Pour Laurent Bigot, ex haut fonctionnaire au Quai d’Orsay de 1997 à 2013 et spécialiste de l’Afrique, on ne règle pas des dossiers diplomatiques avec Twitter. Interrogé par Sputnik sur le récent limogeage de Christophe Farnaud, chef de la section Moyen-Orient et Afrique du Nord au Quai d’Orsay, il met en cause l’absence de « profondeur historique » dans les décisions politiques et diplomatiques de l’Elysée. (Extraits de Sputniknews.com)
« (…) Ce qu’expliquent les diplomates, c’est que si on pouvait gérer les relations internationales comme on gère Twitter, on serait tous contents, mais la réalité est différente. Ce n’est pas la même temporalité. L’affaire libanaise ne tient pas dans un tweet. Pour le sommet Afrique-France qui se tenait à Montpellier il y a quelques semaines, c’est pareil : s’il suffisait de faire un sommet pour rénover la relation France-Afrique, on l’aurait fait depuis longtemps.
A contrario, le Quai d’Orsay, qui est une structure politique et diplomatique, dit: "Nous, on regarde la profondeur historique de dossiers qu’on se coltine depuis des années, et ce n’est pas aussi simple que ça en a l’air." »
« Il va falloir qu’il explique ses échecs de politique étrangère »
« Il va falloir qu’Emmanuel Macron explique ses échecs de politique étrangère. Quel dossier international a-t-il réussi? Aucun. Donc il va dire que ce n’est pas sa faute, mais celle du Quai d’Orsay. Sur les questions africaines par exemple, personne ne l’a relevé mais quand Emmanuel Macron a été élu, il a créé un Conseil présidentiel pour l’Afrique. C’était un formidable geste de défiance vis-à-vis de l’administration.
Le Président veut des idées neuves, des idées en rupture et plutôt que de passer la commande à son administration, il crée une entité vide de fonctionnaires, avec des gens dont on ne sait pas trop comment ils ont été sélectionnés par ailleurs, et ce sont eux qui vont conseiller Macron en direct sur l’Afrique. »
Nicolas Sarkozy et Bernard Henri-Lévy en Libye
« Jusqu’à Jacques Chirac, il y avait un vrai respect des diplomates. Même si on pouvait ne pas être d’accord avec ce qu’ils disaient, on reconnaissait à ces diplomates leur expertise et on écoutait ce qu’ils disaient. Cela faisait partie d’un canal d’informations parmi d’autres pour nourrir la décision politique. Cette réalité a changé sous les mandats successifs de Nicolas Sarkozy, François Hollande puis Emmanuel Macron. »
« Sous Nicolas Sarkozy, il y a eu une grande méfiance des diplomates, presque du mépris. Nicolas Sarkozy a pris ses décisions sur la Libye sur la base des conseils de Bernard-Henri Levy. J’étais encore au Quai d’Orsay, dans le couloir de la direction Afrique du Nord-Moyen-Orient, quand les diplomates du Quai ont découvert que le philosophe était à l’Élysée avec les représentants du Conseil national de transition libyen. Ils n’en étaient même pas informés. »
https://fr.sputniknews.com/20211029/etat-profond-la-guerre-de-lombre-entre-lelysee-et-le-quai-dorsay--1052387669.html
« (…) Ce qu’expliquent les diplomates, c’est que si on pouvait gérer les relations internationales comme on gère Twitter, on serait tous contents, mais la réalité est différente. Ce n’est pas la même temporalité. L’affaire libanaise ne tient pas dans un tweet. Pour le sommet Afrique-France qui se tenait à Montpellier il y a quelques semaines, c’est pareil : s’il suffisait de faire un sommet pour rénover la relation France-Afrique, on l’aurait fait depuis longtemps.
A contrario, le Quai d’Orsay, qui est une structure politique et diplomatique, dit: "Nous, on regarde la profondeur historique de dossiers qu’on se coltine depuis des années, et ce n’est pas aussi simple que ça en a l’air." »
« Il va falloir qu’il explique ses échecs de politique étrangère »
« Il va falloir qu’Emmanuel Macron explique ses échecs de politique étrangère. Quel dossier international a-t-il réussi? Aucun. Donc il va dire que ce n’est pas sa faute, mais celle du Quai d’Orsay. Sur les questions africaines par exemple, personne ne l’a relevé mais quand Emmanuel Macron a été élu, il a créé un Conseil présidentiel pour l’Afrique. C’était un formidable geste de défiance vis-à-vis de l’administration.
Le Président veut des idées neuves, des idées en rupture et plutôt que de passer la commande à son administration, il crée une entité vide de fonctionnaires, avec des gens dont on ne sait pas trop comment ils ont été sélectionnés par ailleurs, et ce sont eux qui vont conseiller Macron en direct sur l’Afrique. »
Nicolas Sarkozy et Bernard Henri-Lévy en Libye
« Jusqu’à Jacques Chirac, il y avait un vrai respect des diplomates. Même si on pouvait ne pas être d’accord avec ce qu’ils disaient, on reconnaissait à ces diplomates leur expertise et on écoutait ce qu’ils disaient. Cela faisait partie d’un canal d’informations parmi d’autres pour nourrir la décision politique. Cette réalité a changé sous les mandats successifs de Nicolas Sarkozy, François Hollande puis Emmanuel Macron. »
« Sous Nicolas Sarkozy, il y a eu une grande méfiance des diplomates, presque du mépris. Nicolas Sarkozy a pris ses décisions sur la Libye sur la base des conseils de Bernard-Henri Levy. J’étais encore au Quai d’Orsay, dans le couloir de la direction Afrique du Nord-Moyen-Orient, quand les diplomates du Quai ont découvert que le philosophe était à l’Élysée avec les représentants du Conseil national de transition libyen. Ils n’en étaient même pas informés. »
https://fr.sputniknews.com/20211029/etat-profond-la-guerre-de-lombre-entre-lelysee-et-le-quai-dorsay--1052387669.html