Des experts ont analysé la décision d’Israël d’étendre ses opérations militaires à Gaza et d’occuper la ville. Ils affirment qu’il s’agit d’une violation du droit international humanitaire ainsi que du droit du peuple palestinien à l’autodétermination.
Dr Heidi Matthews, enseignante à la faculté de droit Osgoode Hall de l’Université York, et Martin Shaw, professeur émérite de l’Université du Sussex, ont déclaré à l’Agence Anadolu que cette décision d’Israël devrait être arrêtée par une pression diplomatique internationale.
Dr Matthews rappelle que la Cour internationale de justice (CIJ) a clairement établi que l’occupation des territoires palestiniens est illégale et doit cesser le plus rapidement possible.
Elle souligne également que l’Assemblée générale des Nations unies a fixé septembre 2025 comme échéance pour la fin de cette occupation, précisant les obligations des États tiers. Selon elle, la prise permanente partielle ou totale de Gaza par Israël viole aussi l’interdiction d’acquérir des territoires par la force.
« Aucun État ne peut agrandir son territoire par la force. C’est une norme impérative du droit international et l’un des fondements essentiels de l’ordre mondial établi après la Seconde Guerre mondiale », explique Dr Matthews.
Même en tenant compte de la position officielle israélienne — selon laquelle il ne s’agirait pas d’annexion, mais de vaincre le Hamas avant de transférer les territoires à une coalition d’États arabes alliés —, Matthews affirme qu’il s’agit d’une « violation claire du droit du peuple palestinien à l’autodétermination ainsi que de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de la Palestine ».
Elle appelle à une application prudente du principe de responsabilité de protéger (R2P) afin d’éviter des attaques contre les civils à Gaza.
Enfin, Dr Matthews rappelle que la véritable source du problème n’est pas la crise humanitaire, mais politique : « La violence à la racine du conflit porte atteinte au droit du peuple palestinien à déterminer librement son avenir politique et à ne pas être soumis à une nouvelle forme d’occupation étrangère. »
- Des États occidentaux critiqués pour leur manque d’actions concrètes
Matthews souligne que les pays occidentaux n’ont pas fait suffisamment d’efforts pour une solution pacifique. Selon elle, il est urgent de reconnaître sans condition un État palestinien libre et indépendant, d’assurer l’accès à l’aide humanitaire, d’imposer des sanctions diplomatiques sévères contre Israël, notamment des sanctions personnelles contre le Premier ministre israélien et son gouvernement, ainsi que de revoir toutes les relations commerciales.
Elle ajoute que les États tiers ne doivent pas seulement prendre des mesures contre Israël, mais aussi réévaluer leurs politiques de soutien à la Palestine sur leur propre sol. Dr Matthews insiste sur la nécessité de revenir sur des mesures inquiétantes telles que la censure des prises de parole en faveur des droits palestiniens ou le classement d’organisations et d’activistes palestiniens comme groupes terroristes.
Matthews conclut : « Je ne suis toujours pas convaincue par l’idée d’appliquer une solution militaire à un problème essentiellement politique. » Elle appelle à consacrer les ressources non pas à l’industrie militaire, mais à des solutions diplomatiques et pacifiques.
- “Les opérations aggravent les crimes en cours”
Pour sa part, le professeur émérite Martin Shaw, de l’Université du Sussex, rappelle qu’Israël mène déjà une occupation illégale en Palestine, commet des crimes de guerre graves et perpètre un génocide à Gaza. Il prévient : « Les opérations annoncées vont sans aucun doute provoquer plus de violations et aggraver les crimes en cours. »
Il compare la stratégie israélienne à une forme de nettoyage ethnique, affirmant que forcer les Palestiniens à quitter Gaza vise apparemment à les expulser totalement à moyen terme.
Sur le principe de responsabilité de protéger, Shaw estime que « l’intervention internationale pour stopper les crimes d’Israël est tout à fait envisageable, mais il est difficile de dire qui la prendra en charge ».
Le professeur appelle les États tiers à retirer tout soutien à Israël, à imposer un boycott complet des produits et institutions israéliennes, et à mettre fin aux voyages sans visa pour les Israéliens.
Pour Shaw, une intervention internationale est « absolument nécessaire et urgente » sous l’obligation des États de prévenir le génocide. Il dénonce enfin le problème fondamental : « Le soutien du président américain Donald Trump à Israël et la réticence des États à compromettre leurs relations avec les États-Unis et Israël. » [AA]