Connectez-vous

Sa démission refusée par Emmanuel Macron, Elisabeth Borne reste à Matignon

Mardi 21 Juin 2022

Sa démission refusée par Emmanuel Macron, Elisabeth Borne reste à Matignon
Perte de "légitimité" d'Elisabeth Borne, "cécité" d'Emmanuel Macron, "verticalité", "fait du prince": les oppositions dénoncent mardi le refus du président de la République d'accepter la démission de la Première ministre

Comme c'est l'usage, la Première ministre Elisabeth Borne a remis ce mardi 21 juin, deux jours après le second tour des élections législatives, sa démission à Emmanuel Macron, qui l'a refusée "afin que le gouvernement puisse demeurer à la tâche et agir en ces jours", a annoncé dans la matinée l'Elysée. Le chef de l'Etat va mener "les consultations politiques nécessaires (...) afin d'identifier les solutions constructives envisageables au service des Français", a précisé la présidence.
Elisabeth Borne a remis sa démission à Emmanuel Macron, qui l'a refusée.

La démission du chef de gouvernement après les élections législatives est une tradition française, plus connue sous le nom de "démission de courtoisie". En 2017, Edouard Philippe avait présenté sa démission deux jours après le second tour des législatives, et avait été renommé dans la foulée, comme ses prédécesseurs, Jean-Marc Ayrault en 2012, François Fillon en 2007, Jean-Pierre Raffarin en 2002, Michel Rocard en 1988, Pierre Mauroy en 1981, Pierre Messmer en 1973 et Georges Pompidou en 1967. 

Cependant après le fiasco des législatives pour le camp macroniste, la question du maintien d'Elisabeth Borne à Matignon a alimenté le débat, l'opposition réclamant le départ de la cheffe du gouvernement. Une hypothèse à laquelle n'a donc pas adhéré le président, alors que se profile pour lui un tunnel d'obligations internationales (Conseil européen, G7, sommet de l'Otan) à partir de jeudi.

Emmanuel Macron, qui a déjeuné lundi avec Elisabeth Borne et les ténors d'Ensemble! Edouard Philippe et François Bayrou, a repris l'initiative face aux risques de blocage de ses réformes à l'Assemblée, en invitant des responsables des partis politiques.
 
Six d'entre eux seront reçus successivement mardi à l'Elysée : Christian Jacob (LR) ouvre la marche à 10H00, avant Olivier Faure (PS) à 11H00, François Bayrou (Modem) à 14H00, Stanislas Guerini (LREM) à 15H00, Marine Le Pen (RN) à 17H30 et Fabien Roussel (PCF) à 18H30, avant d'autres mercredi comme le chef du parti EELV Julien Bayou.

"La Première ministre a plaidé pour rester afin d'avoir les outils pour faire face à la situation et aux urgences des Français, ce qu'on ne pouvait pas faire avec un gouvernement démissionnaire et en gestion des affaires courantes", explique-t-on dans son entourage. "Il y a beaucoup de décrets à prendre dans les jours à venir, dont la revalorisation du point d'indice, la deuxième phase de Parcoursup, le bonus/malus auto, la mise en œuvre des mesures urgence de la mission Braun (sur les soins urgents et non programmés, ndlr), les primes à l'apprentissage", précise cette source qui estime qu'on "ne peut pas se permettre d'avoir un gouvernement qui ne gère pas cela".

La Première ministre va réunir l'ensemble du gouvernement à Matignon mardi en début d'après-midi, a annoncé son entourage à l'AFP. Parmi les membres du gouvernement attendus rue de Varenne figureront bien la ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Amélie de Montchalin, la ministre de la Santé Brigitte Bourguignon, et la secrétaire d'Etat à la Mer Justine Bénin, a précisé l'entourage de Mme Borne. Toutes trois battues dimanche au second tour des législatives, elles devront quitter le gouvernement.

L'opposition dénonce la "cécité" de Macron

La décision d'Emmanuel Macron de maintenir sa Première ministre à son poste a provoqué la colère de ses opposants. "C'est assez spectaculaire de voir qu'Emmanuel Macron n'a l'air de tirer aucune conséquence du scrutin qui vient d'avoir lieu" et de "sa défaite électorale cuisante", a réagi le numéro deux de LFI Adrien Quatennens devant l'Assemblée nationale, jugeant que "Mme Borne devrait s'en aller" car "elle n'est pas en situation de gouverner le pays".

"On a l'impression que le président de la République est dans une grande cécité à l'égard de la colère des Français, du désaveu qu'ils lui ont adressé" lors des élections législatives où la macronie a perdu la majorité absolue, a renchéri la députée LFI Clémentine Autain. Son collègue Manuel Bompard a de son côté estimé que cette annonce n'était "pas une surprise : on a un gouvernement dirigé par Mme Borne qui est là par le fait du prince, puisque pour l'instant il n'a jamais été approuvé par les députés, et qui va rester là quelques semaines de plus, par le fait du prince toujours", a-t-il dénoncé. Or, "Mme Borne n'a pas la légitimité pour continuer à conduire" le gouvernement, a estimé le directeur de campagne du leader de LFI Jean-Luc Mélenchon.

"Changer Elisabeth Borne pour mettre quelqu'un d'autre? C'est pas ça qui change quelque chose", a pour sa part estimé la députée RN Marine Le Pen devant la presse. Pour elle, "c'est l'état d'esprit de cette majorité extrêmement relative qui doit avoir des conséquences. Les Français doivent être entendus dans ce qu'ils ont dit et exprimé par leur vote (dimanche) et il (Emmanuel Macron) ne peut pas continuer la politique qu'il a menée car cette politique n'a pas recueilli la majorité absolue aux dernières élections législatives", a insisté Mme Le Pen.

"C'est un peu inquiétant. On a l'impression de revivre le quinquennat précédent, c'est-à-dire la verticalité, Jupiter, 'je décide et les autres s'exécutent'", a jugé Philippe Ballard, fraîchement élu député RN, sur BFMTV.

A droite, Gilles Platret, un des vice-présidents de LR, a fait valoir que "dans la logique institutionnelle, le président doit donner un signe du changement, et le premier signe qu'il donne c'est de refuser la démission de la Première ministre qui symbolise l'échec aux élections législatives, (...) de ne pas tirer les conséquences. C'est tout de même un peu paradoxal", a-t-il jugé sur BFMTV.
 
Nombre de lectures : 114 fois











Inscription à la newsletter