Lettre à Mody Niang

Mercredi 25 Novembre 2020

Hier soir, en regardant un peu les dernières informations, je suis tombé sur une nouvelle qui m'a beaucoup attristé: Mody NIANG cesse d'analyser et commenter la politique du pays, son pays, mon pays d'adoption, le SENEGAL.
 
J'ai d'abord pensé à une FAKE NEWS, puis je me suis dis que l'heure tardive devait y être pour quelque chose, j'ai également pensé que le fait que je n'ai qu'un œil  (provisoirement) avait fortement influencé ma lecture, mais, lorsque j'ai pris connaissance de tout votre message que je ne veux pas considérer comme un message d'adieu, ni même d'au revoir, m'a beaucoup peiné et attristé.
 
Bien sûr, chaque homme est maître de sa vie, et il lui donne la direction qu'il entend donner. Je ne porterai aucun jugement sur votre décision, car je sais qu'elle émane d'une réflexion profonde, guidée par la droiture et le sens de l'honneur qui vous caractérise. Vous étiez, vous êtes, une plume respectée même par les plus crétins (vous en avez cité un), même par les plus "pourris" (nous le connaissons, lui, sa femme, sa famille, ect...) et de ce fait, vous êtes craint.
 
Je ne chercherai évidemment pas à vous convaincre de revenir sur votre décision, d'abord je n'en ai pas le droit, ensuite, cette décision n'appartient qu'à vous et à vous seul.
 
Je voulais vous dire simplement que je regrette de ne plus pouvoir vous lire, surtout à un moment aussi important que nous allons vivre dans les quelques années qui viennent. Ce qui s'est passé lors du dernier "remaniement", n'augure rien de bon, et j'ai toujours en mémoire ce que j'écrivais, parce que je le pensais, dans les années 2016, à savoir que Macky SALL nous amènerait la guerre civile. Je pense que c'est ce qui se prépare, et le pouvoir prépare son armée, alors même que le seul autre camp qui reste fait ce qu'il peut pour faire de même. Cela ne sent pas bon, et moi, qui à 75 ans, n'a pas connu la guerre mondiale de 39/45, mais né juste à la fin, n'a pas envie de revivre ca, et me procure une très, très mauvaise intuition.
 
C'est donc bien sûr dans ces moments là, que des plumes et voix comme la vôtre, sont d'une extrême importance. C'est dans ces moments là, que ce que compte un pays comme gens intègres, honnêtes et fiers, doivent se lever, dire "ca suffit", et automatiquement, seront suivis. Mais si les plumes se cassent, si les voix se taisent, il ne se passera rien de bon, il n'y aura plus de rempart à cette folie de pouvoir que représente Macky SALL, qui pour moi n'a même plus tous ses esprits. Sa mégalomanie, son ego surdimensionné, sa cupidité à outrance, sa paranoïa excessive, nous montrent, s'il en était besoin, que nous sommes en présence d'un véritable NERON, qui préférera brûler son pays plutôt que de perdre le pouvoir.
 
Alors, et même si je comprends votre découragement (on le serait à moins), je veux croire qu'il s'agit simplement d'une pause, afin de reprendre un second souffle, et revenir encore plus fort, encore plus pertinent (car) l'heure est trop grave pour que le pays puisse se priver de gens tels que vous. Parce que l'homme est faillible, il connaît, nous connaissons tous des moments de découragement. Je suis persuadé qu'au fond de vous-même, vous avez pris une décision, mais peut être (ce que j'espère!) vous vous rendrez vite compte que vous ne pourrez vous passer d'exprimer et de vous battre pour les quelques vertus essentielles de la vie: l'honneur, la dignité, le respect des engagements, que ce soit verbaux ou écrits.
 
Il ne s'agit même pas de savoir ce que vont penser ceux qui ont tout fait pour vous abattre: ces gens là ne connaissent que les fonds de poubelles, seul endroit où ils sont sûrs de ne pas vous trouver! Non, vous avez, et les dernières attaques dont vous avez fait l'objet le prouvent, un rôle à jouer dans la défense des valeurs de ce pays. Avez- vous le droit, je ne dirai pas de "fuir vos responsabilités", mais avez-vous le droit de laisser en rade la foule de gens, qui grossit chaque jour, car désireux du respect des valeurs, en plein milieu du gué? Vous êtes seul juge.
 
Enfin, comme vous le savez, j'ai une carrière professionnelle assez longue, puisque j'ai été notaire, puis avocat, en FRANCE, le tout pendant 46 ans.
 
Aujourd'hui, je vais passer de l'autre côté du prétoire, et me transformer en juge.
Je vous condamne, vous Mody NIANG, à accepter une invitation à déjeuner: cette condamnation est non susceptible d'appel, et devra être exécutée à la date choisie par le condamné.
Avec mes meilleurs sentiments, et j'ose le dire, toute mon amitié,
François JURAIN
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