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Macky Sall : déni, délires et périls

Dimanche 12 Juin 2022

Les soubresauts du chaos induit par la capture autoritaire du processus de validation des investitures et d’éliminations tous azimuts de listes d’opposition ne sont pas près de finir sous nos yeux. Les putschs opérés à la fois par le ministère de l’Intérieur et les 7 juges du Conseil constitutionnel, relevés et dénoncés par la plupart des juristes et experts électoraux – en dehors peut-être de ceux qui émargent dans les officines du pouvoir – ont manifestement accentué les balafres infligés à la démocratie sénégalaise par la détermination inconsciente du président Macky Sall à installer le Sénégal dans un purgatoire inédit. Le principe du silence qui aide autant à sacraliser les turpides des juges politiques qu’à soustraire ses membres à tout débat public est alors venu clore momentanément le scandale.
 
Sanctionnée par le duo des complices formé par le ministre de l’Intérieur Antoine Diome et le président du Conseil constitutionnel Papa Oumar Sakho, la coalition d’opposition Yewwi askan wi (YAW) a apporté une formidable réponse politique à l’exclusion de sa liste de candidats titulaires en organisant un gigantesque rassemblement populaire à la place de la nation. Un événement qui semble avoir donné le tournis au président de la république et installé la panique dans son camp. Mais aussitôt après, les discours démoniaques et décalés sont entrés en jeu, des boules puantes que des hauts responsables dévoués au chef de l’Etat se plaisent à déverser à longueur de journées sur un spectre étendu des réseaux sociaux.
 
Cette option des partisans du président Sall n’est pas neutre : c’est une fuite en avant dont l’objet consiste à dépolitiser une situation qui n’est pas loin d’être explosive et qui pourrait basculer le pays entier dans une situation de non retour. Le chef de l’Etat lui-même se complait dans ce jeu putride qui ne l’honore pas. Au moment où un député d’opposition croupit en prison au nom du bon vieux principe dit « offense au chef de l’Etat » (et chef de parti), le premier des Sénégalais s’affiche joyeusement avec un troubadour spécialisé en avanies sur les réseaux sociaux. Belle cohérence pour celui qui a fait de la régularisation des RS un cheval de bataille qui, pour l’instant, se résume à mettre au gnouf des opposants et à recycler des cas psycho-pathologiques comme celui avec lequel il entend flirter. Cette posture est indigne d’un président de la république.
 
C’est cette nonchalance qui donne du courage à ses subalternes, tout heureux de se relayer à grandes logorrhées dans les médias pour, non pas parler de politique, mais pour partager avec ceux qui les écoutent autant d’insanités que permettent leur imbécilité, arrogance et aveuglement. Le Sénégal est en danger mais le chef de l’Etat transmet à ses collaborateurs les ondes d’un déni absolu de la réalité, celle qui fédère patiemment les éléments d’une inévitable dégénérescence de son pouvoir. Mars 2021 a déjà été un avertissement mais la seule leçon que Macky Sall en a tirée n’est pas allée plus loin qu’un « ça ne se reproduira plus ». Une expression impertinente sans égard pour la quinzaine de jeunes sénégalais morts dans les rues et au sujet desquels aucune enquête n’a eu lieu. Sa seule stratégie demeure la répression comme moyen d’endiguement de toute menace potentielle contre son régime.
 
Aujourd’hui, la colère des Sénégalais a décuplé d’intensité sous les effets conjugués d’une exacerbation de l’autoritarisme d’Etat, des difficultés de survie des populations, de la montée en puissance des injustices, de la rupture d’égalité et d’équité entre citoyens…
 
A la manifestation du 8 juin dernier, des jeunes et des femmes résolus à défendre leurs droits constitutionnels et politiques ont pacifiquement délivré des signaux d’alerte à Macky Sall. Comme un adepte de la tactique de l’Autruche, il a insidieusement sous-entendu que les policiers et les gendarmes de la république défendront son projet les mois et années à venir. Cela reste à voir ! Mais il est encore grand temps que des personnalités dignes et crédibles fassent entendre raison au chef de l’Etat étant donné que juges et hauts fonctionnaires impliqués dans le processus électoral ont choisi d’être ses complices dans son funeste dessein.
 
Dans le contexte d’une campagne électorale qui arrive, les bases militantes de l’opposition sont capables de déborder ses leaders pour revendiquer à leur façon le rétablissement de droits qu’ils estiment bafoués par la volonté de puissance d’un politicien sans troupes et dont la survie ne repose que sur la police, la gendarmerie et, en recours désespéré, sur l’armée. Que pourraient faire des forces de l’ordre - même surarmées - à part ouvrir le feu sur les gens, en écraser certains avec leurs véhicules, en arrêter d’autres, constater les morts ? Le genre de scénario qui suffit pour faire vaciller ou balayer un pouvoir.
 
 
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