La machinerie est en marche, elle ne s’arrêtera pas en l’absence d’oppositions diverses.
 
Salut public
 
C’est à cette mission de salut public de première noblesse que les journalistes indépendants de notre pays peuvent être invités. Les prébendes et largesses de Jupiter sont certes alléchantes, mais que valent-elles face au changement de nature rampant de la démocratie pluraliste et représentative qui nous a sauvés de tant de soubresauts ? Que valent-elles face à l’égoïsme d’un Jupiter dont la morale se base sur « la fin justifie les moyens », un point un trait ?
 
Dans le confort institutionnel, administratif et judiciaire que lui garantissent ses relais corrompus dans une bureaucratie d’Etat noyautée au profit de sa volonté de puissance, seuls la presse et le peuple sont en mesure de le ramener à la RAISON garante de notre sécurité collective. Un dixième des « misères » que les journalistes ont infligé à Me Abdoulaye Wade suffirait pourtant à le remettre à sa place ! Mais le Sénégal a changé, sa presse avec !
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1.Posté par Diouf le 18/06/2022 18:18
Un résumé court mais maîtrisé des derniers événements et de la posture d'une presse sous pression (menacée ou corrompue). Notre salut passera par éveiller la masse et compter sur notre volonté de lutter et notre envie de démocratie. Vive le Sénégal !

2.Posté par Me François JURAIN le 29/06/2022 10:46
Enfin des voix s'élèvent, et il est plus que grand temps. Car enfin:
-Qui s'est ému, suite discours du 03 avril 2012 qui valait engagement d'un Président envers son peuple, de constater qu'en fait, non seulement il y avait complète distorsion entre l'engagement pris (je n'en fais pas le rappel, tout le monde en connait les termes:coruption, népotisme, ect...) et les actes qui s'en sont rapidement suivi!
Pas grand monde, voir personne, comme si une trahison d'état était normale.
-Qui s'est ému de voir que le Président de la République, fraichement élu, ne démissionnait pas de son poste de Président de l'APR, parti politique, car comment peut on légitimement se poser comme Président de tout un peuple, alors même que l'on est le Président d'un seul parti à qui l'on octroie faveurs et avantages (qui s'est posé la question de savoir comment le siège de l'APR a été financé? Avec quel argent?)
Pas grand monde, voire personne.
-Qui s'est ému d’entendre un Président déclarer publiquement: "je veux réduire l'opposition à sa plus simple expression"?
Sur le moment personne, comme si cela révélait un comportement normal en démocratie! Depuis quelques temps, on ressort les bobinos, c'est heureux!
-Qui s'est ému d'entendre un Président (de l'APR ou de la république, on ne sait plus) dire que les dossiers délictueux de ses amis, il les mettait sous son coude? Dans la même veine, lorsqu'il déclare plus tard qu'il n'est ni possible ni pensable de mettre en prison certaines personnes, sous entendu ses propres amis, ou les proches des dignitaires religieux qui ont faillit?
Personne, ou pas grand monde.
-Qui s'émeut des dérives d'un conseil constitutionnel totalement aféodé, d'un procureur de la république transformé en petit laquais d'un apprenti dictateur, d'un Préfet qui n'a en charge que le fait de recopier les brouillons qu'on lui soumet, ect...ect...ect...
La liste pourrait être longue, mais inutile car tout le monde connait tous ces faits et gestes, tout le monde, sur le moment, en a parlé, s'est offusqué et puis, comme tout passe, tout lasse, on est passé à autre chose.
Et aujourd'hui, tout le monde se réveille en se disant: mais on est plus en démocratie, on est en dictature!
Et oui. On dit toujours d'une dictature, qu'elle est rampante: et c'est exactement ce qui s'est passé au SENEGAL;
Un Président opportuniste, qui s'est fait élire par un peuple qui ne savait pas ce qu'il voulait, mais savait ce qu'il ne voulait plus, un Président qui, rapidement, s'est révélé être un traitre à la nation, puisqu'il a trahi ses engagements du 3 avril 2012 envers son peuple, un Président dont la feuille de route personnelle était toute tracée, et qui, lentement, patiemment, en dix ans à tissé sa toile, pour imposer ses mandats à répétition, jusqu'en 2034, par la force, la corruption intellectuelle et étatique, la violence, et en un mot, la dictature!
Il ne s'agit pas bien sur de prôner un camp contre l'autre: la politique politicienne ne m'intéresse pas, il s'agit de défendre des principes démocratiques, contre l'imposition d'une dictature.
Et il est regrettable que, dans un pays comme le SENEGAL, qui compte nombre d'intellectuels, qui peut se targuer d’avoir une élite de qualité, tout ce que le pays compte comme têtes pensantes, reste aphone devant des évènements aussi graves. Je respecte autant les soutiens APR, que les soutiens des oppositions, la politique politicienne n'a pas droit de cité chez moi, mais là, il s'agit de la défense des valeurs morales, des valeurs tout court. Si les sénégalais veulent que la dictature continue de s'installer dans leur pays, c'est leur droit et leur choix est le choix du peuple, il n'y a rien à en redire, sauf à en tirer des conclusions personnelles
et qui n'engagent que son auteur. Pour avoir une petite idée de ce qu'est une dictature, il n'y a qu'à se renseigner sur les conditions du peuple russe, autre dictature mondiale qui semble faire l'admiration du Président de l'Union Africaine, qui fait "confiance" au dictateur POUTINE! Pourquoi pas, mais alors après, il ne faudra ps venir se plaindre, car APRES, c'est trop tard!
Il est grand temps de dire et de crier haut et fort: REVEILLEZ VOUS! cinquante et un juristes de qualité l'ont fait dans ces mêmes colonnes: Magistrats, avocats, huissiers, notaires, tout ce qu'une population compte en têtes pensantes, formées au droit, ne restez pas aphone, exprimez vous, vous avez le droit d'être d'accord ou pas, mais sortez de votre torpeur et exprimez vous, il est grand temps, car la peur n'évite ps le danger.
REVEILLEZ VOUS!

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